Si la Turquie présente un réel potentiel pour le développement des entreprises françaises, dans le luxe, la liste des obstacles au commerce ressemble à un inventaire à la Prévert. Premier sujet sensible, la contrefaçon. D’après un document du Comité Colbert, dont La lettre confidentielle du Moci s’est procuré un exemplaire, la Turquie aurait été classée « dans le Top 5 des pays d’origine des produits contrefaits » en 2010 par l’Union européenne et « deuxième plus grand marché mondial de produits de contrefaçons » par la Chambre de commerce d’Ankara. Ce sujet sensible devrait être abordé à Istanbul par la ministre française du Commerce extérieur, Nicole Bricq, lors de son déplacement prévu entre le 16 et le 22 janvier 2013, à la tête d’une délégation de 25 chefs d’entreprise du luxe, membres du Comité Colbert. Dans le cas turc, l’association tricolore, qui regroupe 75 maisons de luxe, ne conteste pas la cohérence de l’arsenal juridique local, mais son application. Il est « difficile d’obtenir des mandats permettant d’effectuer des perquisitions » et « la sécurité des personnels effectuant les saisies n’est pas suffisamment assurée ». Sans compter la lenteur des procédures judiciaires et, plus encore, les sanctions parfois faibles (de simples amendes) infligées par les tribunaux et la suspension très régulière des peines de prison.
La contrefaçon n’est pas le seul sujet de préoccupation des entreprises du luxe en Turquie. En matière de barrières non tarifaires (BNT), la Turquie est réputée pour des délais d’acheminement et de dédouanement longs, auxquels s’ajoutent des contraintes spécifiques selon les secteurs : procédure compliquée et coûteuse d’enregistrement dans le textile et le cuir ; imposition de normes contraignantes pour obtenir des certificats d’importation dans l’alimentation et fréquence des blocages pour raisons phytosanitaires ; tests de contrôle longs et coûteux pour obtenir un certificat sanitaire. A ces BNT, peuvent s’ajouter encore d’autres obstacles, comme l’inadaptation du système de baux, le coût élevé des loyers ou encore les longs délais d’attente pour obtenir un permis de construire. Sans oublier les principales barrières tarifaires que sont la taxe à la consommation de 20 % pour les articles de luxe, à laquelle s’ajoute une taxe à la valeur ajoutée (TVA) particulièrement complexe à calculer. Résultat : les cosmétiques sont assujettis à une fiscalité globale de 41,6 % et le champagne subit un droit de douane de 50 % auquel s’additionne une taxe à la consommation de 275 % et une TVA de 18 %.
L’administration turque ne semble pas être manque de créativité, puisque, depuis octobre dans la porcelaine, l’instauration d’une taxe complémentaire lui a permis de doubler le tarif douanier à 6 % de la valeur de la marchandise.