A rebours de nombreux secteurs, la filière cuir se porte bien, en particulier sur les marchés étrangers. La France devrait conserver cette année son rang de 4e exportateur mondial et sa balance commerciale enregistrer un excédent de 5,8 milliards d’euros, selon les estimations publiées aujourd’hui 28 novembre par Alliance France Cuir.
Matières premières brutes ou tannées, articles de maroquinerie, chaussures… Le cuir français continue d’avoir la cote à l’international. Après une période de forte hausse en sortie de Covid, les échanges transfrontaliers se sont stabilisés. Sur les 9 premiers mois de l’année, tous segments confondus, les exportations ont atteint 19,2 milliards d’euros (Md EUR) et les importations 14 Md EUR. L’international représente une part non négligeable de ce secteur réalisant un chiffre d’affaires total de 25 Md EUR.
Dans le détail, les exportations de cuirs et peaux bruts ont globalement fléchi de 4 % au cours des 8 premiers mois de l’année. Elles progressent néanmoins de 3 % à destination de l’Italie et de 8 % vers la Chine. En revanche elles s’effondrent auprès des autres clients habituels : – 56 % en Turquie, – 47 % en Espagne et – 7 % en Belgique. Cette tendance s’explique, en partie, par une réduction des abattages, observable depuis plusieurs années. Cette faiblesse de la demande internationale pèse sur le chiffre d’affaires de la tannerie mégisserie dont le chiffre d’affaires recule de 4 %.
Légère baisse des exportations de chaussures
En revanche, les exportations de cuirs finis marchent bien en Italie (+ 19 %) et vers le Portugal (+ 12 %), deux pays qui se sont fait une spécialité de la production de chaussures. De son côté, la chaussure française a vu ses exportations reculer de 3 %. A 91 euros, les prix à l’export ont reculé de 1 %, une moyenne qui cache des situations très variables : ils sont stables vers l’Italie, en hausse de 11 % vers les Etats-Unis et en recul de 17 % en Chine.
Si les ventes aux clients traditionnels des souliers français sont en recul (- 3 % en Italie et aux Etats-Unis, – 7 % en Allemagne), celles à destination de la Chine ont bondi de 60 % en valeur. Une hausse qui s’explique par la baisse de 17 % du prix moyen en douanes (213 EUR, contre 258 EUR en 2022. Malgré une baisse globale de la consommation, la filière estime qu’il y a encore une marge de progression en Chine pour la chaussure de luxe. A titre de comparaison : le nombre de paire de chaussures vendues à la Chine a été multiplié par deux mais une paire de chaussures sur deux importée par la France provient de Chine et affiche un prix moyen de 7 euros, en baisse de 12 % par rapport à 2023.
Les ventes internationales de la maroquinerie ralentissent
Enfin, la maroquinerie, segment le plus dépendant du luxe, qui a montré d’importants signes de faiblesse en 2024, devrait réaliser cette année 13 Mds EUR à l’export, en hausse de 2 % seulement, alors qu’elles avaient décollé de 5 % en 2023. Si les chaussures en cuir ont fait florès sur le marché chinois, les ventes de sacs et autres articles de maroquinerie ont fléchi de 4 %. Alliance France Cuir estime que « la situation dans ce pays est particulièrement préoccupante ».
Non seulement la consommation est en berne, mais la fédération professionnelle pointe également dans son rapport annuel la politique du gouvernement chinois contre la corruption qui « cible « l ’hédonisme des élites occidentales » – certaines entreprises chinoises allant jusqu’à interdire à leurs salariés de porter des articles de marques de luxe européennes ».
En Europe, les exportations vers l’Italie, l’Allemagne et le Royaume-Uni ont reculé respectivement de 6 %, 9 % et 4 %. Quant au marché américain, les ventes restent stables, mais la consommation de produits de luxe est atone. « Les Américains restent prudents ne sachant pas comment le pays va évoluer dans les prochaines années », estime Alliance France Cuir. Pour 2025 cette dernière s’inquiète de l’évolution du marché chinois, premier client de la maroquinerie française. Entre la baisse de la consommation domestique et la guerre commerciale avec les Etats-Unis qui s’annonce particulièrement dure et pourrait avoir des conséquences sur les exportateurs européens, 2025 sera en tout cas unen année décisive pour la filière cuir hexagonale.
Sophie Creusillet