Acteur majeur de la décarbonisation, le Grand port maritime de Marseille se positionne comme « Smart Port » pour renforcer son attractivité à l’international. En organisant un « Smart Port Day », il a montré ses meilleurs atours et atouts.
« Quoiqu’il arrive, le commerce international continuera à se développer et nous avons besoin de grands ports pour cela », note Jean-Luc Chauvin, président de la CCI métropolitaine Aix-Marseille-Provence. Reste à fidéliser les opérateurs internationaux et attirer de nouveaux trafics en proposant toujours plus de services innovants. Et pour ça, un plus fait la différence dans ce monde très concurrentiel du transport et de la logistique : se présenter comme un « Smart Port », un port intelligent résolument tourné vers l’innovation.
Premier port français (79 millions de tonnes de marchandises en 2019), le Grand Port maritime de Marseille (GPMM) s’est donc offert, le 24 novembre 2020, une tribune avec son « Smart Port Day » consacré aux innovations, solutions et réflexions sur le Port du futur. Cette manifestation, virtuelle pour cause de Covid-19, a permis aux intervenants de mettre en valeur les nouveaux outils adoptés par la plateforme portuaire.
Un port performant doit être neutre
Comme le souligne Jean-François Suhas, président du club de la Croisière Marseille-Provence, « un port performant du XXIe siècle doit être un port neutre » en termes environnementaux. Et Stéphane Reich, délégué général du port, de rappeler que « le plan stratégique du GPMM 2020/2024 a adopté comme devise : le port vert au service de l’économie bleue. »
Pour Christophe Rochegude, senior manager Wavestone et auteur d’une étude sur les stratégies de smart port, « des initiatives Smart Port existent dans tous les grands ports, à contrario peu d’entre eux développent une véritable stratégie. »
Le plan « Escales zéro fumée »
L’une des premières initiatives prises dans le cadre du plan régional « Escales zéro fumée », a été, dès 2017, le branchement électrique à quai des navires de la Méridionale (puis de ceux de sa concurrente Corsica Linea début 2020). Le GPMM a été précurseur en France et même en Méditerranée.
« Nous disposons d’un programme de 40 millions d’euros pour être en mesure de brancher à quai tous les navires de croisière, les ferries internationaux et même ceux en réparation dans nos formes », indique Hervé Martel, président du directoire du Port de Marseille-Fos, à la recherche d’une autonomie énergétique.
Un terminal gazier facilite la transition vers le GNL
Du haut de leur tour dominant le port de Marseille, les responsables de l’entreprise marseillaise CMA CGM (quatrième armateur mondial) ont, eux, décidé, en 2017, de commander neuf porte-conteneurs entièrement propulsés au Gaz naturel liquéfié (GNL) avec une prévision de vingt-six à terme.
Ce combustible permet d’éliminer 99% des oxydes de soufre et des particules fines et 85 % des émissions d’oxydes d’azote et assure au navire une émission de CO2 20 % inférieure à une motorisation au fuel. Au premier, le ‘Jacques Saadé’ en service depuis août 2019, est venu s’ajouter un second, le ‘Champs Élysées’ en octobre 2020. Un troisième arrive, le ‘Palais Royal’.
La présence d’un terminal gazier sur les installations marseillaises a facilité ces innovations. « Nous disposons d’une offre prête et très compétitive pour faire le plein en GNL », se réjouit Hervé Martel posant comme atout cette possibilité pour inciter les navires à toucher Marseille.
Prochaines étapes : une connexion au réseau ferré pour élargir l’hinterland du terminal et le développement de solutions d’avitaillement GNL pour les besoins des ports de la façade méditerranéenne.
Faire venir les entreprises innovantes
Autres services innovants mis en place par le GPMM, la localisation des remorques sans intervention humaine grâce à un tag RFID par La Méridionale (économie de 24 heures par jour de roulage dans le port) – une solution qui pourrait bien s’exporter-, le traitement des eaux usées en fond de forme (opérationnel en 2021), un projet « Provence Grand Large » mené par EDF énergies nouvelles pour installer un démonstrateur de trois éoliennes flottantes au large de Fos-sur-Mer. Mais aussi des solutions de sécurisation ou d’analyse vidéo des conteneurs.
« L’enjeu du Smart Port c’est de permettre à notre port de prendre un coup d’avance, de faire un saut quantique dans l’environnemental, l’innovation. Pour cela, il faut sourcer les entreprises innovantes et les faire venir ici », explique Jean-Luc Chauvin.
Le Port de Marseille multiplie donc les événements pour améliorer ses « smart solutions ». En juin dernier, avec la CCI métropolitaine Aix-Marseille-Provence et Aix-Marseille Université (AMU) co-organisateurs, il livrait le nom des lauréats de son deuxième « Smart Port Challenge ».
Ce programme d’innovations ouvertes a permis de faire émerger des réponses à huit défis posés par les partenaires, allant de la valorisation énergétique des eaux usées des bateaux de croisières à la sécurisation des « Smart containers » en passant par l’utilisation d’énergies renouvelables pour les conteneurs frigorifiques. Autant de projets en cours d’expérimentation dans le port phocéen.
Second temps fort, un hackathon a débuté en novembre et se déroule jusqu’au 15 janvier 2021. Ce concours, réservé aux étudiants ingénieurs ou en création artistique, et aux économistes et autres codeurs du monde entier (136 inscrits), est basé sur les données. Comportant cinq défis et 17 500 euros de donations, il vise à « proposer et concevoir des solutions numériques innovantes, des data-visualisations ou installations physiques sous forme de tableaux de bord, sites web, applications, jeux, supports graphiques, productions artistiques… »
Frédéric Dubessy,
à Marseille