Le Cercle Magellan, à la fois institut et réseau privé dédié à la formation et à la certification des compétences en matière de gestion des ressources humaines (RH) à l’international, était jusqu’à présent plutôt réservé aux DRH des grands groupes multinationaux français et européens. Conséquence d’une internationalisation croissante des ETI françaises ? Il s’est ouvert en novembre 2015 à ces entreprises de taille intermédiaire (ETI)* avec le lancement d’un « Club Réseau ETI RH International », doté d’une offre forfaitaire de services d’informations, d’échanges et de formations RH destinée à réduire le retard RH des ETI à l’international.
La demande est croissante car les ETI*, comme d’ailleurs les PME, s’engageraient fréquemment sur des projets à l’international sans se préoccuper de la réglementation locale en matière fiscale et sociale, s’exposant et exposant leurs salariés à de graves problèmes. « Nous connaissons des cas de sociétés qui ont été exclues d’appels d’offres pour ne pas avoir respecté les règles d’immigration, d’autres qui n’ont pas informé leurs salariés qu’ils perdraient certains droits sociaux en s’expatriant », expose Yves Girouard, président du Cercle Magellan, intarissable sur le sujet. « J’ai personnellement eu à connaître du cas d’une société qui a envoyé une équipe de salariés au Canada, pour des activités liées à un appel d’offre, avec un simple visa touristique… », renchérit Cyril Crampon, directeur Développement et communication externe au Cercle Magellan.
Le manque d’expérience RH, un vrai handicap pour le développement l’international
En cause : des responsables de RH venus du social ou de la gestion de la paye, compétents dans l’environnement français, mais mal préparés et formés à ces problématiques, donc totalement démunis face aux complexités d’une gestion de personnel à l’international, avec ses spécificités fiscales et sociales. Une ignorance qui constitue un vrai handicap pour le développement export de ces entreprises. « Contrairement aux ETI allemandes, on n’arrive pas a envoyer des gens sur place dans de bonnes conditions pour le business », déplore Cyril Crampon.
Yves Girouard abonde dans son sens : « On a un problème avec ça, nos entreprises ne sont pas matures sur la gestion des RH à l’international : peu d’ETI françaises, d’ailleurs, répondent à des appels d’offres à l’international à cause de leur méconnaissance de ces sujets », constate-t-il. Le handicap est d’autant plus sérieux, que, selon lui, « les gouvernements sont de plus en plus sourcilleux en matière de respect des réglementations sociales et fiscales par les entreprises étrangères ». A cet égard, Magellan travaille avec certains opérateurs publics comme Bpifrance ou Business France pour sensibiliser ces entreprises au volet RH de leur développement international.
L’objectif du nouveau Club Réseau ETI est donc d’offrir aux responsables RH de ces entreprises des réponses sur plusieurs plans : l’adaptation de leurs politiques RH à l’international, l’échange de pratiques et informations « terrain », le développement d’un réseau professionnel, la mise à jour de leurs connaissances, le suivi de l’évolution des réglementations fiscales et sociales, de la méthodologie et de l’optimisation des coûts.
Le réseau lui-même est piloté par un comité professionnel composé de trois DRH d’ETI très exportatrices : Serge Bourdon (STX France, ex-Chantiers de l’Atlantique), Jocelyn Martin (Diagnostica Stago) et Laurent Doucet (Camus).
Proposer l’accès à des ressources jusqu’à présent réservées aux grands groupes …
« Notre idée, avec ce club, est de proposer à des directions générales, directions administratives et financières (DAF) ou directions des ressources humaines (DRH) d’abord l’entrée dans un réseau de professionnels des RHI et l’accès à notre base d’informations sur les réglementations financée par les grands groupes, résume Yves Girouard. On leur propose aussi des possibilités d’actualiser leurs connaissances législatives et réglementaires lors de réunions, déjeuners et visioconférences. On les accompagnera aussi pour qu’elles bénéficient des meilleures pratiques ».
Il s’agit donc en quelque sorte de permettre aux ETI l’accès à des ressources et expertises jusqu’à présent réservées aux grands groupes. S’il prodigue des formations, le Cercle Magellan ne fait toutefois pas d’audit et de conseil : il oriente, met en contact.
La gestation a pris quelques mois. » On avait des demandes, mais on ne savait pas comment nous y prendre « , relate Yves Girouard, par ailleurs un des piliers et experts du Cercle Magellan en tant que professeur en Management international des ressources humaines et directeur des MBA spécialisés GRH & mobilité internationale et International HR and Compensation & Benefits Management.
Première difficulté : « les ETI sont très éparpillées sur le territoire », contrairement aux groupes, dont les sièges et centres administratifs sont concentrés dans la région parisienne, donc faciles à contacter et mobiliser. D’où, dans le programme, le recours à des outils de visioconférences. Deuxième difficulté : le manque d’intérêt pour le sujet car « à l’international, les ETI sont plus focalisées sur le développement commercial que sur les ressources humaines ». Une erreur qui peut, on l’a vu, leur coûter cher.
Le club ETI compte d’ores et déjà 20 membres, tous issus d’entreprises industrielles, majoritairement basés en Île de France pour le moment. Ils s’acquittent d’une cotisation forfaitaire annuelle de 2 500 euros. « Fixer un objectif d’adhésions est difficile mais, si l’on parvenait à une centaine d’ici 3 à 4 ans, ce serait pas mal », estime Yves Girouard, qui ne désespère pas d’attirer les ETI des autres régions françaises – à l’instar de Camus, basé dans le sud-Ouest- et de pouvoir, à terme, développer des délégations régionales. Le premier déjeuner 2016 du Club Réseau ETI, le 8 janvier, avait pour thème : « Comment déployer une politique RH à l’international ». Dans le vif du sujet !
Christine Gilguy
*Une ETI, selon la définition de l’Insee, est une entreprises qui réalise entre 50 et 2 000 millions d’euros de chiffre d’affaires et emploie de 250 et 4 999 personnes.
Pour en savoir plus :
Le site du Cercle Magellan : www.magellan-network.com/fr/reseau-eti/