A l’heure des grandes manœuvres en Afrique – du grand bond en avant de la Chine à l’émergence du Maroc au sud du Sahara – les invités de la CCI Paris-Ile-de-France au 20e anniversaire du Comité économique franco-japonais (CEFJ), le 24 mars (*), étaient sans doute impatients de connaître l’avis de l’ambassadeur du Japon en France sur les relations de la France et du Japon en Afrique. Masato Kitera connaît bien ce continent. En 2008, il occupait dans son pays le poste stratégique de directeur général des Affaires africaines et, à ce titre, il a conduit la quatrième Conférence internationale de Tokyo sur le développement en Afrique (Ticad IV). Cette manifestation a permis, « avant que la Banque mondiale ne s’empare du sujet», de « faire partager l’idée que, pour lutter contre la pauvreté, l’investissement est plus important que l’aide », a tenu à souligner le diplomate.
« 2008, malheureusement, c’était l’année de la crise, et c’est pourquoi les grandes entreprises nipponnes ont reporté leurs investissements » a poursuivi Masato Kitera. Mais l’an dernier, en marge de la Ticad VI à Nairobi (Kenya), une manifestation sur la coopération bilatérale en Afrique a été organisée le 26 août. Y participaient des représentants des gouvernements africains, des organismes de coopération, Agence française de développement (AFD) et Agence japonaise de coopération internationale (Jica), et d’entreprises de l’Hexagone et de l’archipel (Total, Bouygues, Vinci, Bolloré, Egis, Clemessy, Mitsubishi Corporation, Toyota Tsusho, Fujifilm).
Partenariats Toyota-CFAO et Mitsubishi-Aegis
La France n’est pas étrangère à l’ambassadeur du Japon, qui a notamment étudié en 1977 à l’École nationale d’administration (Ena). « Il y a aujourd’hui un véritable intérêt des entreprises japonaises pour l’Afrique », a ainsi lâché, dans un parfait français, Masato Kitera. Preuve en est l’engagement en Afrique de Toyota Tsusho Corporation (TTC), avec la reprise en 2012 du groupe de distribution CFAO, qui lui a permis de compléter sa couverture africaine en l’étendant au centre et à l’ouest du continent.
Depuis la Ticad VI, des liens interentreprises se sont noués, comme le montre encore la réalisation d’un projet d’eau potable entre Mitsubishi Corporation et le français Aegis à Abidjan (Côte d’Ivoire). Enfin, A l’occasion de la tournée européenne du Premier ministre japonais Shinzo Abe et de son passage à Paris, le 23 mars, le partenariat bilatéral a été évoqué. Pour le Japon, à l’instar de la Chine, dépourvu de matières premières, l’Afrique est une source stratégique d’approvisionnement. Nommé ambassadeur en Chine en novembre 2012, Masato Kitera est conscient de la compétition que se livrent les deux pays asiatiques en Afrique. L’archipel est à la recherche de nouvelles alliances. Et si possible, solides comme avec la France.
François Pargny
(*) Lire aussi au sommaire de la la LC d’aujourd’hui : France / Japon : le Comité économique franco-japonais, discret pilier d’un partenariat solide
Pour prolonger :
– Japon / UE : en tournée européenne, Shinzo Abe défend le libre-échange
– UE / Japon : Bruxelles et Tokyo poussent à la conclusion d’un accord de libre-échange en mars
– UE / Japon : un accord de principe possible début 2017 sur le dossier du libre-échange
– Habillement / Export : les secrets de longévité de Mode in France Tokyo, success story de la French touch au Japon