Une situation géographique stratégique entre l’Occident et l’Orient, une stabilité politique dans une région sous tension, une croissance du PIB de 4 %, une balance commerciale excédentaire, une dette publique contenue, une économie en cours de diversification, une ouverture aux investissements… C’est à une véritable opération séduction que se sont livrées les autorités omanaises, le 12 mai à Paris dans les Salons Hoche, devant les investisseurs et chefs d’entreprises français participants au séminaire « Investir à Oman », organisé par la Chambre de commerce franco-arabe (CCFA), à l’occasion de la venue à Paris d’une délégation omanaise conduite par Fayçal Al Saïd, directeur général de l’Autorité publique pour la promotion de l’investissement et le développement de l’export du sultanat (ITHRAA).
Dans les années 70, avec l’arrivée au pouvoir de l’actuel sultan Qabous bin Said, le sultanat d’Oman, petit État situé à l’extrémité du sud-est de la péninsule arabique « a instauré une stabilité économique grâce à des plans quinquennaux qui se sont succédé et ont permis de réaliser des réformes sur le plan économique afin de développer les infrastructures », a rappelé Saleh Al Tayar, le secrétaire général de la CCFA, qui ouvrait cette matinée consacrée au développement de la relation commerciale franco-omanaise.
Une économie diversifiée et des besoins en investissements
Alors que les hydrocarbures (pétrole et gaz) fournissent encore 80 % des recettes budgétaires de ce pays de 309 500 km², les autorités omanaises ont engagé un processus de diversification de l’économie avec la mise en œuvre d’un plan « Vision 2020 », qui prévoit que la part des activités non pétrolières dans le PIB atteindra 81 % en 2020. Cette politique de diversification de l’économie omanaise est au cœur du 9ème plan quinquennal 2016-2020. En effet, ce plan de développement sera axé sur une stratégie de diversification de l’économie qui devrait augmenter la contribution des secteurs non pétroliers (transports, infrastructures, tourisme, pêche, agroalimentaire) au PIB.
Les secteurs hors hydrocarbures vont devenir le principal moteur du développement économique d’Oman. « Le pays a mis en place une stratégie pour attirer les entreprises étrangères mais également toutes les compétences nécessaires à ce développement », a ainsi informé Humaid Bin Ali Al Maani, ambassadeur du sultanat d’Oman à Paris, qui a déroulé à son tour les arguments pour promouvoir les atouts d’Oman. Parmi les mesures d’incitation mises en avant, un cadre réglementaire favorable avec une fiscalité attractive et la possibilité pour les investisseurs étrangers de posséder jusqu’à 100 % de leurs entreprises.
« Les investissements étrangers directs sont très importants pour notre pays », a confirmé pour sa part Azzan Albousaïdi, directeur général du Plan et des Études de l’ITHRAA. De fait, plusieurs projets de développement des infrastructures (aéroportuaires et portuaires) sont en cours. Oman prévoit d’agrandir le port à conteneurs de Salalah, l’un des plus grands de la région, pour porter sa capacité annuelle à 7 millions d’EVP (équivalent vingt pieds) contre 5 millions actuellement. « Nous jouissons d’une stabilité sur le plan monétaire, politique et sécuritaire », a précisé Azzan Albousaïdi, un atout pour servir de hub régional: « à partir d’un port d’Oman, il faut deux semaines pour atteindre les principaux pays de l’Est africain tout comme les pays asiatiques ».
Une présence française forte dans l’énergie et le développement urbain (eau et gestion des déchets)
Le volume des exportations françaises vers Oman a atteint 464 millions d’euros en 2015. « Nous ne sommes pas de très bons exportateurs, mais nous sommes d’excellents investisseurs », a commenté Hervé de Charette, président de la CCFA. Cela peut s’expliquer par le fait que la France est surtout présente à Oman sur des marchés publics d’infrastructures : « Ce sont des marchés d’investissements plus que de commerce », a justifié le député, ancien ministre des Affaires étrangères (sous Alain Juppé, 1995-1997).
Selon lui, une cinquantaine d’entreprises françaises sont présentes à Oman, avec une forte concentration sur des secteurs clés de l’économie omanaise : l’eau, l’environnement et l’énergie.
Dans le secteur pétrolier et parapétrolier, le groupe Total a signé en décembre 2013 un accord d’exploration et de partage de production avec le gouvernement d’Oman. Bureau Veritas propose de son côté des services d’évaluation, de conformité, d’audits et d’inspections des plateformes pétrolières.
Concernant le développement urbain, Suez a remporté en mars dernier un contrat pour la construction et l’exploitation d’une usine de dessalement de l’eau de mer. Sa filiale Degremont, en consortium avec Al-Ansari Trading Entreprise, une société locale de génie civil, a décroché un contrat pour concevoir et construire au nord du pays, dans la municipalité d’Al-Amerat, une station d’épuration d’une capacité de 18 000 m³ par jour. Veolia, déjà présent dans le dessalement de l’eau, a pour sa part remporté début mai avec son partenaire Al Ramooz National LLC un contrat d’une durée de sept ans pour la gestion des déchets omanais.
Des opportunités dans les transports, l’aquaculture, le tourisme…
Des opportunités pour les entreprises françaises sont à saisir dans le transport ferroviaire. Oman Rail, la société d’exploitation du réseau ferroviaire national projette de créer un important réseau de transport de voyageurs et de marchandises reliant le sultanat d’Oman aux autres pays du Golfe. Un tel projet nécessite 12 000 kilomètres de voies ferrées. Les opportunités pour les Français portent notamment sur « ce qui a trait au génie civil, aux travaux d’infrastructures, à l’entretien et la maintenance ainsi qu’à la formation du personnel local », a signalé Imad Khaduri, directeur général de la Stratégie et du plan au sein d’Oman Rail.
La pêche est un secteur majeur de l’économie. Le sultanat jouit de 3 240 kilomètres de côtes pour l’exploitation des ressources halieutiques. «Vous pouvez trouver jusqu’à 150 espèces de poissons à Oman », a prévenu Andréas Ntatsopoulos, directeur exécutif d’Oman Aquaculture Development Company (OADC), la société omanaise pour le développement de l’aquaculture, créée en 2014 pour développer une pêche commerciale durable dans le sultanat. Et d’ajouter : « 152 000 tonnes de poissons ont été pêchées en 2014 ! ». Des plans sont actuellement en application pour stimuler la croissance du secteur et accroître sa valeur. Les futurs investissements dans le secteur de l’aquaculture se concentreront davantage sur la culture de crevettes marines et autres crustacés.
Le sultanat cherche à développer le tourisme. En 2014, Oman a accueilli 2,2 millions de touristes. Des projets d’infrastructures aéroportuaires sont en cours pour renforcer son attractivité dans ce domaine. Des installations hôtelières sont également en cours de construction. Le pays cible un tourisme de conférence.
Le voyagiste français Look Voyages a jugé les atouts omanais suffisamment à son goût pour y investir : il va inaugurer l’hiver prochain un « Club Lookéa ». Installé à 100 km de la capitale Mascate, le Club Lookéa Sultana accueillera les premiers voyageurs dès le 17 décembre 2016. « Dans le tourisme, la France peut être présente de manière importante. Nous pensons attirer 40 millions de touristes en 2040 », a renseigné Azzan Albousaïdi.
Beaucoup reste à faire, néanmoins, pour améliorer la performance commerciale de l’Hexagone. Avec une part de marché de 1,62 %, la France se positionne au 14ème rang des fournisseurs du sultanat d’Oman, contre 3,23 % pour l’Allemagne. « Nos relations politiques sont courtoises, mais nos relations économiques sont très éloignées du niveau de nos relations politiques », a regretté le président de la CCFA. « Nous voulons doubler notre part de marché et renforcer notre présence dans la vie économique omanaise ».
Venice Affre