Le Club d’investissement franco-nigérian ou French Nigerian Investment Club (FNIC), annoncé lors de la visite officielle d’Emmanuel Macron au Nigeria, les 3 et 4 juillet 2018, s’est réuni pour la première fois à Paris le 21 janvier, à un moment particulièrement bien choisi.
Ce rendez-vous s’est en effet tenu avant que le président de la République accueille, le soir même au château de Versailles, 150 dirigeants d’entreprises françaises et étrangères, dans le cadre de la campagne Choose France, dont les Nigérians Aliko Dangote, fondateur du groupe éponyme, Tony Elumelu, président du conglomérat Transcorp (hôtellerie, électricité…) et fondateur d’Heirs Holdings, et Jim Ovia, président de Zénith Bank.
Représentant le président français à l’occasion du premier rassemblement des 30 membres du FNIC *, son Monsieur Afrique, Franck Paris, en a profité pour passer deux messages :
1/- Après avoir initié ce club, l’État passe le relais au secteur privé. Bien que le moment soit délicat au Nigeria – les élections présidentielles et législatives sont prévues en février et des violences sont à prévoir – « nous avons, a affirmé Franck Paris, initié un réseau unique » de 30 dirigeants d’entreprises*, dont Aliko Dangote, Tony Elumelu, Jim Ovia ou encore le Français Patrick Pouyanné, P-dg de Total.
2/- Il faut apprendre à connaître ce grand pays, riche en projets publics et privés. Le conseiller Afrique d’Emmanuel Macron est ainsi revenu sur les motifs de la visite du président français au Nigeria. « Bien sûr, la sécurité, les migrants, Boko Haram, mais le focus avait surtout été mis sur la culture et le business ». Selon lui, « la culture doit faire levier pour changer la perception du Nigeria en France ». D’où les accords signés dans le cinéma, la musique et le sport, mais aussi l’initiative, lors du séjour du chef de l’État, de proposer la création d’un club d’investissement bilatéral. Paris va également accueillir Nollywood du 9 au 12 mai pour promouvoir la première industrie cinématographique d’Afrique. Un manifestation qui annonce la saison des cultures africaines qui sera lancée l’année prochaine.
A. Dangote : prêt à investir avec des entreprises françaises en Afrique
Le secteur privé, qui a répondu présent, va-t-il se saisir de ce projet ?
A priori, l’envie de manque pas. « L’idée du club est d’intensifier les relations économiques bilatérales. Il s’agit d’accroître les exportations et les investissements français, mais aussi de promouvoir l’investissement nigérian dans l’Hexagone et aussi de réaliser des investissements communs », a souligné, pour sa part, Cathia Lawson-Hall, coordinatrice du FNIC pour la France et directrice des Relations clients et de la Banque d’investissement pour l’Afrique à la Société Générale.
S’exprimant devant la presse, Aliko Dangote s’est déclaré prêt, de son côté, à investir en France, mais aussi avec des entreprises françaises en Afrique. Ce continent reste « clé », a-t-il assuré, tout en n’excluant pas, de façon générale, des opérations hors d’Afrique. En revanche, s’agissant de l’entrée en bourse de son groupe diversifié (ciment, engrais…), depuis de longs mois annoncé à Londres, l’homme d’affaires le plus riche du continent est resté évasif.
P. Pouyanné : Egina « réalisé à 77 % sur des chantiers nigérians »
De son côté, Patrick Pouyanné s’est félicité de l’exploitation du champ pétrolier Egina, en offshore profond à 200 kilomètres de Port Harcourt. Sa production se monte à 200 000 barils par jour. « C’est un des plus grands chantiers au monde jamais reçu en Afrique, réalisé à 77 % sur des chantiers nigérians, ce qui montre que l’on travaille avec des talents locaux pour y développer des projets pétroliers », s’est félicité le patron français.
Patrick Pouyanné a encore indiqué que le projet Ikike, représentant 45 000 barils par jour, serait approuvé dans quelques mois et qu’il espérait que le gouvernement nigérian relancerait l’exploration avant les élections.
Au regard des derniers chiffres du commerce extérieur bilatéral, il est urgent de redresser la barre. A fin novembre 2018, la France, qui importe presque exclusivement des hydrocarbures du Nigeria, enregistrait avec cet émirat africain un déficit de près de 3 milliards d’euros. Le Nigeria, géant pétrolier de 195 millions d’habitants, n’était que le 65e client de la France avec 567 millions d’euros de marchandises exportées par l’Hexagone, d’après les Douanes françaises. Un chiffre en chute de plus de 44 % par rapport aux onze premiers mois de 2017. En cause, l’effondrement de plus de 93 % des exportations pharmaceutiques de la France…
François Pargny
* Lancé à l’occasion de la visite d’Emmanuel Macron, les 3 et 4 juillet 2018, au Nigeria, le FNIC compte 16 membres nigérians et 14 français. Outre sa coordinatrice pour la France, Cathia Lawson-Hall, directrice des Relations clients et de la Banque d’investissement pour l’Afrique à la Société Générale, et son coordinateur pour le Nigeria, Bolaji Balogun, directeur général de la banque d’investissement Chapel Hill Denham Group et président du Conseil d’administration de Lafarge Africa, les membres du FNIC sont :
– Côté français : Fatoumata Ba, fondatrice et présidente de Janngo (financement de champions digitaux panafricains) ; Fabrice Barthélémy, président de Tarkett Europe-Moyen-Orient-Afrique-Amérique latine (revêtements de sols et surfaces de sports) ; Thierry Déau, P-dg de Méridiam (développement de projets d’infrastructures publiques) ; Jean-Sébastien Decaux, directeur général Europe du Sud-Afrique-Israël de JCDecaux (publicité urbaine) ; Eric de Poncins, directeur délégué chargé de la Stratégie (fromagerie) ; Bernard Gautier, dirigeant de Wendel (société d’investissement) ; César Giron, P-dg de Martell Mumm Perrier-Jouët (boissons) ; Patrick Pouyanné, P-dg de Total (hydrocarbures) ; Bris Rocher, P-dg d’Yves Rocher (cosmétiques) ; Sydney Toledano, P-dg de LVMH Fashion Group (luxe) ; Christophe Lecourtier, directeur général de Business France (accompagnement des entreprises à l’international) ; Rémy Rioux, directeur général de l’Agence française de développement (développement) ; Pedro Novo, directeur des Financements export de Bpifrance (banque d’investissement) ;
– Côté nigérian : Aliko Dangote, fondateur du groupe éponyme diversifié (ciment, agriculture…) ; Ronald Chagoury, co-fondateur du groupe éponyme diversifié (minoterie, industrie…) ; Jim Ovia, président de Zénith Bank (banque) ; Abdulsad Rabiu, président de la Banque d’industrie nigériane (banque) ; Tony Elumelu, président du conglomérat Transcorp (hôtellerie, électricité…) et fondateur d’Heirs Holdings ; Babatunde Soyoye, co-fondateur d’Helios (société d’investissement) ; Herbert Wigwe, directeur exécutif d’Access Bank (banque) ; Mike Adenuga, fondateur de Globacom (télécommunications) et propriétaire de Conoil Producing (pétrole) ; Victoria Adefala, fondatrice du cabinet d’avocats Whitgift Law ; Yewande Zaccheaus, fondatrice d’Eventful Limited (société d’évènementiel) ; Gbenga Oyebode, président du cabinet d’avocats Aluko & Oyebode & Co et président du Conseil d’administration de CFAO Nigeria ; Tara Fela, Durotoye, directrice général de House of Tara International (cosmétiques) ; Iyinoluwa Aboyeji, P-dg de Flutterwave (infrastructure de paiement numérique) ; Eric Idiahi, co-fondateur et partenaire de Verod (société d’investissement) ; Yewande Sadiku, directrice de la Nigerian Investment Promotion Commission (NIPC) ; Ibukun Awosika Sokoa, fondatrice de Sokoa Chair Centre (ameublement) et présidente du Conseil d’administration de First Bank.
Le FNIC, qui se veut complémentaire de l’action de la Chambre franco-nigériane de commerce, bénéficie de l’appui de Medef International, de Bpifrance et Business France.