Les financements de Bpifrance sur l’export ont atteint 32 milliards d’euros l’an passé, en hausse de presque 60 %, selon son dernier bilan. Une performance gonflée par de grands contrats et qui cache une année en demie teinte pour les PME et ETI, qu’a fortement déploré Nicolas Dufourcq, son directeur général.
« L’export n’est pas le domaine dans lequel nous sommes les plus forts et les mieux outillés, a regretté Nicolas Dufourcq lors de la présentation des résultats pour l’année 2022 de la banque publique. Les Chinois et les Allemands sont partout et les Français ne sont pas là. Il faut remettre les PME françaises sur le chemin de l’international ! » Le directeur général de Bpifrance venait pourtant d’annoncer une augmentation spectaculaire de 58 % des activités de la banque à l’international, à 32 milliards d’euros (32 Md EUR), dont 17 Md EUR concernant le secteur militaire.
Cette hausse est en grande partie due à la performance de l’assurance-crédit de moyen et long terme, qui s’est envolée de 74 % à 30,2 Mds EUR grâce à de grands contrats dans les secteurs de la défense, de l’aéronautique, de la croisière et du ferroviaire.
Stabilité de l’assurance-prospection
et fort recul du crédit export
L’assurance-prospection est restée stable (285 millions d’euros, – 1 %) et a permis à 1501 entreprises de partir défricher de nouveaux marchés. « Pour améliorer la situation du commerce extérieur français, il faudrait que nous en accompagnions dix fois plus, a estimé le dirigeant. C’est une question de puissance du moteur. Avec des budgets supplémentaires nous pourrions en accompagner beaucoup plus car la demande est là. Il s’agit de produits administrés et subventionnels qui gagneraient à être simplifiés. »
Signe des difficultés que rencontrent les PME à l’international, entre la crise sanitaire et la guerre en Ukraine, le crédit export a quant à lui reculé de 72 %, à 111 millions d’euros (M EUR), pour 13 entreprises accompagnées, contre 27 l’année précédente.
Les garanties de cautions et de préfinancements ainsi que l’assurance change ont également marqué le pas, avec des baisses respectives de 33 % et 31 %. Le nombre d’entreprises accompagnées conjointement par Bpifrance et Business France (3876 en 2022) est en revanche en progression de 28 %.
Une reprise attendue en 2023
Pour Nicolas Dufourcq, 2022 aura été une année de transition et les opérations de crédit export devrait repartir à la hausse cette année : « Il y a un effet cut off mais l’embarqué de cette année s’élève à 500 millions d’euros ».
La banque publique, dont 93 % des clients export sont des PME, table notamment sur l’essor des infrastructures à caractère social sur le continent africain, région qui truste à elle seule les deux tiers des dossiers de crédits export. En 2021, un accélérateur dédié aux marchés africains a été lancé et la banque espère le développer pour accompagner une centaine de PME et ETI par an.
Reste que, au-delà des budgets alloués pour financer l’internationalisation des PME, se pose la question de l’état d’esprit des entreprises françaises. « Il faut oser le dire, les exportateurs doivent bouger et se bouger, a ainsi tempêté le directeur de la banque publique. J’ai regardé attentivement le top 500 des champions de la croissance que Statista vient de dresser pour les Echos : seules trois ont un potentiel à l’export ! En France, la PME industrielle qui réalise 80 % de son chiffre d’affaires à l’export, on ne la voit jamais à la télévision. C’est un combat culturel, il faut trouver le moyen de re-héroïser les exportateurs et notre rapport au monde. »
Sophie Creusillet