« Je puis vous assurer que les investisseurs internationaux déjà présents, quelque soit le secteur, à l’exception du pétrole, ont tous affiché une belle progression et un beau retour sur investissement pendant les trois années de turbulences que vient de connaître l’Égypte », a lancé Mounir Abdel Nour, ministre de l’Industrie, du commerce extérieur et des PME, à l’adresse des 60 représentants d’entreprises françaises invités par Medef International le 27 novembre.
Une réunion tenue en présence de plusieurs ministres égyptiens, mais sans le président de la République arabe Abdel Fattah al Sissi, en visite en France les 26 et 27 novembre, qui venait auparavant de participer à un petit déjeuner à huis clos dans les locaux de l’organisation patronale.
Selon Mounir Abdel Nour, « certains investisseurs ont enregistré une croissance moyenne de leurs affaires de 21 % et certains ont aussi bénéficie de retours sur investissement supérieurs à 20 % par an ». Des sociétés françaises, comme Lactalis, Danone ou Valeo, venues témoigner de leur réussite au Medef, ont ainsi continué à prospérer. L’Égypte de l’ex-maréchal Abdel Fattah al-Sissi, élu en mai dernier après avoir dirigé le coup d’État militaire de juillet 2013, promet aujourd’hui une nouvelle loi d’investissement incitative et le lancement de méga-projets qui feront l’objet d’un sommet international, à Sharm El-Sheikh, les 21 et 22 février 2015. Le gouvernement espère recueillir 80 milliards de dollars de promesses d’investissements de cette conférence, dont il a confié la préparation aux groupes Lazard et Havas.
Un guichet unique pour les licences
« La loi sur l’investissement créera un guichet unique pour les licences, les procédures, les permis nécessaires pour tous les projets. Nous irons ainsi vers plus de simplification, moins de corruption et garantirons les droits des investisseurs étrangers à l’égal de ceux des locaux et le rapatriement des dividendes sera aussi inscrit noir sur blanc », a expliqué le ministre de l’Investissement, Ashraf Salman.
Parmi les méga-projets du gouvernement, figure la transformation du port de Damiette en un centre de stockage des grains et du blé et un hub logistique pour la production de céréales. Un vaste chantier pour lequel le ministre de l’Approvisionnement et du commerce, Khalid Mohamed Hanafy (notre photo), a déjà annoncé en octobre que deux sociétés russes avaient déjà proposé de participer.
Lors de son intervention au Medef, le ministre a vanté la localisation géographique du port de Damiette, « situé à la fois sur la Méditerranée et à l’entrée du Canal de Suez, relié au Nil et à des routes maritimes internationales ». Il a précisé que le projet ne comprenait pas seulement des silos et des équipements de manutention, mais aussi « une zone pour des industries à valeur ajoutée ».
Quant au calendrier de travaux, la construction des infrastructures a débuté et devrait être achevée « dans deux ans au plus ». Ce que recherche maintenant l’Égypte, ce sont « des partenaires, des alliés » : des traders, des producteurs de grains, des opérateurs du transport maritime, des constructeurs de silos et d’équipements logistiques. En complément des infrastructures déjà prévues, le « chemin de fer de la Mer », une voie ferrée reliant la Méditerranée et la Mer Rouge, sera également construite.
Suez : un an pour construire un deuxième canal
Le projet du port de Damiette n’est pas nouveau. Cette initiative avait déjà été annoncée du temps d’Hosni Moubarak, le raïs renversé il y a trois ans lors des émeutes du printemps arabe. Le projet est ressorti des cartons où il reposait, tout comme le développement du Canal de Suez, devenu d’autant plus important que les travaux du Canal de Panama, qui doit être doublé et approfondi, menace la prééminence de l’axe Méditerranée-Mer rouge.
Le principal concurrent de Suez terminerait ses travaux vers 2016. Ce serait donc la compétition qui aurait poussé Abdel Fattah al-Sissi à réduire à un an le délai pour la réalisation des travaux, lors du lancement en grande pompe du projet, le 5 août. Le délai est très court, sans doute trop court, mais le président affirme que l’Égypte « a pris trop de retard ».
Au Medef, Mohab Mameesh, le président de l’Autorité du Canal de Suez, a détaillé ce projet géant, dont le coût global est estimé à 8,2 milliards de dollars, dont quatre milliards pour six tunnels (quatre routiers et deux ferroviaires). En accueillant des navires jusqu’à 12 000 conteneurs, contre 5 000 maximum à l’heure actuelle, Suez serait mieux placé que Panama et resterait plus compétitif, surtout si, comme le prévoient les Égyptiens, le chenal est élargi et approfondi. En fait, il s’agit de créer une nouvelle portion du canal sur 35 kilomètres, avec des liaisons entre les deux portions, le chenal dans le canal existant devant être élargi sur une longueur des 37 kilomètres.
Tous ces travaux permettraient finalement de réduire les temps de transit – de 20 heures à 11 heures – et d’attente – de 11 à trois heures – et ainsi, selon les projections à horizon 2020, de doubler le trafic à 97 bateaux par jour.
François Pargny
Pour en savoir plus :
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–Proche et Moyen-Orient : la stratégie des PME françaises et les opportunités dans le BTP
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