Avec des engagements en hausse de 40 % depuis 2015 (+ 9,6 % par rapport à 2017), à 11,4 milliards d’euros en 2018, dont 46 % en Afrique, mais aussi plus de projets en relation avec le climat et de meilleures articulations avec les priorités de l’action extérieur de l’Etat, l’Agence française de développement (AFD) tient son cap, fixé par le président Macron et le gouvernement. C’est le message principal qu’a fait passer son directeur général Rémy Rioux lors de la présentation à la presse, le 10 avril, du bilan 2018 de cette agence devenue le principal bras financier de la France en matière d’aide au développement.
Côté chiffres, ils sont d’autant plus un motif de satisfaction pour la direction de l’AFD que la France vient de voir confirmée par le Comité d’aide au développement de l’OCDE sa position de 5ème contributeur mondial en matière d’aide publique au développement (APD), avec un taux de 0,43 % du revenu national brut (RNB). Ce qui lui permet d’envisager sereinement l’objectif fixé par le président Macron de parvenir à un taux de 0,55 % en 2022. L’AFD a un rôle essentiel à jouer pour l’atteindre : elle va d’ailleurs bénéficier cette année d’une enveloppe budgétaire supplémentaire de 1 milliard d’euros pour les aides sous forme de dons.
L’Afrique et le climat : deux priorités
Les 11,4 Md EUR de 2018 se sont répartis entre l’Afrique (5,3 Md, 46 %) et la nouvelle zone dite des « Trois Océans » (1,7 Md, 15 %), qui inclut les îles de l’Océan Indien, les Orients (2,8 Md, 25 %) et l’Amérique latine (1,5 Md, 13 %). Quelque 846 projets supplémentaires ont été lancés, 94 de plus qu’en 2017.
L’Afrique, en tête des priorités géographiques, a été bénéficiaire des trois quarts des ressources budgétaires de l’Agence, soit les dons et bonifications de prêts, mais aussi du premier programme massif de soutien à l’entrepreneuriat en Afrique initié par la France : l’initiative « Choose Africa », lancée le 13 mars dernier, vise à soutenir le développement de 10 000 entreprises et start-up africaines d’ici à 2022 et utilisera tous les outils de l’AFD, y compris sa filiale dédiée au secteur privé Proparco. La France veut injecter 2,5 Md EUR dans ce programme d’ici 2022.
En outre, le climat a eu la part belle : 4,8 Md EUR d’engagements dits à « co-bénéfice » climat, et 1,6 Md pour des projets d’adaptation au changement climatique, soit un doublement par rapport à 2017. L’AFD veut être « 100 % Accord de Paris » a rappelé Rémy Rioux. L’agence a consacré 750 millions de dollars, dont 280 au « Fonds vert », pour inciter les banques à verdir leurs financements (17 banques bénéficiaires, dont 16 en Afrique). Deux nouveaux outils ont été lancés pour aider les pays à mettre en œuvre leurs propres engagements : Adapt’Action pour aider à la préparation des projets et Facilité 2050 pour accompagner les trajectoires des pays sur le long terme.
Social, paix et prospérité
Outre le climat, le directeur général de l’AFD a voulu mettre en exergue trois autres engagements de l’agence :
-l’accent mis sur le social : « tous les projets doivent renforcer ce lien », et la nouvelle enveloppe de dons de 1 Md d’euros attendue pour 2019 devrait fortement y contribuer. Education, égalité homme-femme, médias, sports, autant de domaines concernés. Dans sa présentation, l’AFD a pris soin de mettre en avant des chiffres chocs tels que 463 000 filles scolarisées en 2018 ou 826 000 personnes alimentées en eau potable de façon pérenne grâce à ses projets.
-la paix et le développement en « 3 D » : il s’agit des trois « D » de Développement, Diplomatie et Développement. Logiquement, l’articulation de ces trois « savoir-faire » est particulièrement mis en avant dans le Sahel, où la France a accru ses efforts : plus de 2 Md d’euros injectés depuis 2013 dans des projets de développement dans cette zone où se mène la lutte contre les groupes djihadistes, et davantage encore depuis 2017 dans le cadre de l’Alliance Sahel, qui regroupe à ce jour 12 institutions (9 Md d’engagements, 2 Md déjà décaissés).
-la prospérité et la priorité au « non souverain » : l’augmentation de l’activité de Proparco, filiale dédiée au financement du secteur privé qui a « dépassé pour la première fois le milliard d’engagement en 2018 » mais aussi l’initiative « Choose Africa », déjà citée, sont emblématique de cette recherche par l’AFD d’autres leviers de développement que les traditionnels Etats.
-les partenariats, qui devienne un « réflexe » : c’est un leitmotiv du directeur général de l’AFD, qui veut multiplier les partenariats avec d’autres institutions pour amplifier l’effet de levier de ses propres ressources. Non sans succès. L’IDFC ( International Development Finance Club), ce club de 24 banques de développement qu’il préside, facilite la coopération entre institutions. Autre exemple, le STOA, un véhicule d’investissement lancé avec la Caisse des dépôts pour favoriser le financement des infrastructures durables, engrange ses premières opérations : plateforme éolienne en Inde, barrage hydroélectrique au Cameroun. Sans compter Digital Africa, une plateforme multi-acteurs pour qui vise à attirer des investissements dans l’écosystème de l’entrepreneuriat en Afrique.
Ces partenariats auraient permis de multiplier par trois les montants investis avec la participation de l’AFD, soit plus de 30 Md EUR. Elle cherche aujourd’hui les moyens de travailler avec la Chine. Autant d’orientations que ne manqueront pas de suivre les entreprises françaises qui travaillent sur des projets dans les pays en développement.
A cet égard, l’année 2019 devrait être rythmée, pour l’AFD, par plusieurs événements qui doivent permettre de confirmer les engagements du président de la République et du gouvernement en matière de développement : la préparation de la nouvelle loi de programmation et d’orientation de la politique de solidarité et de développement que porte Jean-Yves Le Drian, le ministre de l’Europe et des affaires étrangères; le Sommet du G7 en août à Biarritz sous présidence française; la reconstitution du Fonds vert pour le climat et celle du Fonds mondial pour le sida au deuxième semestre; et enfin la préparation du Sommet Afrique-France pour le printemps 2020.
C.G