Comme annoncé en décembre dernier, et en accord avec les assureurs-crédits, le gouvernement a prolongé de six mois et même renforcé les dispositifs de soutien à l’assurance-crédit court terme « Cap » (Complément d’assurance-crédit), domestique et export, mis en place dans le cadre du plan de soutien au printemps 2020 : CAP et CAP + pour le domestique, CAP Francexport et CAP Francexport + pour l’export sont maintenus jusqu’au 30 juin 2021.
Mieux, leurs bénéficiaires ont été élargis : jusque-là réservés aux TPE, PME et ETI, ces dispositifs pourront bénéficier à l’ensemble des entreprises.
Et, cerise sur le gâteau, les tarifs des couvertures ont été substantiellement réduits, répondant à la demande des entreprises. Cette évolution est d’autant plus appréciable que l’ensemble des prévisionnistes s’attend à une montée des défaillances d’entreprises en Europe et dans le monde ces prochains mois. Pour les exportateurs, des nouveautés intéressantes ont en outre été introduites.
Un dispositif exceptionnel durant la crise sanitaire
Avant d’entrer davantage dans les détails qui intéressent les exportateurs, rappelons que ces dispositifs d’assurance visent à permettre aux assureurs-crédits de maintenir le niveau de leurs couvertures court terme (durée de crédit inférieure à un an, et le plus souvent moins de 120 jours) pendant la crise sanitaire afin de permettre aux entreprises de poursuivre leurs activités, voire de décrocher de nouvelles commandes.
L’État intervient soit comme co-assureur par un complément d’assurance-crédit dans le cas d’une réduction du montant de la garantie, soit par une substitution à l’assureur-crédit en cas de volonté de sa part de retirer sa garantie. CAP et CAP + concernent les transactions domestiques et les assureurs-crédit adressent leurs demandes à la Caisse centrale de réassurance; CAP Francexport et CAP Francexport + concernent l’export et sont gérés par Bpifrance assurance export.
Cinq assureurs-crédits ont signé des accords avec l’État pour faire bénéficier leurs clients de ce programme : Atradius, Axa, Euler Hermes, Coface et Groupama.
Des tarifs revus à la baisse
Selon les détails techniques contenus dans un document diffusé auprès des entreprises par la DG Trésor (voir document attaché à la fin de cet article), et que Le Moci a pu consulter, la baisse des tarifs est substantielle : ainsi, pour une couverture CAP Francexport sur un acheteur italien pour une durée de crédit de 120 jours, la prime mensuelle finale facturée par l’assureur-crédit est de 0,125 % au lieu de 0,333 % précédemment, selon le document.
Globalement, à l’export, le montant des primes appliqué par Bpifrance assurance export varie selon les pays, en fonction des catégories de risque politique de l’OCDE dans lesquelles ils sont classés (de 0 à 7, de l’absence de risque politique au risque maximal), les assureurs-crédits faisant les analyses de risques.
La grille de tarifs de l’État est pour sa part la suivante pour les six prochains mois (base mensuelle, pour une durée de crédit inférieur à 90 jours) :
–Zone A (pays en risque 0, incluant Union européenne et grands pays industrialisés) et France : 0,104 % Cap Francexport et 0,267 % pour Cap Francexport +.
–Zone B (pays émergents classés en catégorie de 1 à 4, comme la Chine, les Emirats arabes unis ou les Philippines) : 0,104 % Cap Francexport et 0,267 % pour Cap Francexport +.
–Zone C (pays classés en catégorie de 5 et 6, comme l’Algérie, l’Ouzbékistan ou l’Angola) : 0,147 % Cap Francexport et 0,367 % pour Cap Francexport +.
–Zone D (pays classés en catégorie 7, comme le Mozambique, l’Argentine ou la Mongolie) : 0,2 % Cap Francexport et 0,421 % pour Cap Francexport +.
Plus la durée de crédit augmente, plus la prime augmente : le coefficient multiplicateur est ainsi de 1,2 sur une durée de 91 à 180 jours, et de 2 pour une durée de 181 à 360 jours.
Augmentation des plafonds d’indemnisation
D’autres changements majeurs intéressants pour les exportateurs ont été introduits depuis le 1er janvier pour l’export.
En premier lieu, les plafonds de couverture ont été rehaussés avec une possibilité de dérogation pour certaines transactions spécifiques.
Ainsi, pour chaque entreprise française assurée, les plafonds d’indemnisation maximum pour l’ensemble des acheteurs couverts avec CAP et CAP Francexport sont désormais fixés à 5 millions d’euros, les entreprises assurées pouvant demander des plafonds plus faibles en fonction de leurs besoins.
Par ailleurs, concernant les garanties de substitution CAP + et CAP Francexport + pour lesquelles l’Etat couvre 95 % du risque, le plafond est fixé à 500 000 euros par acheteur dont le risque est considéré comme moyen, et à 250 000 euros par acheteur dont le risque est considéré comme élevé. L’appréciation du risque de l’acheteur est réalisée par l’assureur-crédit.
Enfin, la garantie complémentaire CAP et CAP Francexport peut désormais atteindre jusqu’à 200 % de la garantie primaire de l’assureur-crédit, contre 100 % jusqu’à présent, soit un partage du risque pouvant aller jusqu’à 67 % pour l’État et 33 % pour l’assureur privé.
Extension aux filiales à l’étranger
Par ailleurs, des dérogations exceptionnelles à l’application de ces plafonds sont possibles mais au cas par cas. « Cette demande doit être réalisée auprès de l’assureur-crédit et fera ensuite l’objet d’un examen par les services de la Direction générale du Trésor. La dérogation sera octroyée au cas par cas en fonction du risque de défaut » indique le document de la DG Trésor.
Enfin, dernière nouveauté importante pour les entreprises internationalisées : depuis le 1er janvier, elles peuvent faire bénéficier leurs filiales à l’étranger d’une couverture dans certaines conditions.
Le document de la DG Trésor précise : « lorsque le recours à une filiale locale est nécessaire, soit parce qu’il est imposé par la législation du pays de destination ou parce qu’il constitue un facteur déterminant pour la sélection de l’offre, la filiale contrôlée par l’entreprise française peut bénéficier de couvertures CAP Francexport et CAP Francexport + ».
Autre condition, il faut que la règle de part française soit respectée : « La condition d’un minimum de 20 % de part française des marchandises ou prestations vendues pour bénéficier des couvertures à l’export reste applicable ».
Les exportateurs devraient pouvoir mieux utiliser un dispositif qui, jusqu’à présent, a été relativement peu sollicité par les assureurs-crédits, selon nos informations. « Cela va dans le bon sens » nous a confié un bon connaisseur du dossier.
Christine Gilguy