Pour Rémy Rioux, directeur général de l’Agence française de développement (AFD), en matière de financement du développement international des entreprises, la répartition des tâches est claire : « la mission de Proparco, notre filiale pour le secteur privé, reste uniquement orientée sur le développement du secteur privé au Sud… Le financement direct des entreprises françaises, c’est Bpifrance, le groupe AFD (lui) finance les partenaires étrangers de la France ». L’ancien secrétaire général adjoint du Quai d’Orsay s’exprimait ainsi en marge de la présentation, le 11 mai à Paris, du bilan 2016 de l’institution financière*, en réponse au Moci qui l’interrogeait sur l’appui que l’AFD pourrait apporter dans le futur aux entreprises françaises, alors que depuis plusieurs années le concept de l’aide déliée en vigueur au sein de l’OCDE et qu’applique l’AFD est critiqué par les milieux d’affaires tricolores, estimant qu’ils ne tirent pas assez profit de l’aide française.
Au vu de la réponse apportée par Rémy Rioux, il n’est donc pas envisageable de revenir sur l’aide déliée qui met à égalité toutes les entreprises, françaises ou non, soumissionnant aux appels d’offres pour les marchés publics que l’AFD finance ou cofinance.
Le maintien de l’aide déliée
C’est une réponse franche et claire qui a été ainsi apportée par le patron du bras armé du gouvernement français en matière d’aide publique au développement (APD), qui a adopté la recommandation du Comité d’aide au développement (CAD) de l’OCDE sur le déliement de l’aide publique au développement (APD) bilatérale aux Pays les moins avancés (PMA) en 2002.
Pour autant, la séparation stricte des missions entre Bpifrance et l’agence ne signifie pas que l’AFD se désintéresse totalement du secteur privé français. Rémy Rioux a ainsi laissé la porte ouverte à des sociétés de l’Hexagone, « même de grands groupes, qui se replient en termes de capacités en expatriés tout en voulant de plus en plus aller en Afrique », en quête d’analyses des risques et d’expertises techniques. « Il est normal qu’ils viennent voir l’AFD, on a cette responsabilité », a reconnu Rémy Rioux, qui a aussi rappelé que lorsque Bpifrance a été créé, « on a regroupé l’ensemble des instruments financiers pour les entreprises françaises, notamment les PME, les entreprises de croissance » et que « maintenant, il faut travailler avec Bpifrance ».
Une volonté qui s’était déjà traduite fin 2014 par un accord portant sur un appui financier de Proparco et Bpifrance au capital-investissement en Afrique et la mise en relation des entreprises françaises avec les banques locales partenaires sur place de l’AFD. Plus récemment, l’agence et la banque publiques ont décerné des prix sur l’innovation numérique à des créateurs français et africains dans le cadre du concours de startups Digital Africa 2017. Enfin, la moitié du capital de la banque publique est détenu par la Caisse des dépôts (CDC), avec laquelle l’Agence française de développement vient de lancer un fonds de 600 millions d’euros, dédié aux infrastructures, en priorité en Afrique.
Le rapprochement avec la Caisse des dépôts
François Hollande, alors président de la République, a souhaité un rapprochement entre l’AFD et la CDC. Un sujet majeur de cette coopération sera l’environnement, le climat, la transition énergétique. Rémy Rioux a eu l’occasion de le redire à plusieurs reprises. L’AFD est prête, en liaison avec Bpifrance, à aider les sociétés de l’Hexagone exemplaires en matière de responsabilité sociale et environnementale (RSE) à mesurer les risques et les opportunités à l’étranger, en particulier en Afrique. Justement, début juillet, les directeurs d’agences de l’AFD et les directeurs régionaux de la CDC se réuniront. Avec pour objectif de travailler sur un plan d’actions en commun.
La RSE est devenue une figure obligée de l’intervention publique. Depuis une bonne année, quand le Moci interroge les dirigeants des bureaux de l’AFD lors de ses reportages en Afrique, c’est ce critère qui est mis en avant pour aider les entreprises françaises, sous-entendu « nos principaux concurrents, les Chinois, ne respectent pas la RSE, ce qui vous donne un avantage ! ». Aux entreprises françaises de savoir en profiter !
François Pargny
*AFD / Développement : une stratégie déjà en ligne avec les ambitions d’E. Macron
**Afrique / Digital Africa 2017 : dix startups africaines et françaises mises en orbite par l’AFD et Bpifrance
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Pour prolonger :
–Afrique / Innovation : Bpifrance accompagne cinq startups en Afrique du Sud et en Côte d’Ivoire
-Afrique / Investissement : le premier fonds franco-africain pour les PME doté de 77 millions d’euros