La deuxième session du Comité intergouvernemental de haut niveau franco-algérien a mobilisé de fortes délégations de ministres de part et d’autres, sous la conduite des deux chefs de gouvernement Abdelmalek Sellal et Manuel Valls, le 4 décembre dernier. Si elle a donné lieu à de nombreux commentaires généraux dans la presse algérienne et françaises, peu de détails ont été donnés sur les quelque 19 accords de coopération paraphés à cette occasion par les deux gouvernements ou sous l’égide de ceux-ci.
Or, une majorité de ces accords concerne l’industrie, la formation professionnelle, mais aussi la normalisation, la plupart en lien avec la volonté, côté algérien, de moderniser et diversifier l’industrie locale en bénéficiant des savoir-faire tricolores. Ils ne manquent donc pas d’intérêt. D’autant plus que beaucoup sont l’aboutissement concret des groupes de travail montés dans l’ombre et suivis par la Mission de coopération industrielle et technologique franco-algérienne créée au printemps 2013 par les deux pays pour activer les projets*.
Quelques semaines après l’inauguration à Oran de la première usine automobile de Renault en Algérie, projet emblématique qui a confirmé la « lune de miel » que traversent les relations bilatérales entre les deux pays, plusieurs accords concernent ainsi des sociétés françaises et algériennes et auront des retombées industrielles et commerciales, en particulier dans les secteurs du logement, du ferroviaires et de l’agriculture :
– Dans l’habitat : protocole d’accord entre la société française IBSE International -spécialisée dans l’ingénierie de programmes de logements – et le ministère algérien de de l’Habitat, de l’urbanisme et de la ville sur des garanties d’achat de la production d’IBSE (préfabriqués); IBSE est en effet porteuse d’un projet d’industrialisation de la production de logements en Algérie.
– Dans le ferroviaire : un protocole d’accord pour l’extension de l’activité de Cital SPA -joint-venture (JV) créée en 2011 pour l’assemblage et la maintenance des tramway- à l’ingénierie, la fabrication et la maintenance d’autorails entre, la Société nationale des transports ferroviaires (SNTF) algérienne, Cital SPA, Ferrovial (Entreprise nationale de construction de matériels et équipements ferroviaires), Entreprise du métro d’Alger (EMA), Alstom Transports et Alstom/Algérie; création d’une JV (49-51%) dans le domaine des études et engineering pour la réalisation des infrastructures et matériels ferroviaires, entre Sitirail (filiale de SNTF) et Systra/France.
–Dans l’agriculture et l’élevage : protocole d’accord pour la constitution d’une société mixte en matière de semences céréalières et fourragères entre le groupe coopératif français Axéréal et l’Office algérien interprofessionnel des céréales; convention cadre de partenariat économique et d’appui technique à la structuration et au développement de la filière bovine algérienne entre SGP Proda et Onilev pour la partie algérienne et Interbev, association interprofessionnelle du bétail et des viandes, pour la partie française.
D’autres accords sont le résultat des travaux menés par les multiples groupes de travail formés à la suite de la relance de la coopération franco-algérienne, en 2012, dans le cadre du Comité intergouvernemental de haut niveau, et sont sensés répondre aux besoins de l’Algérie en matière de formation technique et de normalisation, notamment pour l’industrie. Citons notamment : la convention de partenariat pour la création d’un centre d’excellence algéro-français de formation aux métiers de l’énergie et de l’électricité; une convention de coopération professionnelle entre le ministère de l’Industrie et des mines algérien et l’Institut d’économie industrielle (IDEI) de Toulouse concernant l’accompagnement pédagogique au développement de l’Ecole nationale d’économie industrielle (ENEI) algérienne.
Enfin, toute une série d’accords de coopération dans les domaines de la formations professionnelle, de la normalisation et de la métrologie et de la coopération technique a été signé sous l’égide des deux ministres français et algérien Emmanuel Macron et Abdessalam Bouchouareb, respectivement chargés de l’Economie, de l’industrie et du numérique et de l’Industrie et des mines, lors de leur entretien bilatéral du 4 décembre. Voici les principaux :
– Ecoles : convention entre le ministère algérien de l’Industrie et des mines (MIM), l’Ecole française des mines et l’Association pour la recherche et le développement des méthodes et processus industriels (Armines) portant sur la création et la réalisation d’une « Ecole des Métiers de l’Industrie » (signée par le fonds alégrien SGP Equipag et Mines ParisTech); convention entre le MIM et l’Ecole d’économie de Toulouse sur la création d’une « Ecole nationale d’économie industrielle »(SGP Equipag et Haut responsable des partenariats technologiques et industriels, pour le MIM et Université Toulouse I Capitole); convention de coopération professionnelle entre le MIM et l’Agence des villes et territoires méditerranéens durables (Avitem) pour la réalisation, la mise en activité et le développement d’un Institut supérieur de formation en logistique (signataires SGP Equipag, MIM, Avitem).
– Métrologie/normalisation : convention sur la normalisation entre l’Institut algérien de normalisation (Ianor) et l’Association Française de Normalisation (Afnor) (signataires, les deux organismes); convention de coopération dans le domaine de la métrologue pour un accompagnement intégré à la réalisation et à la mise en service d’un « laboratoire national de référence en métrologue » entre le MIM le Laboratoire national de métrologie et d’essais français (LNE) (signataires les deux organismes).
– Coopérations techniques diverses : accord de coopération entre Bbifrance et le MIM (Fonds de garantie des crédits aux PME – FGAR/Direction générale de la petite et moyenne entreprise – DGPME); protocole d’accord entre le MIM et le Centre technique de la conservation des produits agricoles (CTCPA); protocole d’accord entre le MIM et le Centre technique des industries mécaniques (Cetim); protocole d’accord de partenariat entre Sanei Ascenseurs et la SGP Cabeleq sur la création d’une société commune.
Le Premier ministre algérien, cité par elwatan.com, a cité l’ouverture de l’usine Renault comme «le bon exemple de partenariat gagnant-gagnant que nous ambitionnons de démultiplier avec les opérateurs français dans d’autres domaines d’activité, tels que l’agriculture, l’énergie et le tourisme». L’avalanche des projets de coopération signés à Paris semble confirmer cette orientation.
Christine Gilguy
*Lire notamment, dans la Lettre confidentielle n° 103 du 05/06/2014 : France-Algérie : les discrètes avancées de la Mission Levet
**Lire : France-Algérie : l’usine de Renault ou le pari de la création d’une filière automobile