Cet article a fait l’objet d’une alerte diffusée dès le 2 mai aux abonnés de la Lettre confidentielle du Moci.
Le discours protectionniste et violemment anti « libre-échange » entendu dans la bouche de certains candidat(e)s lors de la campagne présidentielle – à commencer par la candidate du Front national, Marine Le Pen, qualifiée pour le second tour– ne passe décidément pas chez les professionnels du commerce international. Et on les comprend ! Car le plus souvent abordé sous l’angle simpliste des seules menaces émanant des producteurs étrangers à l’encontre des producteurs français, donc de l’importation, le discours ‘frontiste’ omet de parler de son pendant, l’exportation. Une grave erreur lorsque l’on sait que plus de 124 000 entreprises industrielles françaises exportent (dont une grande majorité de PME), que l’exportation de biens pèse à elle seule 28,7 % du PIB (Insee), presque autant que l’importation, que le pays est le 6ème exportateurs mondial de biens et de services, et qu’au total, près d’un quart des salariés en France travaille directement pour une entreprise exportatrice !
Pas une protection, un danger
De quoi faire sortir de ses gongs la Fabrique de l’exportation, think tank qui rassemble des entrepreneurs, exportateurs, universitaires, praticiens du commerce international. Il a lancé, entre les deux tours de la présidentielle, le 29 avril, une pétition résolument antiprotectionniste intitulée : « Le protectionnisme n’est pas une protection, c’est un danger pour la France ». Un titre qui n’est pas sans cohérence, notons le au passage, avec le contenu du livre/essai que l’entrepreneur Etienne Vauchez, qui préside ce think tank, vient de publier « L’export est l’avenir de la France »*.
L’objectif : faire savoir qu’entre l’ouverture aux marchés mondiaux et le protectionnisme, les deux orientations diamétralement opposées proposées au choix des Français par les deux candidats restés en lice pour le second tour de la présidentielle du 7 mai, le premier, celui d’Emmanuel Macron d’En Marche, est le leur.
Sous la forme d’un manifeste, la pétition s’adresse « aux entrepreneurs qui sont convaincus que c’est l’ouverture au commerce international –et non l’inverse- qui permettra à notre pays de s’en sortir » et réaffirme, chiffres à l’appui, sa conviction qu’ « adopter une posture protectionniste n’apportera pas la prospérité car elle nous fermera inévitablement en retour ces marchés et détruira de l’emploi en France ».
96,5 % de la demande mondiale se trouve à l’extérieur de nos frontières
Affirmant que « ce n’est pas la mondialisation qui est à l’origine du chômage de masse en France ; elle constitue au contraire une opportunité pour le réduire », le manifeste souligne que « 96,5% de la demande mondiale se trouve à l’extérieur de nos frontières alors que le marché français ne pèse que 3,5% du marché mondial », et qu’en conséquence, « seul le choix de l’ouverture permettra à nos entreprises d’en bénéficier pour créer des emplois. »
Cette conviction vaut aussi pour la mobilité des personnes, une critique qui visent les diatribes anti-immigration : « Un salarié français du secteur privé sur huit travaille dans une entreprise à capitaux étrangers, soit près de 2 millions d’emplois en France, rappelle le manifeste. Chaque année plus de 80 millions de touristes visitent la France ; chaque jour 360 000 travailleurs frontaliers français vont travailler à l’étranger (dont 160 000 pour la seule région Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine) », sans compter les « 2,4 millions de nos concitoyens qui vivent à l’étranger et font ainsi rayonner la France ». Au final, « personne n’a intérêt à prendre le risque de déstabiliser ces échanges » avertit le texte.
Et de conclure par un appel à « ne pas se lancer dans une aventure protectionniste sans avenir », mais plutôt à « relever sérieusement et intelligemment les deux défis majeurs de l’économie de notre pays : (i) tirer le meilleur avantage des échanges internationaux, et (ii) travailler à améliorer la formation pour stimuler le marché de l’emploi ».
Bien qu’implicite, le soutien aux options du candidat d’En Marche pour le second tout de la présidentielle est clair.
Christine Gilguy
*Lire dans la précédente édition de la Lettre confidentielle : Étienne Vauchez : « Bien sûr qu’on peut tout à fait réussir à l’export avec des salaires élevés et une devise forte »
** Lien vers la pétition, cliquez sur : Le protectionnisme n’est pas une protection, c’est un danger pour la France
Pour prolonger :
–Commerce / Présidentielle : ce que disent Marine Le Pen et Emmanuel Macron du protectionnisme
–Commerce / Présidentielle : les CCEF demandent aux candidats de prendre des positions claires