A l’image de l’économie mondiale, qui navigue entre crises et incertitudes, les tendances des investissements en 2024 reflètent des situations diverses, par zones géographiques et secteurs. Signal positif, les investissements directs étrangers (IDE) sont à la baisse, mais les fusions et acquisitions enregistrent une légère augmentation, selon le rapport annuel de la Cnuced.
Sur le papier, 2024 aura été une bonne année pour les IDE qui ont augmenté de 11 % pour atteindre 1 400 milliards de dollars (Md USD). Mais ils ont en fait diminué de 8 % si l’on exclut les flux transitant par les économies intermédiaires européennes, qui servent souvent de points de transfert avant que les flux d’investissement n’atteignent leur destination finale.
Dans les économies en développement, les IDE ont diminué de 2 %, marquant ainsi la deuxième baisse annuelle consécutive. Ce recul, estime la Cnuced, menace les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs de développement durable (ODD), qui dépendent fortement de la finance internationale. Les investissements liés aux ODD ont chuté de 11 % au niveau mondial en 2024, avec moins de projets dans l’agroalimentaire, les infrastructures, l’eau et l’assainissement qu’en 2015, lorsque les objectifs ont été adoptés.
Les IDE en Chine chutent de 29 %
L’Asie, la plus grande bénéficiaire d’IDE parmi les régions en développement, a vu les flux entrants diminuer de 7 %. La Chine a subi une chute de 29 %, et se trouve désormais à 40 % en dessous de son pic de 2022. En revanche, l’Inde a enregistré une augmentation de 13 % de l’IDE, stimulée par la croissance des annonces de nouveaux projets. Dans le même temps, les pays de l’Asean ont enregistré une croissance modeste, l’IDE augmentant de 2 % pour atteindre le chiffre record de 235 Md USD.
En Amérique latine et dans les Caraïbes, l’IDE a diminué de 9 %, avec une baisse de 5 % au Brésil. Toutefois, le nombre et la valeur des nouveaux projets ont augmenté au Brésil, en Argentine et en Colombie, ce qui laisse présager une reprise potentielle. Au Mexique, l’IDE a augmenté de 11 %, malgré des annonces de projets régionaux plus faibles, ce qui montre une certaine résistance face à des défis plus vastes.
Forte augmentation en Afrique
L’Afrique s’est distinguée en enregistrant une hausse de 84 % de l’IDE pour atteindre 94 milliards de dollars, en grande partie grâce à un seul mégaprojet en Égypte. Si l’on exclut ce projet, l’IDE du continent a augmenté de 23 %, bien que le chiffre global soit resté modeste, à 50 Md USD. Dans les économies développées, l’Europe a été confrontée à de fortes baisses.
L’IDE a chuté de 45 % si l’on exclut les économies relais, 18 des 27 pays de l’Union européenne ayant enregistré des baisses. L’IDE de l’Allemagne a chuté de 60 % et celui de l’Italie de 35 %. Même les nouveaux investissements, essentiels pour la croissance future, ont chuté de 10 % en Europe, bien que la région ait connu une augmentation de 15 % de la valeur totale des projets, ce qui témoigne de l’importance de quelques projets de grande envergure.
Bond des fusions et acquisitions aux Etats-Unis
Le Royaume-Uni a également enregistré une augmentation de 32 % des investissements de création, pour atteindre 85 milliards de dollars, et l’Italie a fait un bond remarquable de 71 %, pour atteindre 43 milliards de dollars. L’Amérique du Nord a en revanche enregistré une hausse de 13 % de l’IDE, grâce à une augmentation de 80 % des fusions et acquisitions aux Etats-Unis. La valeur des projets « greenfield » – nouveaux investissements sur les marchés étrangers – a bondi de 93 % aux Etats-Unis, atteignant 266 Md USD, sous l’impulsion des mégaprojets de semi-conducteurs.
Au plan mondial, le nombre de fusions-acquisitions transfrontalières a chuté de 13 %, mais leur valeur totale a augmenté de 2 %, les opérations de grande valeur soutenant les flux d’IDE dans plusieurs pays développés. Les annonces de nouveaux projets, principalement dans les secteurs industriels, ont connu une baisse modérée de 8 % en nombre et de 7 % en valeur. Malgré cette baisse, la valeur des projets greenfield est restée élevée, après le record atteint en 2023, grâce à des investissements à grande échelle dans la fabrication de semi-conducteurs et les technologies de l’intelligence artificielle.
Le financement de projets internationaux, principalement concentré dans les secteurs des infrastructures, a poursuivi sa tendance à la baisse, le nombre d’opérations ayant chuté de 26 % et leur valeur de près d’un tiers.
Dans ce contexte, la Cnuced s’attend à « une croissance modérée de l’IDE », soutenue par l’amélioration des conditions de financement et la reprise des fusions-acquisitions. Cependant, les risques et les incertitudes – notamment les tensions géopolitiques et l’instabilité économique mondiale – posent des défis importants.
Sophie Creusillet
Les 10 plus grands projets greenfield annoncés en 2024