» Brillant, très brillant, provocateur… « , » trop brillant, trop provocateur « … Ces quelques commentaires recueillis par Le Moci après la conférence plénière du 3e Forum Afrique Moci/Cian du 31 janvier, montrent à quel point les propos de Lionel Zinsou n’ont pas laissé indifférent.
Il est vrai que le P-dg du fonds d’investissement PAI Partners (ex Paribas Affaires Industrielles) et co-auteur au sein de la mission Védrine du rapport sur » un nouveau partenariat pour l’avenir « , a ironisé avec la verve et l’humour qu’on lui connaît sur la fiche Bénin du rapport 2014 du Cian (Conseil français des investisseurs africains),édité par Le Moci.
» On y lit que le coton et le port ne vont pas très bien, mais on s’en fiche « , a-t-il lancé devant les 750 professionnels s’étant déplacés à la Chambre de Commerce et d’Industrie Paris Ile-de-France pour assister au Forum. » La Côte d’Ivoire, ce n’est pas le cacao, le Sénégal, ce n’est pas l’arachide, l’Angola, ce n’est pas que le pétrole « , a-t-il aussi martelé, faisant ainsi allusion aux produits d’exportation. Pour lui, ce qui compte pour l’Afrique et la France, c’est » la croissance endogène » et, d’ailleurs, » 75 % du produit intérieur brut africain est déjà endogène « . Ce qu’avait fait mine d’oublier Lionel Zinsou, c’est que les 120 adhérents du CIAN, représentant 75 % du volume d’affaires généré vers l’Afrique par la France, » ne se fichent pas » de l’état du port de Cotonou en l’occurrence pour leurs activités. D’où ces remarques amères dans la salle.
Lionel Zinsou a également mis en doute l’importance de la baisse des parts de marché de la France en Afrique et sa portée réelle face à des concurrents plus dynamiques, après que l’expert en analyse stratégique Thierry Apoteker ait présenté un travail très approfondi sur le potentiel d’affaires en Afrique, la concurrence et les risques. En l’occurrence, le fondateur du cabinet TAC (Thierry Apoteker Consulting) ayant expliqué notamment – avec une cartographie présentée en exclusivité lors du Forum – que » la France perd de façon massive des parts de marché en Afrique « , Lionel Zinsou a exhorté à » cesser de flageller la France « .
Selon lui, « les parts de marché de la Chine en Afrique, des États-Unis ou de l’Amérique du Nord, c’est de l’invariant « . » C’est une idée sans intérêt « , a-t-il poursuivi, faisant allusion à la baisse relative des exportations françaises. Et de rappeler que la France est avec le Royaume-Uni un des premiers investisseurs sur le continent. » Qui a, par exemple, bâti la filière cotonnière au Burkina Faso, c’est l’entreprise Dagris, ex CFDT. Et si aujourd’hui la France perd du terrain, c’est qu’elle n’a plus de filatures chez elle – elles sont en Chine – et donc, c’est la division du travail qui change « . Et de conclure sur le sujet que » la France a changé « . Par exemple, elle construit des éléments d’avions (aérostructures) en Tunisie, ce qui lui permet de conserver sa compétitivité.
Le doute porté par Lionel Zinsou sur la diminution sensible des parts de marché de la France lui a valu une réponse courte mais ferme de Thierry Apoteker. » Où que ce soit, la France n’a jamais perdu aussi vite et dans une telle mesure des parts de marché « , a ainsi précisé le patron de TAC. De quoi poser le cadre d’un forum qui portait, justement, sur la question des stratégies que peuvent adopter les entreprises tricolores pour accélérer leurs développements sur le continent africain.
François Pargny