Laurent Saint-Martin effectue ce 17 janvier en Mongolie son premier déplacement de ministre délégué au Commerce extérieur et aux Français de l’étranger hors de l’Union européenne (UE) pour parrainer la signature en grande pompe, par le groupe Orano, d’un contrat pour l’exploitation d’un gisement d’uranium dans le Sud-Est du pays. Un contrat évalué à 1,6 milliards de dollars sur 30 ans.
[Mis à jour le 17/01/25 à 12H20]
La signature de ce contrat, adopté à une écrasante majorité (80 %) par le Parlement mongol le 10 janvier, est l’aboutissement de deux ans de travail entre l’entreprise Orano (contrôlé par l’État français à 90 %) et l’État mongol, ainsi que des impulsions politiques données par le président Emmanuel Macron, lors d’une visite officielle en mai 2023, et son homologue mongol, Ükhnaagiin Khürelsükh, qui lui a rendu la pareille en octobre suivant à Paris.
En termes de diplomatie économique et de commerce extérieur, il « concrétise l’ambition française de sécurisation, pour les prochaines décennies, de son approvisionnement en uranium, minerai essentiel en matière de souveraineté industrielle et énergétique », souligne-t-on au ministère délégué du Commerce extérieur. Même si la France (EDF en l’occurrence) ne sera pas le seul client du gisement mongol.
A Oulan Bator, le ministre délégué en charge du Commerce extérieur et des Français de l’étranger rencontrera le Premier ministre de Mongolie, Luvsannamsrai Oyun-Erdene, avant de participer à la signature de l’accord. Il rencontrera également le maire d’Oulan-Bator, Khishgeegiin Nyambaatar, dont « le rôle dans les travaux préparatoires à l’accord a été aussi essentiel », selon un communiqué de Laurent Saint-Martin.
Une société de projet ad-hoc, contrôlée par Orano, pour assurer l’exploitation
Dans les détails, ce contrat porte sur l’exploitation de la mine de Zuuvch-Ovood, un gisement d’uranium situé dans la province de Dornogovi, dans le sud-est du pays, dont le potentiel est estimé à 90 000 tonnes sur 30 ans, soit environ 2500 tonnes par an. Il représente environ un quart de la consommation française du parc nucléaire.
La durée initiale est de 20 ans, dont environ 4 ans de montée en puissance, avec possibilité d’extension de 10 ans sur décision du gouvernement mongol. Orano doit injecter 500 millions d’euros (environ 514 millions de dollars au taux de change actuel) dans la phase initiale préparatoire, l’exploitation devant commencer en 2028.
Concrètement, l’exploitation sera assurée par Badrakh Energy, une société de projet ad-hoc, dans le jargon un « SPV » (pour Special Purpose Vehicule), dont Orano détiendra la majorité du capital, le groupe public mongol MonAtom détenant le reste. Ce SPV versera des royalties à l’État mongol -et des dividendes en tant qu’actionnaire minoritaire- ainsi que des impôts. Au total, plus de 50 % des bénéficies de ce projet reviendront à l’État mongol.
La concrétisation de ce projet a été facilité par l’adoption par la Mongolie, en novembre 2024, d’une Loi sur l’énergie nucléaire qui a offert un cadre légal « stabilisé » pour l’exploitation des gisements d’uranium. Elle prévoit que les revenus tirés de cette exploitation devront nourrir les finances publiques du pays.
Au passage, la France a ainsi porté à un niveau « stratégique » la relation bilatérale avec ce pays d’Asie centrale de 3,5 millions d’habitants, coincé entre deux grands voisins imposants que sont la Chine et la Russie, qui représentaient en 2021 respectivement 36,4 % et 28,6 % de ses importations (source : OMC). Le pays est en quête de diversification de ses partenaires économiques. Les exportations françaises y sont modestes – 62 millions d’euros en 2023-, mais elles progressent fortement (+87,88 %).
« En 10 ans, les échanges commerciaux entre nos pays ont quadruplé, commente Laurent Saint-Martin dans un communiqué publié le 17 janvier. Cet accord marque également le début d’une nouvelle phase de nos relations diplomatiques et économiques. La France est très fière de compter parmi les » troisièmes voisins » de la Mongolie. »
Cet accord marque aussi le plus important projet d’investissement greenfield signé entre la Mongolie et un pays de l’Union européenne, c’est « tout simplement historique », souligne également le ministre français. Il permet à la Mongolie de devenir un acteur majeur du marché mondial de l’uranium, à Orano de diversifier sa production et contribue à la souveraineté énergétique française. Plus qu’un succès industriel, c’est une promesse d’avenir pour les relations diplomatiques entre la France et la Mongolie dont nous fêtons le 60ème anniversaire. »
Au cours de sa visite, le ministre a également prévu d’aller à la rencontre de la communauté française présente dans la capitale mongole, qui compte une petite centaine de représentants.
C.G