Visite en Chine délicate pour Sophie Primas, qui se rend à Shanghai du 3 au 6 novembre à l’occasion de la foire China International Import Expo (CIIE), dont la France est un pays à l’honneur. Dans les bagages de la ministre en charge du Commerce extérieur, de l’attractivité et des Français de l’étranger, les dossiers qui fâchent, mais aussi un message d’appel au dialogue.
[Mis à jour le 31/10/2024 à 17H20]
La France est, cette année, un des six pays invités d’honneur à la foire des importations de Shanghai, la CIIE (China International Import Expo), dans le cadre des commémorations du soixantième anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre les deux pays. Quelque 130 entreprises françaises y exposent cette année, dont 18 au sein d’un pavillon France opéré par Business France.
Seront représentés sur le pavillon France : Agence AD’OCC – Région Occitanie; Air Liquide; Andros; BB Distribe; Danone; FIT; Forvia; Galeries Lafayette; Gérard Bertrand; L’Oréal Groupe; Laboratoires Expanscience; Le Cordon Bleu; LVMH; Nexans; Nuxe; Pernod Ricard; Saint-Gobain; Sanofi; Sinodis
Pour autant, la tâche de la ministre en charge du Commerce extérieur, de l’Attractivité et des Français de l’étranger sera d’autant plus délicate qu’elle intervient dans un moment particulièrement tendu, après l’instauration effective par Bruxelles, le 30 octobre, de droits compensatoires sur les véhicules électriques chinois, vivement dénoncée par Pékin.
Car Sophie Primas est chargée de porter d’abord un message de mécontentement aux autorités chinoises, notamment son homologue Wang Wentao, à propos de l’instauration de droits anti-dumping sur le brandy européen, dont en premier lieu le cognac français qui représente 90 % des exportations européennes, décidée le 8 octobre, immédiatement après l’annonce d’un vote favorable de l’UE en faveur de droits compensatoires anti-subvention sur les véhicules électriques en provenance de Chine. Depuis, les importateurs chinois devaient déposer sous forme de caution le montant additionnel en droits de douane, allant de 30 à 40 % selon les cas.
Pour la France, cette mesure chinoise n’a aucun fondement technique, ni « justification au regard des règles de l’OMC »; au contraire elle a « un caractère politique », une pure mesure de « rétorsion » visant la France là où ça fait mal, souligne une source diplomatique française.
Sophie Primas, qui rencontrera les représentants des filières agricoles et agroalimentaires exposant sur la CIIE, dénoncera aussi, pour les mêmes motifs, les enquêtes engagées par la Chine sur les filières porcines et laitières européennes, qui visent d’autres pays européens que la France, comme l’Italie ou l’Espagne. L’UE a d’ores et déjà porté la contestation de l’enquête chinoise sur les produits laitiers devant l’OMC, elle fera de même, dès qu’elle aura reçu les éléments réunis par les autorités chinoises, pour le cognac et les produits porcins, insiste-t-on. « Quand les enquêtes sont vides, on les conteste à l’OMC » insiste cette source diplomatique.
Appel au dialogue et au maintien de bonnes relations
Tout en faisant part de ce mécontentement, Sophie Primas aura aussi pour tâche de porter un message d’appel au « dialogue », autrement dit, de tempérance. « C’est pour cela que l’on y va » souligne la source diplomatique. « On met en avant l’enjeu important que représente le maintien de bonnes relations avec la Chine » sept mois après l’importante visite d’Etat du président Xi Jinping en France et les accords commerciaux signés à cette occasion.
En l’occurrence, l’enjeu des relations bilatérales est loin d’être négligeable : les échanges commerciaux franco-chinois ont atteint 95 milliards d’euros (Md EUR) l’an dernier, dont 27 Md d’exportations et 70 Md d’importations. Avec une balance toujours très déficitaire pour la France de – 46 Md EUR. De nombreuses entreprises françaises ont des intérêts en termes commerciaux et d’investissement en Chine.
La ministre a prévu, à cet égard, de rencontrer la communauté d’affaires françaises présente à Shanghai et ouvrira un séminaire Choose France destiné aux investisseurs chinois, auquel une soixantaine de participants doivent participer. L’Hexagone aimerait attirer davantage d’investissements industriels chinois dans les filières porteuses de la transition énergétique, à l’instar du fabricant sino-japonais Envision AESC, qui investit actuellement 2 Md EUR dans une giga-factory dans les Hauts-de-France, en partenariat avec le groupe Renault. Pas sûr que le contexte favorise des annonces…
Christine Gilguy