Les difficultés auxquelles sont
confrontées les PME de l’Hexagone en Irak sont à la hauteur de l’énormité de ce
marché, dont la reconstruction est estimée à 600 milliards de dollars. Si 120
milliards d’investissement sont prévus cette année, si le montant des
importations devrait aussi approcher 73 milliards de dollars, les difficultés
administratives y sont nombreuses et les coûts d’approche particulièrement
élevés.
D’abord, « parce que les
Douanes sont particulièrement désorganisées et que rien n’étant écrit, tout
change à tout moment », indique à la Lettre confidentielle (LC) un
logisticien familier du pays. « La réglementation est incroyable »,
expliquait encore à la LC un exportateur français, à l’issue de l’atelier
d’information sur l’Irak, organisé le 18 juin par Ubifrance à Paris. Ainsi, ce
négociant tricolore devait-il livrer du matériel scientifique à une compagnie
publique à Bassora. « Problème, relate l’interlocuteur de la LC, comme
seuls des avions de transport de passagers desservent l’aéroport de cette
ville, notre client nous a demandés de livrer à Bagdad, qui reçoit les avions
cargos qui sont seuls susceptibles de transporter un équipement aussi
volumineux que le nôtre ». Trois mois après, « le matériel est
toujours bloqué sur place », s’inquiète le vendeur français.
Ensuite, il faut être payé. Lors
de la réunion de Paris, l’assistance
s’est animée à l’évocation de la pratique très particulière que les Irakiens
ont du crédit documentaire (crédoc). En effet, « en contradiction avec les
règles internationales, les banques locales ne débloquent les paiements dus aux
fournisseurs que si les entreprises clientes donnent leur accord ».
Résultat, on le comprend : les délais de paiement s’allongent,
« pouvant traîner six à sept mois », d’après un interlocuteur de la
LC.
Enfin, pour se rendre sur le
terrain, il faut obtenir un visa. Or, lors de la réunion de Paris, deux
sociétés tricolores, Entrepose et Catering International & Services (CIS),
ont aussi témoigné de leurs difficultés à obtenir des visas de longue durée (au
moins trois mois) pour leurs expatriés. Un représentant du consulat irakien à
Paris a alors exprimé son étonnement, indiquant que, pour sa part, il pouvait
« accorder sans problèmes des visas d’un an ». Les différents
interlocuteurs en ont donc déduit que le blocage se produisait à Bagdad, ce
dont l’ambassadeur d’Irak en France, Fareed Yasseen, a indiqué qu’il prenait « bonne
note », promettant au passage de régler les problèmes de ces deux
sociétés.
Une fois sur place, il faut
encore assurer sa sécurité, l’Irak étant toujours le théâtre d’attentats visant
des cibles irakiennes (police, ministères…). Selon Frédéric Gallois, qui dirige
l’agence de sécurité Gallice, « une licence de sécurité coûte entre
100 000 et 150 000 dollars, un véhicule blindé 200 000 euros…
sans compter la maintenance ! ». Résultat pour l’entreprise :
elle doit débourser entre 3 000 et 5 000 dollars pour une journée de
déplacement en convoi à Bagdad. De quoi refroidir certaines PME…
François Pargny