Simple reflet de la crise en France et dans le monde ou tendance à se désengager d’un rendez-vous généraliste annuel ? Toujours est-il que la participation de l’Hexagone à la Foire de Hanovre (Hannover Messe), la plus grande plateforme industrielle de la planète (24 halls, 6 000 exposants et 200 000 visiteurs d’une centaine de pays), diminue d’année en année.
Certes, le fait que de nombreux salons spécialisés se déroulent les années paires explique le faible score de 2014, soit 90 exposants français. Mais, lors de la présentation de l’édition 2015 (13-17 avril), le 14 janvier à Paris, le directeur de la Hannover Messe à la Deutsche Messe AG, Marc Siemering, tablait cette année sur un nombre à peine supérieur, 100, alors que ce chiffre était de 140 en 2013.
La sous-traitance constitue traditionnellement le plus fort contingent de la participation tricolore. «Toutefois, nous avons perdu dans ce domaine. Et gagné un peu dans l’énergie et l’industrie du futur 4.0», précise Suzanne Gatzemeier, directrice générale de Global Fairs, représentant en France de la Deutsche Messe AG. Des propos confirmés au Moci par Claude Ménard, responsable du Pavillon France chez Business France (ex-Ubifrance), selon laquelle « une quarantaine de sociétés devraient exposer collectivement, alors que l’objectif initial était de 55. Et ce, malgré le sursaut des fondeurs ». L’impact de la crise est indéniable, mais, paradoxalement, ce sont pour certaines PME l’afflux de commandes à gérer qui les incite à renoncer.
Les entreprises font leurs comptes
En période de crise, les entreprises font leurs comptes. Or, depuis déjà plusieurs années, le coût global à la Foire de Hanovre augmente. Les prix des services annexes (promotion…) pratiqués par la Deutsche Messe AG y sont plus élevés. Et, économie oblige, Ubifrance et les Régions françaises n’apportent plus le même soutien financier que par le passé. Généralement, les Conseils régionaux se retirent après avoir subventionné leurs entreprises pendant trois années successives, ce qui serait le cas pour la Foire de Hanovre des régions du nord de l’Hexagone, mais aussi de l’Alsace, des Pays de la Loire et de Rhône-Alpes.
Cette évolution négative ne fait évidemment qu’encourager les PME à opter pour des salons plus pointus dans la construction ou le ferroviaire (Innotrans…). Compte tenu de sa taille, la foire industrielle à Hanovre nécessite, en outre, une forte préparation, ce à quoi les responsables d’entreprises ne s’astreignent pas toujours. Pour échapper à la « noyade », il faut être professionnel « jusqu’au bout des ongles » : disposer de cartes de visite, préparer ses rendez-vous, etc. Et bien identifier ses cibles.
« Si nous venons tous les ans à la Foire de Hanovre, ce n’est pas pour le marché allemand, mais parce que nous y disposons de la première vitrine mondiale pour nos produits », se félicite ainsi Virginie Guyot (notre photo), responsable Communication de l’offre chez Socomec, une PMI de 3 200 personnes au chiffre d’affaires de 430 millions d’euros en 2013, dont le cœur de métier est l’alimentation électrique sans interruption.
Cette année, l’entreprise française, qui compte 20 filiales dans le monde, va présenter deux innovations : un produit de mesure de l’énergie 100 % Made in France, ayant nécessité six ans de recherche, facile à installer et offrant une plus grande efficacité pour le comptage, la mesure et la surveillance de la qualité de l’énergie électrique ; et un onduleur modulaire Made in Europe (France et Italie) garantissant la continuité absolue des activités en cas de défaillance du réseau électrique.
Il faut anticiper les contraintes liées à la logistique
Il est vrai aussi que Socomec est implantée en Alsace, à Schiltigheim, et que du Bas-Rhin quelque 7 heures de trajet par la route sont suffisants pour rejoindre Hanovre. Or, les autres exposants français doivent souvent, compte tenu de la distance, choisir le transport aérien. « Seul Air France offre un vol direct et, comme les entreprises françaises s’inscrivent tard à la foire, c’est plus cher et les plages d’horaires sont plus restreintes », observe Suzanne Gatzemeier. Enfin, dernier inconvénient, souligne Virginie Guyot, « comme l’infrastructure hôtelière est insuffisante, les exposants et les visiteurs étrangers doivent trouver une chambre d’hôte ». Et parfois, convient-elle, « c’est sportif ».
En ce qui concerne la fréquentation, la représentation française devrait, en revanche, être en hausse. A Paris, Marc Siemering a annoncé à s’attendre à un chiffre de 2 000 visiteurs de l’Hexagone cette année, contre 1 600 l’année dernière et 1 400 l’édition précédente. Selon lui, « c’est bien la preuve que la profession en France a prévu d’investir plus dans les technologies indispensables aux innovations ».
Cette année, le thème phare de la foire industrielle sera l’industrie 4.0 (télécharger ici Thème phare). « Rien qu’en Allemagne, nous avons prévu d’investir 40 milliards d’euros dans des applications », indique le directeur de Hannover Messe. Au moment où « la numérisation commence à transformer l’industrie manufacturière, observe-t-il, « l’efficacité » est devenue une priorité en Europe. De leur côté, les États-Unis se réindustrialisent et la Chine investit dans des technologies d’automatisation. C’est un autre pays émergent, membre des Bric (Brésil, Russie, Inde, Chine), l’Inde, qui sera cette année l’invité d’honneur de la Foire de Hanovre (télécharger ici Inde). « Je me suis rendu trois fois dans ce pays en 2014 et j’y ai constaté une véritable volonté de modernisation », affirme Marc Siemering. La transformation de l’économie va ainsi toucher autant les infrastructures que les usines. Une opportunité pour les professionnels étrangers au moment où l’Inde s’ouvre aux investisseurs internationaux.
François Pargny
Pour en savoir plus : consulter le Plan de la Foire en fichier pdf ci-dessous