Une moisson de contrats a été finalisée au cours de la visite de trois jours en France –Paris, Marseille, Toulouse–, entamée le 30 juin, du Premier ministre chinois Li Keqiang, confirmant la bonne tenue des échanges franco-chinois.
Comme il y a six mois lors de sa visite en Chine (voir notre article), le Premier ministre français, Manuel Valls, qui recevait son homologue lors d’une cérémonie aux Invalides le 30 juin à Paris, a appelé à poursuivre le rééquilibrage des échanges commerciaux entre la Chine et la France, notamment via des « investissements croisés ». Il aura été entendu.
C’est au total pas moins de 53 accords qui ont en effet été paraphés lors de la visite officielle du Premier ministre chinois avec de grands gagnants tels qu’Airbus, CMA CGM, Alcatel-Lucent. Le montant cumulé des contrats et accords est estimé à environ 3,5 milliards d’euros, auxquels il faut ajouter plusieurs milliards d’euros d’accords de crédits et de financement.
Des secteurs gagnants : Aéronautique, transport maritime, télécoms
Cette visite a ainsi été l’occasion d’avancer sur les partenariats en matière d’aéronautique, domaine dans lequel les deux pays développent un partenariat industriel de grande envergure. L’avionneur Airbus a ouvert le bal avec la signature à Matignon, dès le 30 juin, avec China Aviation Supplies (CAS) Holding Company, d’une commande ferme par la Chine de 45 avion gros porteurs A330 pour un montant de 10 milliards d’euros et d’un protocole d’accord portant sur 30 avions supplémentaires pour 6 milliards d’euros. Airbus de son côté s’est engagé à investir dans une nouvelle usine dédiée à la finition des cabines d’A330 (voir plus bas).
À Marseille le lendemain, au siège du groupe de transport maritime par conteneurs CMA CGM, présent en Chine depuis 1992, où il est connu sous de nom Da Fei (« Celui qui va de l’avant »), deux partenariats économiques majeurs ont été signés. Le premier avec la banque chinoise Export-Import Bank of China (CEXIM) portant sur un protocole d’accord de financement, sous forme de prêts et ou de garanties d’un montant de 1 milliard de dollars. Ces financements seront accessibles pour les futures commandes de navires et de conteneurs passées en Chine par la compagnie française. Et le second avec le groupe China Merchants (CMHI) portant sur le projet de développements d’infrastructures initié par Pékin « One Belt, One Road » (voir notre article).
Puis, le 2 juillet, les deux Premiers ministres ont clôturé ensemble, à Toulouse, un forum d’affaires franco-chinois organisé à l’Hôtel de Région Midi-Pyrénées, où ils ont été accueillis par Martin Malvy, président de la Région Midi-Pyrénées. D’importants protocoles d’accords ont été signés lors de cette étape devant les représentants de plus de deux cents entreprises des deux pays. La boulangerie aveyronnaise Galzin a ainsi signé deux accords de partenariat avec des investisseurs chinois (voir notre article).
Manuel Valls et son homologue Li Keqiang se sont ensuite rendus au siège du consortium européen Airbus, à Colomiers, à quelques encablures de Toulouse, pour sceller l’accord de vente de 40 Airbus A330, et signer un accord portant sur l’extension du site local d’Airbus à Tianjin, avec la création d’un centre de finition pour aménager les cabines des gros porteurs A330 destinés au marché chinois.
Alcatel-Lucent a pour sa part signé des accords cadres « complets » avec les opérateurs télécoms China Mobile et China Unicom. Le groupe franco-américain –désormais dans le giron de Nokia– aidera les deux entreprises à fournir des connexions Internet fixes et mobiles plus rapides et plus abordables à travers la Chine. Selon les termes de ces accords d’un an, estimés à 4,53 milliards de yuans (soit 656 millions d’euros) pour China Mobile et 3,59 milliards de yuans (soit 520 millions d’euros) pour China Unicom, Alcatel-Lucent fournira ses technologies d’accès très haut débit fixe et mobile, le routage IP, sa solution AON (Agile Optical Networking), ses capacités de virtualisation des fonctions réseau (NFV, Network Functions Virtualization) et sa technologie de réseau défini par logiciel (SDN, Software-Defined Networking).
Des opportunités dans le tourisme, l’énergie, les cosmétiques…
Le groupe Pierre et Vacances-Center Parcs (PVCP) a pour sa part signé avec le groupe chinois HNA Tourism, spécialisé dans la gestion d’actifs touristique, un protocole d’accord « non engageant » dans la perspective d’établir un partenariat stratégique pour développer les concepts touristiques de PVCP, et principalement les concepts « all weather » inspirés de Center Parcs, en Chine et sur d’autres marchés asiatiques. Côté chinois, l’objectif stratégique de ce partenariat est de créer des destinations qui répondent à la demande croissante des populations urbaines pour le tourisme de proximité. Ensemble, les deux groupes continueront également à étudier les possibilités de collaboration pour développer des projets sur trois segments de marché potentiels en Chine : les résidences urbaines, les résidences seniors et les stations de ski.
L’énergéticien Engie a, lui, signé avec Beijing Enterprise Group (BEG) un accord pour la fourniture de gaz naturel liquéfié (GNL) à la ville de Pékin et pour développer la coopération entre les deux groupes. Dans ce cadre, Engie fournira à BEG deux cargaisons de GNL afin de couvrir les besoins en gaz naturel de Pékin en hiver, la première livraison étant prévue en novembre et la seconde en janvier prochain.
Quant au géant des cosmétiques L’Oréal, il a signé un contrat portant d’une part sur l’extension de son usine de Yichang, située dans l’ouest de la province du Hubei, et d’autre sur l’utilisation d’énergie hydraulique propres et renouvelables, telles que l’énergie hydraulique et les panneaux solaires. Depuis plusieurs années, l’usine de Yichang innove pour améliorer son empreinte énergétique et pour ainsi réduire son empreinte carbone. À la fin 2015, Yichang devrait devenir la première usine de L’Oréal en Asie-Pacifique à atteindre la neutralité carbone.
Enfin, la société Air Liquide, spécialiste des gaz destinés à l’industrie, a signé un contrat à long terme avec Shandong Fangyuan, un important producteur de cuivre. Selon les termes du contrat, Air Liquide investira environ 60 millions d’euros dans une unité de pointe de séparation des gaz de l’air (ASU) d’une capacité de 2 000 tonnes d’oxygène par jour, qui devrait être mise en service au second semestre 2017. La nouvelle unité de production sera construite à Dongying, dans la province de Shandong, par les équipes ingénierie et construction du groupe français . Elle vise à augmenter la capacité de production de cuivre de la fonderie de Dongying de 400 000 à 700 000 tonnes par an d’ici 2017.
Outre la signature de contrats, la visite de Li Keqiang a également été l’occasion de renforcer la coopération entre la France et la Chine dans l’accompagnement de l’innovation via l’outil de capital-investissement et de développer les flux entre les deux pays dans des secteurs à potentiels déjà identifiés grâce à un accord de crédits.
Fonds franco-chinois pour l’innovation et ligne de crédit à la CCI de Toulouse
La société de capital développement mid-market Cathay Capital a lancé le fonds franco-chinois Innovation avec le soutien de Bpifrance et China Development Bank (CDC). Le fonds –troisième du genre confié à Cathay Capital par la Bpi et la CDB– vise une taille de 200 à 250 millions d’euros, dont 100 à 150 millions d’euros levés auprès d’investisseurs tiers. Le fonds investira dans 12 à 18 start-ups du numérique liées à Internet (intelligence économique mobile, big data, Internet des objets, marketing digital, gaming, logiciel, cloud, réseaux sociaux, applications BtoB…), prioritairement en France et en Chine, et dans une moindre mesure aux États-Unis. Les montants investis dans chaque société du portefeuille seront compris entre 5 et 25 millions d’euros. « Ce fonds constitue une initiative importante dans la mesure où les sociétés françaises ont immédiatement besoin de se développer sur un très grand marché qui peut être offert par les États-Unis mais désormais également la Chine », a déclaré Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance.
Par ailleurs, en marge du sommet économique franco-chinois, Industrial & Commercial Bank of China Limited (ICBC) et la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Toulouse ont signé un accord de partenariat dont l’objectif est de lancer des actions économiques en vue de développer les flux entre la France et la Chine dans des secteurs à potentiels déjà identifiés. Une première en France pour une CCI.
La CCI de Toulouse devra instruire les projets d’investissement des entreprises qui souhaitent déployer leurs activités en Chine. Les projets sélectionnés seront ensuite orientés vers ICBC qui sera l’organisme de financement. De son côté, l’ICBC est notamment en charge de mettre en place une ligne de crédit d’un milliard d‘euros sur les cinq prochaines années pour accompagner les projets sélectionnés par la CCI, et devra mettre à disposition des candidats sa connaissance des outils de financement et des marchés internationaux.
Venice Affre