L’activité international de Bpifrance a été stable en 2024 selon les résultats publiés par la banque publique le 13 février. Les principales tendances annoncées lors de Bercy France Export sont confirmées, avec le décollage de la Garantie de projet stratégique et le recentrage de l’assurance prospection. Les objectifs pour les quatre prochaines années restent ambitieux, malgré un contexte budgétaire contraint.
« Je suis moins inquiet qu’il y a trois semaines ». C’est ainsi que Nicolas Dufourcq a répondu au journaliste qui lui demandait quel impact aurait sur le programme France 2030, fer de lance de la stratégie de réindustrialisation (doté d’un volet export depuis fin 2022), la coupe de 2,5 milliards d’euros (Md EUR) prévu dans le budget 2025, dans le cadre des efforts de réduction du déficit. Le directeur général de Bpifrance a précisé que des réflexions étaient en cours au niveau du Secrétariat général pour l’investissement (SGPI) pour « refixer les priorités » et définir une « nouvelle programmation ».
L’an dernier, entre les appels à projets et le financement de projet, Bpifrance a contribué à déployer près de 5,2 Md EUR de financement dans le cadre de France 2030, en baisse de -44,7 % sur 2023 en raison, notamment, du flottement au niveau des fonds européens lié aux élections européennes et au changement de Commission. Cette année, des secteurs comme l’hydrogène – où il y a eu « beaucoup de déception » -, les micro-lanceurs de satellites – « peut-on soutenir 12 startups de micro-lanceurs ? » -ou encore les SMR dans le nucléaire – en attente de « nouvelles priorités » – pourraient ainsi voir leurs ambitions revues à la baisse. Idem pour les gigafactories. Tous les appels à projets prévus pour 2024 devraient toutefois être mis en place, a assuré Nicolas Dufourcq, certes avec quelques mois de retard.
L’évolution de France 2030 n’est pas anodine pour les entreprises innovantes se déployant à l’international, car l’orientation suivie par Bpifrance est à un alignement des priorités export et des priorités de la réindustrialisation, d’autant plus que le redressement du déficit commercial (-81 Md EUR en 2024) est étroitement lié aux performances de l’industrie. « Tout est lié à la réindustrialisation. Le décrochage a eu lieu entre 2003 et 2007 et cela va prendre beaucoup de temps (…) Il nous faudra 10 ans pour redresser la barre » déclarait Nicolas Dufourcq l’an dernier, lors de la présentation des résultats 2023.
Le bilan d’activité de Bpifrance pour 2023
En 2023, Bpifrance a injecté 60 milliards d’euros (Md EUR) dans l’économie française entre les crédits, les garanties et les investissements en fonds propres dans les entreprises. Elle a dégagé un résultat net de 896 Md EUR. Voici la répartition par grands pôles d’activité :
- Financement : 19,5 Md EUR, en hausse de 3 % sur 2023 (dont 9,4 Md en prêts moyen et long terme et 9,2 Md en crédits court terme), 6971 entreprises bénéficiaires.
- Garantie (de prêts bancaires) : 9 Md EUR, soit + 4 % sur 2023, 65 752 entreprises bénéficiaires.
- Financement de l’innovation : 5,2 Md EUR, en recul de 45 % en raison de l’absence de fonds européens, 5 503 entreprises bénéficiaires.
- Investissements : 4,1 Md EUR, soit + 3 % sur 2023, 393 entreprises bénéficiaires
(Cessions/Distribution : 2,388 Md, 400 entreprises).- International : 22 Md EUR (dont 18,956 pour l’assurance-crédit), stable.
C’est cette vision qui conduit actuellement Bpifrance Assurance Export (BAE), filiale de Bpifrance qui gère les financements et garanties publiques, à recentrer l’assurance prospection, une aide à l’export phare pour les PME : le nombre de bénéficiaires est en baisse, avec 1039 entreprises l’an dernier, contre 1244 en 2023, mais les montants accordés sont en hausse, 246 M EUR l’an dernier, + 16 % par rapport à 2023. Autrement dit, les budgets de prospection export par entreprise augmentent substantiellement. « L’assurance prospection, nous la fléchons vers l’industrie », a confirmé Nicolas Dufourcq, avec la conviction que les entreprises s’ancreront à l’export plus durablement.
Pour les autres instruments, les chiffres livrés le 13 février confirment ceux qui avaient été dévoilés le 4 février lors de Bercy France export.
Des évolutions variables selon les instruments
L’assurance-crédit export, outil phare pour les grands contrats, a été stable avec 18,956 Md euros (et 119 entreprises bénéficiaires, 12 de plus qu’en 2023). La Garantie de projet stratégique (GPS), qui a été étendue aux projets sur le sol national mais est gérée par les mêmes équipes de BAE, a soutenu 4 projets pour un montant total de 192 M EUR, après une très forte activité en 2023 pour de très gros projets (4 projets pour 2,056 Md EUR).
Les garanties de cautions et préfinancements ont pour leur part progressé de 33 %, à 1,4 Md EUR, bénéficiant à 401 entreprises (393 en 2023), de même que l’assurance change, de + 7 % à 828 M EUR (76 entreprises, 6 de plus qu’en 2023).
Les autres instruments sont en revanche en recul : – 18 % pour les crédits export à 270 M EUR (11 entreprises), – 13 % pour le prêt croissance international à 256 M EUR (136 entreprises) et – 1 % pour la garantie de projet international à 111 M EUR (170 entreprises).
Alors que Bpifrance a baissé la voilure en matière de missions (22 en 2024 pour 180 entreprises, contre 26 en 2023 pour 415 entreprises), les prestations d’accompagnement à l’international avec Business France (conseil, etc.) ont en revanche progressé de 6 %, totalisant 4244 alors que les actions d’accompagnement à l’international.
Pour les quatre prochaine années (2025-2029), parmi les objectifs que se fixe la banque publique, elle compte déployer 2 Md EUR de crédit export (crédit acheteurs ou rachat de crédit fournisseur), ce qui reste ambitieux.
Christine Gilguy