Le 26 août au matin, Jacques Attali, qui préside l’organisation de solidarité internationale PlaNet Finance, a remis à François Hollande le rapport que le ministre de l’Économie de l’époque, Pierre Moscovici, lui avait confié en mars dernier sur « la dimension économique de la francophonie ».
Selon l’ancien conseiller du président Mitterrand, 230 millions de personnes dans le monde parlent français et ce chiffre pourrait s’élever à 770 millions en 2050. « Et en exploitant mieux ce potentiel, on pourrait ainsi créer un million d’emplois et de nouvelles richesses de l’ordre de 50 milliards de dollars », a-t-il affirmé, lors d’une conférence de presse, tenue au ministère des Affaires étrangères et du développement international, après la réception par le président de la République du rapport intitulé « La francophonie et la francophilie, moteurs de croissance durable».
Dans ce document d’environ 100 pages, le président de la mission et les deux rapporteurs qui l’entouraient, l’inspectrice des Finances Adrienne Brotons et l’auditrice au conseil d’État Angélique Delorme, ont dressé une liste de 53 propositions, parmi lesquelles la constitution d’une Union économique aussi intégrée que l’Union européenne.
Selon Jacques Attali, « aller vers une Union économique potentiellement est aussi important pour notre pays que l’Union européenne, ce qui n’est pas contradictoire pour lui. La France peut appartenir aux deux, comme le Royaume-Uni avec le Commonwealth ».
L’enseignement de base est la clé
Précisant sa pensée, l’économiste français a expliqué qu’il n’était pas question de créer une union commerciale. « C’est de la compétence de l’Union européenne », a-t-il rappelé, tout en citant toute une série de secteurs « laissés en jachères par l’UE et que les nouvelles technologies pourront permettre de partager » : enseignement, santé, culture, technologie, recherche-innovation et infrastructures.
Le rapport mentionne, néanmoins, comme axe de développement entre pays francophones l’établissement d’une position commune lors des négociations commerciales et environnementales.
« L’enseignement de base est la clé », estime le président de PlaNet Finance, pour qui, faute de réaction, « la perte du français est toujours possible ». Or, la demande de français existe : au Maroc, par exemple, où l’offre d’enseignement est bien supérieure ; au Nigeria, vaste nation anglophone au cœur de l’Afrique francophone, où la demande d’enseignants de français est forte.
« Comme la demande est immense dans le monde, il y a de la place pour tous », assure Jacques Attali, ce qui a amené les auteurs du rapport à proposer la constitution d’un groupe d’écoles et d’instituts privés pour compléter l’offre publique.
Former les élites
Il est aussi essentiel de former les élites. « Les jeunes ne doivent pas seulement se rendre dans les universités américaines si on veut vendre des produits dans le monde et développer le tourisme en France », appuie Jacques Attali.
Parmi les propositions du rapport sur la francophonie, les alliances françaises et les instituts français dans le monde possèderaient une « mission d’agent touristique de la France et de promotion des produits français », il faudrait aussi « favoriser la création d’écoles maternelles francophones partout dans le monde », « alors que la Banque mondiale a tendance dans ses programmes d’éducation primaire à choisir l’anglais », plaide le président de PlaNet Finance.
Il serait encore nécessaire de concentrer plus les Volontaires internationaux en entreprise (VIE) dans les Etats francophones, de renforcer l’intégration de l’Ohada (Organisation pour l’harmonisation du droit des affaires) en l’élargissant à de nouvelles nations ou encore constituer des guichets douaniers spécifiques pour les pays francophones.
Pendant la conférence de presse, Jacques Attali a encore révélé qu’un « groupe de travail gouvernemental autour du rapport » serait constitué.
François Pargny