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Le député de Paris Buon Tan (LREM) souhaite que l’assurance prospection bénéficie davantage aux primo-exportateurs et petits opérateurs. Rapporteur pour avis sur le commerce extérieur pour la Commission des Affaires étrangères à l’Assemblée nationale dans le cadre du Projet de Loi de Finance 2020 (PLF 2020), il a déposé le 28 octobre un amendement visant à créer un nouveau mécanisme de prêt à taux 0 pour les PME et grosses PME afin de recentrer le dispositif existant sur les petites PME et TPE, et les exportateurs débutants.
Le député a de la suite dans les idées : il plaide depuis l’an dernier pour la réinjection d’une partie des énormes excédents des assurances export publiques (+ 414 millions euros en 2018, après + 805 millions en 2017) dans le soutien à l’export des PME, TPE et primo-exportateurs, idée qu’il avait déjà défendue l’an dernier dans un précédent Avis sur le budget du commerce extérieur. Il persiste et signe cette année en proposant de puiser dans cet excédent pour financer le nouveau dispositif qu’il propose.
La nouvelle assurance prospection : un demi-succès
Pourquoi une nouvelle réforme de l’outil phare des aides à l’export des PME après une précédente introduite par Bpifrance l’an dernier ?
Pour le député Buon Tan, la réforme de l’assurance prospection « classique » introduite en 2018, qui a consisté à instaurer une formule d’avance de trésorerie immédiate en remplacement de l’ancien système purement assurantiel (voir notre fiche de présentation du nouveau système*), avec un taux minimum de remboursement de 30 % exigé de l’entreprise, est en effet un demi-succès. « Elle ne concerne que les PME et grosses PME », estime-t-il.
Pour le côté positif : cette réforme a permis de relancer cette procédure malgré les restrictions budgétaires imposées par Bercy, avec un montant de budget couvert en hausse de 41 %, à 239 millions d’euros (M EUR) en 2018 et un nombre d’entreprises bénéficiaires en hausse de 17 % (1342 entreprises contre 1150 en 2017). Le PLF 2020 est volontariste dans la poursuite de cet effort, ce dont se réjouit le député : il prévoit 146 M EUR en dépense d’avances et indemnités, soit une progression « très importante » par rapport aux résultats de 2018 (+ 36 % pour les dépenses d’indemnisation).
Mais il y a un bémol : pour Buon Tan, ce nouveau dispositif n’est pas fait pour les petites PME et très petites entreprises (TPE), souvent débutantes à l’export, dont les budgets de prospection sont beaucoup plus modestes.
L’A3P « en voie d’extinction »
Une autre formule très simplifiée, pour des budgets de 30 000 euros maximum, existe depuis 2012 pour ces petits opérateurs, l’Assurance prospection premiers pas ou A3P. Mais, regrette le député, « elle est en voie d’extinction ». Plus précisément, Bpifrance n’en fait plus la promotion : « il était question que l’A3P soit supprimée, mais elle a finalement été maintenue. Si on l’a demande, on peut l’obtenir mais elle n’est pas poussée par BPI », déplore l’élu.
Résultat, le nombre de bénéficiaires de l’A3P est en chute libre : un peu plus de 500 en 2018 (513) contre plus de 900 en 2017 (941 exactement) et les budgets couverts ont diminué de moitié entre 2017 et 2018, de 23 à 13 millions d’euros.
De quoi tirer vers le bas le bilan global de l’ensemble du dispositif (AP classique + A3P) : « le nombre total de bénéficiaires est passé en dessous de 2000 », constate Buon Tan. De fait, 1855 entreprises au total ont bénéficié de l’Assurance prospection en 2018, contre 2091 en 2017 (et 3747 à son pic de 2013, après le lancement de l’A3P)…
Or pour Buon Tan, ces « petits exportateurs » ne peuvent être négligés si le gouvernement veut tenir son objectif d’atteindre les 200 000 exportateurs en 2022, presque le double d’aujourd’hui (125 000 environ).
Un amendement visant à créer un nouveau dispositif
Pour relancer la diffusion de l’assurance prospection auprès des plus petites entreprises, le député propose donc une « démarche volontariste » passant par une refonte du dispositif financée par une fraction de l’excédent de l’assurance-crédit. Il l’a intégrée au rapport pour avis qui a été adopté par la Commission des affaires étrangères le 23 octobre et a déposé un amendement dans ce sens le 28 octobre suivant avant sa présentation en séance publique le 31 octobre.
Cette réforme consisterait en deux grands changements :
– Recentrer l’assurance prospection « classique » « sur les néo-exportateurs » ;
– Créer un dispositif de prêt à taux 0 qui serait géré par Bpifrance et s’appuierait sur un fonds de garantie de l’État alimenté par l’excédent de l’assurance-crédit. « Le fonds ne couvrirait que les défauts de paiements sur les prêts à taux 0 », précise le député qui avait en tête, peu avant le dépôt de l’amendement, un montant autour de 30 millions d’euros.
Pas sûr que Bercy apprécie. « Il va falloir se battre », assure Buon Tan, qui doit défendre son amendement et présenter son rapport en séance publique à l’Assemblée nationale le 31 octobre.
Christine Gilguy
*Guide 2019 de l’accompagnement à l’export pour les PME et ETI, Moci n°2065, avril 2019.