Nous publions ci-après le communiqué de presse Euler Hermes du 6 octobre 2014. Les slides de présentation de l’étude macro-économique et les résultats du sondage sont dans le documents en pdf attaché à cet article.
Dans son quatrième baromètre export, Euler Hermes, leader mondial de l’assurance-crédit, dresse un panorama des intentions des entreprises françaises à l’export en 2015.
Les 23 délégations régionales d’Euler Hermes ont interrogé 800 entreprises exportatrices françaises à mi année, majoritairement des PME et issues du tissu industriel, pour connaître leurs stratégies de développement et leur fonctionnement à l’international.
Dans un contexte de repli de l’investissement et de consommation atone, l’export reste un moteur important de la croissance. Entre les sorties de récession des principaux partenaires européens et la baisse de l’euro, le déficit commercial de la France devrait se résorber progressivement pour atteindre 21 milliards d’euros en 2015, soit moins d’un point de PIB, pour la première fois depuis 2005. Pour autant, les exportations françaises restent fragiles, dépendantes de secteurs clés et de quelques grandes entreprises.
1-Export ou « desexport » ? Des signaux de redynamisation de l’export France : les conditions sont-elles réunies pour transformer l’essai ?
- 2015 : 30 milliards d’euros additionnels à saisir pour les exportateurs français
D’après les estimations de croissance dans les pays partenaires, la demande supplémentaire adressée à la France devrait connaître une nouvelle hausse, passant de 15 milliards d’euros en 2014 à 30 milliards en 2015. En tête, le regain des importations françaises en Allemagne (+4,4 milliards), aux Etats-Unis (+2,9 milliards) et en Europe émergente[1] (+2,7 milliards) devraient permettre de cibler prioritairement ces routes.
Certains secteurs bénéficieront plus directement de cette nouvelle demande : les équipements industriels (+6,2 milliards), la chimie (+6 milliards) et l’agroalimentaire (+3,8 milliards).
- L’effet prix ? L’effet aides publiques ?
Une baisse durable de l’euro[2] contribuerait positivement à la croissance française (+0,2 point de PIB), attendue à +0,8% en 2015, après +0,4% en 2014. En revanche, un euro moins fort se traduirait par une diminution plus lente du déficit commercial puisque moins de la moitié des exportations se fait dans la zone euro, tandis qu’une part non négligeable des importations continuera de se faire en dollars.
« Sur les 30 milliards d’euros de potentiel export en 2015, 11 milliards résulteront d’un euro moins fort, » commente Ludovic Subran, chef économiste d’Euler Hermes. « Parmi les secteurs gagnants de cet effet prix, on retrouve les équipements de transports, les véhicules à moteurs et les produits chimiques.»
Par ailleurs, le dispositif d’aides publiques aux entreprises apportera un nouveau souffle à l’export France. Tout d’abord, le CICE et la première tranche du Pacte de Responsabilité contribueront à faire baisser le coût du travail entre 2 à 3% selon l’entreprise en 2015, renforçant ainsi la compétitivité-prix de nombreux exportateurs. Ensuite, l’ensemble des aides (notamment le CICE) ont permis de modérer la part des services protégés d’environ 5%, dans la structure de coût des entreprises. Même si ces aides sont souvent peu ciblées sur l’export, elles bénéficient, par ricochet, aussi aux exportateurs.
- Les turbulences demeurent et l’appareil export reste fragile
Après +4% d’augmentation en 2013, l’Indice de Défaillances à l’EXport (IDEX)[3] d’Euler Hermes connaît une légère embellie avec une baisse du risque de -11% en 2014, principalement tirée par la sortie de sinistralité élevée de pays comme l’Espagne ou les Pays-Bas. Il s’établirait à -3% en 2015, avec de nombreux pays toujours marqués par un fort risque d’impayé.
« Ce léger mieux de notre indice des défaillances à l’export s’explique par la sortie de récession d’importantes économies, » ajoute Nicolas Delzant, Président du Directoire d’Euler Hermes France. « En revanche, chez nos principaux partenaires commerciaux, la sinistralité est aujourd’hui près de deux fois supérieure à son niveau d’avant crise. En Italie, les défaillances augmenteront de +3%, en Chine de +2%, et au Brésil de +9% en 2014. La vigilance reste nécessaire.»
En plus du risque toujours présent d’impayés, capter ce potentiel nécessite un appareil export solide. Le nombre d’exportateurs français est en effet en légère hausse (120 700 en 2013, après 119 300 en 2012) mais limité par rapport à des pays comme l’Allemagne (250 000) ou l’Italie (200 000). L’export repose encore trop sur quelques gros opérateurs historiques: le montant des grands contrats à l’exportation a dépassé en 2013 son niveau d’avant crise à 38,5 milliards d’euros, contre 37,2 milliards en 2007.
2- Les 800 PME et ETI exportatrices interrogées veulent trouver de nouveaux clients au grand export sans pour autant enclencher une dynamique d’investissement. Elles restent lucides quant aux risques encourus.
- La conquête de nouveaux marchés à l’export se renforce
83% des exportateurs français envisagent d’augmenter leur chiffre d’affaires à l’export en 2015. Ces intentions sont fermes pour 49% des entreprises interrogées, et probables pour 34%.
« Pour le secteur des biens de consommation, 9 entreprises sur 10 envisagent d’augmenter leur chiffre d’affaires à l’export en 2015. Ce volontarisme découle de la bouffée d’air frais générée par un euro attendu en baisse. Ce léger regain en compétitivité pourrait leur permettre d’aller saisir, en partie, la montée en puissance des classes moyennes au Brésil et en Chine », témoigne Frédéric Andrès, économiste France chez Euler Hermes.
- Les émergents de plus en plus attractifs ?
Parmi les destinations préférées des entreprises en 2014, on retrouve le trio de tête déjà présent lors deux précédentes éditions des baromètres: Allemagne, Belgique, Espagne. À noter, la lente descente de l’Italie en sixième position, au profit des Etats-Unis et du Royaume-Uni, où la reprise économique est bien plus importante qu’en zone euro.
« Alors que l’Allemagne, la Chine et les Etats-Unis caracolaient en tête des pays visés lors de nos deux précédentes éditions, les entreprises interrogées cette année leur préfèreront en 2015 : le Brésil, l’Algérie, l’Inde, la Chine, le Royaume-Uni et le Maroc. Le grand export attire désormais de plus en plus d’entreprises souhaitant profiter des besoins grandissants en infrastructures et en équipements industriels, et d’un consommateur chaque jour plus gourmand en marques françaises, » explique Ludovic Subran.
- Les impayés : risque numéro 1 à l’export selon les entreprises interrogées
Le risque d’impayés se maintient au sommet du classement des freins mentionnés par les exportateurs : 55% des entreprises interrogées craignent l’incapacité de leurs clients à honorer leurs engagements. Elles sont 46% à considérer que les coûts de transports, logistique et douanes sont un frein à l’export, et 45% à ne pas avoir le capital humain suffisant pour se développer à l’export. En revanche, le risque de financement est relativement limité : il touche moins d’une entreprise sur trois, mais est plus présent chez les petites entreprises.
« Parmi les facteurs aggravants du risque d’impayé, 47% des entreprises déclarent manquer d’information sur la situation financière de leurs clients potentiels, 39% craignent la volatilité de la devise de paiement de leur client, et 36% sont sensibles au risque politique ou fait du prince -confiscation et expropriation. » analyse Nicolas Delzant. « S’ajoutent à ces risques, la pression des délais de paiement à l’export, qui mobilisent sur de longues durées la trésorerie de l’entreprise. Seules 5% des entreprises interrogées anticipent une baisse de leurs délais de paiement à l’export en 2015. »
- Plus d’entreprises bénéficient d’aides publiques, mais la dynamique d’investissement ne s’enclenche toujours pas
En 2014, 37% des entreprises ont déjà bénéficié d’aides publiques à l’export contre 23% dans les résultats du baromètre en 2012. La question du ciblage reste pourtant entière : 2/3 des petites entreprises n’y ont pas recours.
En revanche, seulement une entreprise sur trois investira davantage à l’export en 2015. C’est plus que la part d’entreprises souhaitant investir sur le territoire français (une sur cinq) mais cela reste limité. Parmi les secteurs où la dynamique d’investissement export sera la plus forte, on retrouve l’industrie automobile, l’agroalimentaire et les services.
« Au-delà de simples transactions, parfois risquées, l’export est aussi l’occasion d’innover en s’exposant à de nouveaux consommateurs et de nouvelles habitudes de marchés. Sa pérennité nécessite d’investir en recherche et développement, parfois d’ouvrir une filiale, ou de s’associer à des partenaires étrangers. Malgré des intentions bien orientées pour 2015, notre baromètre démontre aussi la timidité des entreprises: un exportateur sur trois a déjà décidé de ne pas investir à l’export en 2015, » conclut Ludovic Subran.
(Euler Hermes, 6 octobre 2014)
[1] Hongrie, Pays Baltes, Pologne, Slovaquie, Turquie
[2] Hypothèse d’une dépréciation de l’euro de 10% par rapport au dollar (observée depuis le point haut de mai 2014), soit une baisse d’environ 5% du taux de change effectif réel.
[3] L’indice synthétise le risque de défaillance d’entreprises chez les principaux partenaires commerciaux de la France