Le Bureau du représentant américain au commerce (USTR) a relayé jeudi 7 janvier par voie de communiqué la décision du gouvernement américain de suspendre de nouvelles taxes douanières de 25 % sur certains produits français comme les sacs à main ou les cosmétiques en rétorsion aux taxes françaises sur les grandes entreprises du numérique. Annoncées en juillet 2020 en réponse à ce projet français jugé hostile aux géants américains du numériques, elles devaient entrer en vigueur le 6 janvier 2021.
Régulièrement brandies par l’administration Trump en cas de désaccord commercial, les surtaxes sur les produits français sont finalement repoussées sine die. A l’origine de ce conflit, la taxe sur les entreprises de services services numériques (dite taxe « GAFA », pour Google, Apple, Facebook et Amazon), votée en juillet 2019 par le Parlement français, avait provoqué l’ire du gouvernement américain et l’annonce de nouvelles taxes sur les produits tricolores.
Des négociations sont en cours à l’OCDE sur différents projets de taxation des GAFA
Fin novembre 2019, le ministère français de l’Économie avait adressé un avis d’imposition aux 26 entreprises ciblées par cette taxe avant d’en suspendre la collecte durant un an pour permettre aux négociations menées sous l’égide de l’Organisation pour la coopération et de la développement économiques (OCDE) d’aboutir à une solution non pas nationale, mais internationale. Washington avait accepté de suspendre ses mesures de rétorsion.
L’OCDE n’étant pas parvenu à boucler un accord dans le délai, la France a donc décidé de mettre en application la nouvelle taxe pour l’année 2020.
C’est ce même argument de cohérence globale (le besoin de trouver une issue coordonnée aux différents projets de taxations dans le monde) qui a conduit l’USTR à suspendre (et non annuler) les mesures de rétorsions.
En effet, le communiqué du Bureau du représentant américain au commerce précise que suspendre les actions contre la France permettra à Washington de coordonner sa réponse dans dix enquêtes sur des taxes similaires dans divers pays comme l’Inde, l’Italie, la Grande-Bretagne ou encore la Turquie. Le texte ne précise cependant aucun délai.
L’Union européenne prête à riposter
« Nous jugeons que ces sanctions sont illégitimes au regard du droit de l’OMC, a déclaré Bruno Le Maire, patron de Bercy, à la suite de l’annonce de la suspension de ces taxes. Nous appelons une nouvelle fois à un règlement global des différends commerciaux entre les États-Unis et l’Europe, qui ne feront que des perdants, surtout dans cette période de crise », a-t-il souligné, ajoutant que la France continuera « d’œuvrer pour qu’un accord politique avec une solution multilatérale sur la taxation du numérique soit trouvé à l’OCDE », a-t-il ajouté.
Cette dernière élabore actuellement un plan visant à contraindre les entreprises du numérique à payer leurs impôts aux États dans lesquels elles génèrent des profits plutôt que dans des entités fiscales moins gourmandes en taxes, où elles font enregistrer leurs filiales.
En attendant, Valdis Dombrovskis, le vice-président de la Commission européenne en charge du commerce, a prévenu sur Tweeter que l’Union européenne était « prête à explorer toutes les options si les États-Unis appliquent unilatéralement ces mesures commerciales ». « Nous sommes prêts à nous engager avec les États-Unis pour trouver une solution », a-t-il ajouté.
En d’autres termes, la discussion reste ouverte mais sans naïveté, comme l’a rappelé Franck Riester, ministre délégué en charge du Commerce extérieur, sur son compte Twitter « […] nous poursuivons nos efforts en vue d’un accord sur la taxation du numérique. Si les États-Unis reviennent sur leur décision, nous répondrons avec fermeté».
Sophie Creusillet