L’entreprise Ÿnsect et l’institut Néel du CNRS figurent parmi les douze finalistes du prix de l’inventeur 2023, annoncés le 9 mai par l’OEB. D’ores et déjà prometteurs à l’international, ils concourent dans la catégorie « PME » pour la première grâce à ses aliments à base d’insectes et « recherche » pour le second et son procédé de stockage de l’hydrogène sous forme solide.
L’innovation tricolore est doublement représentée dans la course au titre 2023 d’inventeur européen de l’année, organisé par l’Officie européen des brevets. Albin Chaise, Patricia de Rango, Daniel Fruchart, Michel Jehan et Nataliya Skryabina, chercheurs à l’institut Néel, unité de recherche du CNRS en physique de la matière condensée installée à Grenoble, ont été sélectionnés pour leurs travaux sur l’hydrogène.
L’équipe, qui concourra dans la catégorie « recherche », a en effet mis au point un procédé qui pourrait permettre aux énergies renouvelables d’accélérer encore leur développement : la conservation sous forme solide de l’hydrogène. Pour que ce dernier soit considéré comme vert, il doit non seulement être produit à partir de ressources renouvelables (solaire, éolien…), mais également en utilisant des technologies à faibles émissions de carbone.
L’hydrogène solide du CNRS déjà commercialisé à l’étranger
Le stockage de l’hydrogène est particulièrement énergivore, qu’il soit compressé pour être conservé sous forme gazeuse ou refroidi à – 253 °C pour être liquéfié. La méthode mise au point par les chercheurs de l’Institut Néel a l’avantage de nécessiter beaucoup moins d’énergie. Elle consiste à mélanger de l’hydrure de magnésium à des additifs métalliques et du graphite afin de comprimer l’hydrogène en disques solides faciles à stocker dans des réservoirs conçus à cet effet. Par ailleurs, ce stockage sous forme solide évite les pertes d’hydrogène dans le temps et facilite son transport. Cette invention est déjà commercialisée en Europe, en Australie et au Japon.
Dans sa catégorie, l’équipe de chercheurs sera opposée à Harald Haas et sa transmission Internet haut débit via des lampes LED, ainsi qu’à un traitement oculaire fondé sur les nanotechnologies, inventé par Thorsteinn Loftsson et Einar Stefánsson.
Dans la catégorie « petites et moyennes entreprises » c’est Antoine Hubert, cofondateur de la startup parisienne Ÿnsect, et son équipe qui défendront les couleurs françaises. Cette entreprise produit dans des « fermes verticales » des ingrédients à partir d’insectes destinés à l’alimentation humaine, celle des animaux de compagnie, ainsi que la fertilisation des plantes. La société élève notamment des vers de farine dans de hautes fermes modulaires empilées les unes sur les autres qui affichent une consommation moindre en énergie que l’agriculture traditionnelle.
Ÿnsect va ouvrir des sites sur le continent américain
Fondée en 2011, Ÿnsect a été la première entreprise à recevoir l’autorisation de l’Union européenne pour fabriquer un engrais à partir d’insectes. La société, qui a récemment intégré la promotion 2023 du French Tech Next40/120, se développe à l’international. Elle a ainsi racheté sont concurrent néerlandais Protifarm et annoncé en décembre dernier la construction de deux fermes outre-Atlantique, au Mexique et aux États-Unis.
Fin avril, à l’occasion du déplacement en Corée du Sud de ministre de la Transition numérique Jean-Noël Barrot, la PME a signé un protocole d’accord avec le centre de R&D du groupe Lotte, un des plus importants conglomérats locaux, opérant dans des secteurs aussi variés que la distribution, la chimie, l’hôtellerie ou encore les boissons alcoolisées. Les deux sociétés ont notamment prévu de conduire des recherches conjointes sur de nouveaux produits alimentaires et de mener une enquête sur les insectes dans l’alimentation humaine auprès des consommateurs européens et sud-coréens.
Le 17 avril, l’entreprise a annoncé une levée de fonds de 160 millions d’euros s’accompagnant de coupes dans les effectifs : fermeture de la production aux Pays-Bas (36 postes sur 44), réduction de l’équipe dédiée à la future usine d’Amiens et suppression des postes dédiés à l’alimentation animale qui souffre de marges insuffisantes (au total 38 postes en France). Ÿnsect souhaite désormais se focaliser sur l’alimentation humaine.
En attendant, la cérémonie de remise des prix de l’inventeur européen 2023 se tiendra le 4 juillet prochain.
Sophie Creusillet
Les autres catégories du prix de l’OEB
En dehors des PME et des laboratoires de recherche, l’Office européen des brevets récompensera également des acteurs de l’industrie et des recherches menées dans des pays non-membres de l’OEB.
Dans la première catégorie sont nominés :
– Pia Bergström, Annika Malm, Jukka Myllyoja, Jukka-Pekka Pasanen et Blanka Toukoniitty, pour la transformation de déchets et de résidus en produits renouvelables de grande qualité.
– Michiel Dusselier et Bert Sels, pour la production de bioplastiques à l’aide d’un procédé plus écologique et moins coûteux.
– Josef Faderl pour la mise au point d’un acier résistant à la corrosion permettant de produire des pièces automobiles plus légères et plus solides.
Les trois finalistes sélectionnés dans des pays qui ne sont pas membre de l’OEB sont :
– Thomas Oxley et Nicholas Opie, pour le développement d’un implant cérébral permettant de dialoguer avec des dispositifs externes.
– Kripa Varanasi, David Smith et leur équipe, pour la création d’une solution d’emballage personnalisable et non adhérente qui réduit l’émission de déchets.
– Kai Wu et son équipe, pour des batteries lithium-ion réduisant les risques d’incendie et d’explosion.