L’année 2011 a été particulièrement faste pour les six monarchies du Conseil de coopération du Golfe (CCG), selon une étude de l’Institut
de la finance internationale (Institute of International Finance, IIF), publiée le 18 avril (voir fichier à télécharger à la fin de cet article). En
effet, le PIB du CCG a cru de 6,9 % en 2011 et l’IIF anticipe une hausse de 4,9 %
cette année et de 4,2 % en 2013. La première raison tient à un prix du baril de Brent
qui a été en moyenne de 110,9 USD, avec une prévision à 114,1 USD en 2012, et 105 USD
en 2013. D’autre part, la production du CCG a augmenté (2010 : 29,5
millions de barils/jour ; 2011 : 29,9 mb/j ; 2012 : 30,4 mb/j).
Selon
les calculs de l’IIF, les revenus issus du pétrole ont atteint 536 milliards USD en 2011, avant un nouveau record à 567 milliards prévus en 2012. Ces
prévisions pourraient être dépassées si l’Arabie Saoudite pallie partiellement
une baisse des exportations de brut iranien estimée à 0,8 mb/j, qui sera
surtout sensible en 2012, malgré la guerre des prix que pourrait engager
Téhéran. Le total des fonds détenus dans cette zone atteint des sommes
faramineuses : 1 605 milliards USD en 2011, qui passeront à 1 905
milliards en 2012, puis à 2 139 milliards en 2013.
L’IIF indique que 60 % de ce
montant sont gérés via des fonds souverains qui investissent sur les marchés
boursiers, dans les titres à revenu fixe, l’immobilier, et des participations
minoritaires au capital de groupes mondiaux. Le surplus permet aux
gouvernements des Etats du Golfe d’accroître leurs dépenses publiques de 15 %
par an depuis 2004.
Evidemment,
les situations diffèrent d’un pays à l’autre. En Arabie saoudite, avec des
exportations pétrolières qui ont rapporté 329 milliards USD, ainsi que
la menace des révolutions dans plusieurs pays arabes, l’Etat a été
particulièrement prodigue l’année dernière. Ses dépenses ont augmenté de 24 %.
Outre des cadeaux à la population (comme le paiement de deux mois supplémentaire de salaires
aux fonctionnaires), le gouvernement a opéré des transferts vers les banques
pour qu’elles financent l’immobilier (logements et locaux industriels) ainsi
que les PME-PMI saoudiennes.
En
parallèle, Ryadh a continué à privilégier le développement des
infrastructures, la santé, la production industrielle, en mettant
particulièrement l’accent sur la formation destinée aux jeunes Saoudiens et
l’aide au secteur privée pour qu’il créé de l’emploi réservé à ses nationaux. D’autre
part, le gouvernement a décidé de stopper l’augmentation de la production
pétrolière, prévue initialement, au profit de la production de gaz (entièrement
consommée dans le Royaume), du raffinage et de la pétrochimie. Même si les
revenus des exportations pétrolières devraient être encore plus généreux cette
année (356 milliards USD escomptés), les allocations à l’économie ne
devraient croître que de 11 % en 2012. Plus que jamais, malgré ses spécificités
et une concurrence féroce, le royaume wahabite demeure le grand marché du
Golfe.
La
situation est plus contrastée aux Emirats Arabes Unis. A Abou Dhabi, l’embellie
pétrolière pourrait conduire à poursuivre la construction de grands projets
(l’émirat avait annoncé l’année dernière que seulement deux des quatre musées
prévus sur l’île de Saadiyat seraient construits). La dépense publique devrait
augmenter de 14 % cette année, notamment pour financer les hausses de salaires de 35 % à 100 % des
fonctionnaires fédéraux. A Dubaï, malgré la crise immobilière, les autres
activités de l’émirat (hub arien et commercial, zones franches, commerce de détail,
tourisme) ont fonctionné de façon satisfaisante, réalisant une croissance de
3,2 % du PIB en 2011. Mais les sanctions renforcées contre l’Iran, pour qui
Dubaï est une porte d’entrée importante, pourraient finir affecter une partie
du commerce de la ville cette année.
Au
Qatar, le PIB augmente depuis six ans au rythme annuel de 16 %. L’année 2011 a été particulièrement
faste grâce à la hausse du prix du baril (sur lequel est indexé le prix du gaz)
et une hausse de 30 % des exportations de gaz naturel liquéfié (GNL). Avec une
production de GNL de 77 millions de tonnes par an, l’émirat estime être arrivé
à un pic et ne développera plus de capacités supplémentaires. En revanche, la
construction devrait servir de moteur principal de l’activité économique. L’IIF
prévoit que des appels d’offres très importants et des contrats seront signés
début 2013, dans la perspective de la coupe du monde de football qui se
déroulera dans l’émirat en 2022.
Jean-François
Tournoud