L’origine est une notion tout aussi importante que l’espèce tarifaire d’une marchandise. Sa détermination est devenue complexe. Explications.
I/ Définition et principes
Les marchandises sont considérées comme originaires d’un pays lorsqu’elles y sont produites ou qu’elles en ont acquis l’origine par suite de transformation.
L’indication d’origine d’un produit est devenue impérative depuis le 1er janvier 1994 du fait des accords du Gatt et de la mise en place de l’EEE (Espace économique européen).
Le caractère originaire est fonction des matières premières, de la transformation, de la valeur et des critères spécifiques en fonction des protocoles d’accords de référence.
Interêt de la notion d’origine
> À l’importation, l’origine permet de définir, en fonction de l’espèce tarifaire et de la valeur, l’ensemble des conditions d’importation comme la perception des droits de douane, les taxes diverses, le taux de la TVA, l’application éventuelle de mesures de politique commerciale telles que quotas ou droits antidumping et l’établissement des statistiques du commerce extérieur. Dans le cadre des accords bilatéraux, régionaux, système de préférences généralisées (SPG) et autonomes, elle définit les droits préférentiels et les conditions d’importation des marchandises.
> À l’exportation, l’origine sera déterminée par la délivrance des certificats d’origine. Elle sera également prise en considération en matière de marquage d’origine.
Le dépôt d’une Déclaration préalable d’origine est une condition essentielle, surtout en système de préauthentification ou de visa anticipé.
II/ Critères de détermination de l’origine
> Les critères sont les suivants : l’origine du droit commun/non préférentielle, l’origine préférentielle en liaison avec les accords bilatéraux, régionaux et autonomes, marquage de l’origine, protection de l’origine.
> Les règles actuelles imposent : 40 % maximum de matières tierces dans le produit fini et même moins pour certaines positions tarifaires ; changement de position tarifaire, valeur (plus-value) ; exclusion de matières de certaines positions ou utilisation admise à condition que la valeur de celles-ci n’excède pas 10 % du prix départ usine du produit fini.
III/ Le responsable de l’origine en douane
En application du code des douanes communautaire (CDC), l’importateur et/ou l’exportateur sont totalement responsables face aux administrations douanières.
En cas de contestation de l’origine réelle par la douane à l’arrivée dans le pays d’importation, les autorités douanières peuvent saisir les autorités du pays d’émission du certificat d’origine pour obtenir une confirmation de la validation de celui-ci.
En cas de non-réponse ou d’une invalidation, la douane procède, selon les cas, au recouvrement ou au remboursement des droits compromis par la procédure de l’avis de mise en recouvrement (AMR). L’opérateur a le choix entre le paiement direct ou la constitution d’une garantie en cas de recours auprès de la Commission de conciliation et d’expertise douanière (CCED) ou de saisine auprès des tribunaux. Par décision de l’Organisation mondiale des douanes (OMD), il n’y a plus de pénalités et de poursuites pénales (sauf cas d’infractions avérées) mais liquidation du contentieux au niveau des droits de douane et des taxes.
IV/ Les règles d’origine applicables par la CE
Il y a deux définitions complémentaires de la notion d’origine.
Définition n° 1 : règles d’origine non préferentielle ou de droit commun
> Champs d’application : la CE applique unilatéralement une définition de l’origine avec les pays comme les États-Unis (EUAN), le Japon, l’Australie, etc.
> Intérêt : à l’importation, une marchandise sera soumise de fait au Tarif extérieur commun (TEC) quelle que soit son origine ; en revanche celle-ci sera prépondérante pour les mesures de contrôle du commerce extérieur.
> Contraintes : aucune, car aucun document justificatif n’est exigé, si ce n’est pour les produits textiles (certificat d’origine Textile).
> Modalités d’application :
– le produit est entièrement obtenu (voir définition) ;
– le produit est obtenu dans 2 ou plusieurs pays : l’ouvraison substantielle (voir définition ci-après).
Définition n° 2 : règles d’origine préferentielle
> Champs d’application : la CE a retenu des définitions qui s’appliqueront soit par voie d’accord établissant ainsi des avantages mutuels, soit unilatéralement pour les pays les moins favorisés (système des préférences généralisées, SPG) ; dans les deux cas, on ne retiendra qu’une liste limitative de produits.
> Intérêt : selon l’origine de la marchandise, les droits de douane seront plus ou moins réduits.
> Contraintes : un justificatif d’origine devra être impérativement présenté ; la règle du transport direct devra être respectée (voir plus bas) ; clause de non-drawback …
> Modalités d’application : le produit est entièrement obtenu (voir définition ci-dessous) ; le produit est obtenu dans deux ou plusieurs pays : l’ouvraison suffisante (voir définition ci-dessous) ; règles de cumul (voir plus loin).
V/ Les aspects qui peuvent influencer l’origine
> Les accords internationaux
L’UE compte près de 40 accords bilatéraux auxquels s’ajoute l’accord SPG cité plus haut. À titre d’exemple : ACPTOM (Afrique-Caraïbes-Pacifiques-Pays et territoires d’outre-mer), EEE/AELE (Espace économique européen/Association économique de libre-échange), Euromed (Accord global avec les pays méditerranéens), accord de libre-échange (Chili, Mexique.), etc.
> Règle du transport direct
Chaque système d’échanges préférentiels exige que le transport des produits originaires du pays partenaire qui sont exportés vers la Communauté au bénéfice du régime préférentiel s’effectue directement. Toutefois, le transport peut emprunter des territoires autres pour autant que la traversée de ces derniers soit justifiée par des raisons géographiques, de logistique et que les produits soient restés sous la surveillance des autorités douanières du pays de transit.
> Ouvraison suffisante
Une transformation sera jugée « suffisante » si elle a pour effet de classer le produit fini sous une position tarifaire différente à celle afférente à chacun des produits tiers. Toutefois, ce principe connaît des exceptions qui sont reprises dans une annexe au protocole « origine inclus dans ces accords.
> Règle de cumul
Dans le but de promouvoir l’intégration des économies des pays partenaires ainsi que de permettre à un groupement de pays de dominer complètement un processus de fabrication, ont été introduites des règles de cumul : cumul bilatéral ; cumul multilatéral partiel ; cumul multilatéral total ; cumul diagonal (paneuropéen).
VI/ Certification de l’origine
Elle implique diverses contraintes :
> l’origine d’une marchandise doit figurer sur la facture ;
> l’origine doit être indiquée sur les emballages (dérogations pour certains secteurs comme les produits agricoles) ;
> l’origine peut être justifiée soit par la production de certifications officielles (EUR1, EUR2, ATR1, certificat Form « A », T2L, T2LF, etc.), soit par une déclaration du fournisseur à long terme pour les produits ayant le caractère originaire à titre préférentiel (EUR1 par exemple) dans le cadre des accords bilatéraux avec l’UE, soit par la mention sur facture.
Ce dernier système, qui se généralise de plus en plus, permet de remplacer l’imprimé officiel (EUR1 par exemple) par une mention spéciale sur les factures.
Important
Ne pas confondre :
> statut d’une marchandise (droit de distribution ou de circulation) ;
> origine d’une marchandise (lieu d’obtention ou de fabrication) ;
> provenance/destination (notion logistique liée au lieu de rupture de charge des marchandises).
Une marchandise qui quitte le territoire de l’Union européenne (UE) perd son statut communautaire et une marchandise mise en libre pratique et mise à la consommation à l’importation dans l’UE acquiert le statut communautaire, donc le droit d’être distribuée et de circuler, mais elle conserve son origine initiale.
Définitions
> Produit entièrement obtenu : sont considérés comme produits « entièrement obtenus » par l’article 23 du CDC, s’agissant de l’origine non préférentielle et par les protocoles définissant la notion « produits originaires » dans les relations préférentielles, les produits suivants : produits minéraux extraits, végétaux récoltés, animaux vivants nés et élevés, produits provenant d’animaux vivants y faisant l’objet d’un élevage, produits de la chasse et de la pêche, produits de la pêche maritime (fonction de l’immatriculation et du pavillon du bateau notamment, etc.).
> Ouvraison substantielle : aux termes de l’article 24 du CDC, lorsque deux ou plusieurs pays sont intervenus dans la fabrication d’un produit, le produit sera réputé originaire du pays où aura eu lieu « la dernière transformation substantielle, économiquement justifiée, effectuée dans une entreprise équipée à cet effet et ayant abouti à la fabrication d’un produit nouveau ou représentant un stade de fabrication important ».
Conseil de l’expert
Il est possible d’obtenir des douanes un renseignement d’origine contraignant (ROC), afin d’avoir une confirmation de l’origine d’un produit en fonction des éléments en votre possession. Les demandes doivent être déposées uniquement auprès du bureau E/4 de la DGDDI à Montreuil. Le délai de réponse est de l’ordre de 1 à 2 mois en moyenne.
Bon à savoir
Au niveau européen, une réflexion est en cours afin de revoir l’origine préférentielle à partir d’un « Livre vert » de la Commission européenne avec un questionnaire pour les opérateurs. Le nouveau principe reposerait sur le critère de la plus-value, en tenant compte des différents accords existant entre les partenaires de l’UE et d’autres pays. De son côté, l’OMD a une réflexion d’ensemble dans le cadre des négociations à l’OMC portant sur un futur accord multilatéral.
Bernard Parent, expert
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