Le ministère de l’Agriculture et de l’alimentation a choisi la veille de l’ouverture du Salon international de l’agriculture, le 23 février, pour organiser avec ses partenaires de l’export, la Journée Export 2018 dans les locaux parisiens de Business France et présenter son Plan stratégique 2018-2022*. Le même jour que la présentation par le Premier ministre de la nouvelle stratégie du gouvernement pour dynamiser le commerce extérieur, tout un symbole. Cette journée de tables rondes et d’ateliers pays animés par les conseillers aux affaires agricoles en poste dans les ambassades à l’étranger –une trentaine d’entre eux avait fait le déplacement– et les conseillers export Business France a été ouverte par Stéphane Travert, en présence du secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères Jean-Baptiste Lemoyne. Le ministre de l’Agriculture et de l’alimentation a saisi cette occasion pour présenter les recommandations concrètes issues des États généraux de l’alimentation (EGA) (juillet-décembre 2017) pour améliorer la performance de la filière à l’international.
« Les États généraux ont mis en lumière quatre défis à relever », a précisé Stéphane Travert qui se déclinent en axes d’action, dont certains convergent avec la nouvelle stratégie gouvernementale, par exemple sur la formation, l’accompagnement ou les filières*.
Défi 1. Accompagner d’avantage de secteurs dans leur développement à l’international
Selon le ministre, la performance de l’agriculture et de l’agroalimentaire français à l’export est réduite à un nombre « trop limité de secteurs » que sont les vins et spiritueux, les semences, les céréales et oléagineux et dans une moindre mesure les produits laitiers.
Les efforts doivent donc être portés, en particulier, sur les secteurs moins performants à l’export comme les produits alimentaires transformés, dont le solde commercial demeure déficitaire (-6,1 milliards d’euros en 2017).
Défi 2. Rattraper un déficit de « culture à l’exportation »
Dans certaines filières et certains secteurs, l’exportation n’est pas toujours perçue comme un objectif. À ce titre, par rapport à ses concurrents, la France souffre d’un déficit de ‘culture de l’exportation’. « Nous devons aussi travailler sur notre culture à l’exportation parce que seules 25 % des entreprises agroalimentaires aujourd’hui exportent contre 75 % en Allemagne. Nous avons un retard à combler », a prévenu Stéphane Travert.
La filière agroalimentaire tricolore a dégagé un excédent commercial de +5,7 milliards d’euros en 2017, mais il est est en baisse de 0,4 milliard d’euros par rapport à 2016, du fait de la forte croissance des importations (+ 2,6 milliards d’euros), supérieure à celle des exportations (+ 2,3 milliards d’euros). Pis, fait exceptionnel, « pour la première fois depuis trente ans, on a un déficit sur les produits agricoles bruts », a précisé Jean-Baptiste Lemoyne. Le solde des échanges de produits agricoles bruts (céréales, fruits et légumes, bovins…) est déficitaire de – 0,5 milliard d’euros en 2017.
Défi 3. Accompagner davantage les petites entreprises à l’international
Le défi à relever, a indiqué le ministre de l’Agriculture, consiste à amener à l’international « davantage les PME et les TPE, qui constituent la majorité du tissu agroalimentaire ». En effet, a-t-il rappelé, « deux tiers de nos exportations sont à ce jour le fait de très grands groupes ou d’entreprises de taille intermédiaire (ETI) ».
Défi 4. S’inscrire en réponse à la demande et aux besoins croissants des clients internationaux
Il ne s’agit plus de se projeter à l’international avec le seul objectif de placer des excédents du marché français mais bien de s’inscrire en réponse à la demande et aux besoins croissants des clients internationaux. Une vraie orientation client. À cet égard, le ministre estime qu’il faut « intégrer une véritable stratégie, à mettre en œuvre sur la durée, pour proposer à la fois des produits adaptés à la demande des clients internationaux et des produits adaptés aux goûts des consommateurs ». Cette stratégie doit notamment être mise en œuvre avec l’ambition de faire des normes françaises et européennes (standards sanitaires et de qualité, indications géographiques, signes de qualités, exigences sociales et environnementales, etc.) une force à l’international.
Les six propositions issues des États généraux de l’alimentation
Pour faire face à ces différents défis, le ministère de l’Agriculture, à l’issue des EGA et en concertation avec l’ensemble des partenaires de l’export, a retenu six grands axes pour renforcer l’export dans le secteur agroalimentaire.
- Renforcer nos positions dans les négociations commerciales et améliorer l’accès aux marchés étrangers.
- Mieux prendre en compte l’impact des exportations agroalimentaires françaises au regard des enjeux de sécurité alimentaire et de développement durable.
- Améliorer la promotion de l’offre agroalimentaire française et de « l’image France ».
- Renforcer la compétitivité des entreprises agricoles et agroalimentaires françaises et permettre une meilleure adaptation de l’offre.
- Développer la culture de l’international dans les entreprises et les filières agroalimentaires.
- Améliorer et adapter l’accompagnement des entreprises à l’international.
« Ces pistes de travail ont été intégrées au Plan stratégique 2018-2022* pour le développement de nos exportations et l’internationalisation des filières agroalimentaires, forêts et bois, et des produits bio-sourcés », a indiqué le ministre. Ce plan stratégique, qui s’inscrit dans le cadre de la politique économique globale mise en œuvre par le gouvernement, se développe autour de trois axes prioritaires qui reprennent l’essentiel des conclusions des EGA.
1. Mieux accompagner les entreprises dans la durée, en particulier les TPE et les PME.
Les entreprises de taille petite ou moyenne sont la cible prioritaire des actions envisagées. Il est nécessaire de les sensibiliser sur les opportunités à l’export, mais également de bien les guider dans leurs démarches (choix des pays cibles, respect des recommandations découlant des engagements pris par la France en matière de sécurité alimentaire, d’investissement responsable et de foncier, moyens à mettre en œuvre, outils publics à mobiliser, etc.).
2. Ouvrir de nouveaux marchés et maintenir l’accès aux marchés existants.
Pour ce faire, il est nécessaire de renforcer les positions de la France dans les négociations commerciales et améliorer l’accès aux marchés étrangers. L’objectif est d’affirmer auprès de la Commission européenne les attentes de la France vis à vis d’une politique commerciale européenne rénovée qui : 3 garantisse de manière prioritaire les intérêts stratégiques offensifs et défensifs (filières sensibles, principe de réciprocité dans les négociations SPS) de l’agriculture hexagonale etc.
3. Promouvoir des produits français à travers des labels et l’incarnation du savoir-faire français autour des produits alimentaires.
Si l’image d’excellence que possèdent les produits français constitue un atout clé, en particulier pour nos produits haut de gamme, cette dernière pourrait encore être renforcée et modernisée, en réponse aux stratégies agressives mises en place par les concurrents de la France.
Regagner des parts de marché
La stratégie 2018-2022 s’inscrit, selon le ministère de l’Agriculture, dans le cadre d’une vision partagée de l’ensemble des acteurs visant prioritairement à regagner des parts de marché en Europe et à l’international, développer la présence de tous les secteurs et améliorer la balance commerciale de l’ensemble des filières, augmenter le nombre d’entreprises positionnées à l’export. Autrement dit, la mobilisation sera générale.
La mise en œuvre du plan stratégique à l’export sera copilotée par le ministère de l’Agriculture et de l’alimentation et le ministère de l’Europe et des affaires étrangères, au titre de ses attributions en matière de commerce extérieur, dans le cadre des orientations fixées par le gouvernement. La Journée Export, organisée par le ministère de l’Agriculture en partenariat avec l’ensemble des partenaires de l’export, sera l’occasion, chaque année, de dresser un bilan de l’avancée de la mise en œuvre de cette stratégie.
Venice Affre
Pour en savoir plus :
*Consulter le Plan stratégique 2018-2022 du ministère de l’Agriculture et de l’alimentation pour le développement des exportations et l’internationalisation des filières agricoles, agroalimentaires, forêts-bois et des produits bio-sourcés au lien suivant : http://agriculture.gouv.fr/le-plan-strategique-export-2018-2022