Quelles sont les possibilités douanières de se défendre contre la contrefaçon, mais aussi de se prémunir contre des importations illicites de substances chimiques utilisées pour la production de drogues de synthèse. Voici ce qu’il faut en savoir.
La contrefaçon est aujourd’hui devenue un véritable fléau pour notre économie. Elle frappe tous les secteurs, des biens de consommation courante aux produits industriels et pas uniquement aux seuls produits de luxe. Non seulement elle concurrence de façon déloyale nos entreprises et détruit les emplois, mais elle engendre de graves problèmes de sécurité pour les consommateurs.
Bon à savoir
Ce que couvre la propriété intellectuelle : les droits de marque et sa représentation graphique comme une dénomination sociale – nom de modèle – nom commercial, les dessins, les modèles, un nouveau produit, un nouveau procédé, les brevets, les licences, les œuvres d’art, les droits d’auteur, les droits de propriété littéraire et artistique, les droits des auteurs/compositeurs et éditeurs de musique, les droits de producteur et distributeur d’œuvres cinématographiques, les droits d’auteur de l’éditeur de logiciel, les droits de distribution, les droits de reproduction, droits d’auteur sur des ordinateurs, protections végétales, dénominations géographiques, etc.
Les principaux produits de contrefaçon : textiles (vêtements, accessoires du vêtement et linge de maison, etc.), jeux et jouets, médicaments, outillage, bijouterie, maroquinerie, multimédia, autres y compris l’alimentaire, etc.
1/ Le plan d’action UE-Chine sur les droits de propriété intellectuelle
• La protection des droits de propriété intellectuelle (DPI) est d’une importance cruciale pour les entreprises de l’Union européenne, confrontées au grave problème des contrefaçons et des produits pirates. La Chine (Hong Kong inclus) est de loin la principale source (environ 75 %) des produits de ce type saisis aux frontières de l’UE, avant l’Inde, le Vietnam, le Brésil, etc.
• La protection des DPI joue un rôle central dans le succès de la coopération économique et commerciale entre l’UE et la Chine. Sans la mise en œuvre d’une législation efficace pour combattre la contrefaçon et de mesures de contrôle effectives, l’UE n’est pas disposée à accorder aux entreprises chinoises des mesures de facilitation des échanges plus étendues.
• L’accord conclu en février 2009, prévoyant un plan d’action en vue d’une coopération douanière plus étroite entre l’UE et la Chine pour le respect des DPI, démontre clairement la volonté politique de l’UE de soutenir les efforts de la Chine dans ce domaine. Inversement, le degré d’engagement dont la Chine fera preuve dans la mise en œuvre du plan d’action permettra de mesurer sa détermination à coopérer, au niveau international, afin de parvenir à une réduction mesurable de la contrefaçon et de la piraterie.
Le plan d’action prévoit :
– La mise en place d’un groupe de travail afin d’étudier le flux de marchandises contrefaisantes entre la Chine et l’UE ;
– L’échange d’informations sur les risques en matière de DPI ;
– Une coopération opérationnelle entre les principaux ports et aéroports ;
– L’échange de fonctionnaires, et le développement de partenariats avec le secteur privé en Chine afin de mieux cibler les chargements suspects.
Depuis cet accord, les progrès réalisés sont visibles. La Chine est en train d’aligner sa législation douanière sur les règles de l’UE et a accru les contrôles afin de protéger les droits de propriété intellectuelle. Toutefois, malgré ces efforts, les marchandises contrefaisantes ou les précurseurs de drogues illicites entrant dans l’UE continuent à provenir principalement de Chine. Si ces problèmes doivent être combattus par d’autres moyens que la simple intervention douanière, cet accord de coopération conclus contribuera à améliorer la protection des consommateurs de l’UE.
2/ L’organisation de la douane nationale et communautaire
Le dispositif national
Outre l’administration des douanes qui a un rôle essentiel, est actif le Comité national anti-contrefaçon, qui réunit les fédérations professionnelles, les associations, les entreprises concernées et les administrations compétentes (hors douane). Son plan d’action comprend un ensemble de mesures opérationnelles traitant tous les aspects de la contrefaçon : formation, sensibilisation, répression, coopération au sein de l’Europe comme avec tous les pays touchés par ce fléau.
• En matière de formation, il a été créé un centre dédié aux entreprises et aux responsables publics concernés, implanté à Strasbourg.
• En matière de répression, la France a la volonté de dissuasion. Des dispositions pénales, aggravant sensiblement les peines encourues, ont été mises en place.
• En matière de coopération, la France soutient les efforts de la Commission et du Parlement européens pour renforcer le dispositif juridique existant et mène une politique de coopération bilatérale avec des pays en développement, tout en protégeant les intérêts économiques français.
Les entreprises doivent déposer les demandes d’intervention auprès des douanes, dès lors qu’elles sont enregistrées auprès d’un office de protection de la propriété intellectuelle national (INPI en France), communautaire (OHMI) ou international (OMPI).
Vers une évolution de la réglementation communautaire
La douane française a lancé une consultation publique sur le réexamen de la législation de l’UE relative aux mesures douanières assurant le respect des droits de propriété intellectuelle (Règlement n° 1383/2003) et organisé une consultation en vue du réexamen de ce règlement. Le nouveau règlement devrait paraître fin 2010 et sera intégré dans le futur Code des douanes communautaire (CDC). Ce règlement devrait permettre une meilleure harmonisation communautaire en matière de propriété intellectuelle et modernisera les procédures, y compris l’informatisation, tout en les adaptant aux évolutions de la contrefaçon.
Bon à savoir
Le champ d’application du nouveau règlement communautaire comprendra :
• étendue des DPI ;
• dérogations possibles ;
• retenues et destructions ;
• petits envois (par la poste et en express) et ventes Internet ;
• coûts du stockage et de destruction ;
• traité ACTA (mesures aux frontières) ;
• situations devant lesquelles les douanes doivent intervenir ;
• traitement des petites quantités de marchandises ;
• marchandises de surproduction ou excédentaire (overruns) ;
• marchandises relevant du commerce parallèle ;
• voyageurs ;
• franchises (et non tolérances) ;
• soutien du commerce légitime ;
• mise en place de procédures simplifiées pour la destruction des marchandises (sous un délai de 30 jours).
La douane française a prévu d’organiser des réunions pour sensibiliser les consommateurs et coopérera avec les douanes étrangères.
3/ L’accord sur les précurseurs de drogues
Les « précurseurs de drogues » sont des substances chimiques inoffensives qui se trouvent légalement dans une large gamme de produits de consommation, tels que les médicaments, les savons, les parfums ou les biocides. Toutefois, ils peuvent également être utilisés abusivement dans la fabrication illicite de drogues, telles que la cocaïne, l’héroïne, l’ecstasy et les méthamphétamines.
Par exemple : l’éphédrine est utilisée dans les médicaments contre les refroidissements, mais peut également servir à produire de la méthamphétamine.
Sur la base de l’accord conclu en février 2009, la Chine et l’UE vont, pour la première fois, mettre en place un large système de contrôle des mouvements légaux de précurseurs. Cela permettra d’éviter que les précurseurs de drogues ne soient détournés du commerce légal pour servir à la fabrication de drogues illicites dans la Communauté.
Un contrôle douanier efficace des précurseurs de drogues est de la plus haute importance ; la saisie d’un litre de précurseur d’ecstasy évite d’avoir à empêcher la vente de 10 000 pilules d’ecstasy dans la rue.
L’UE continue d’être considérée comme l’un des principaux pourvoyeurs mondiaux de drogues de synthèse, notamment d’ecstasy et d’amphétamines. Pourtant, les produits chimiques nécessaires à la fabrication de ces drogues ne sont pas légalement disponibles dans l’Union européenne et doivent être importés. On considère que les importations illicites de précurseurs de drogues dans l’UE proviennent principalement de Chine.
Ce type d’importations est très répandu au sein de l’UE. Les saisies effectuées par l’UE en 2009 pour seulement deux précurseurs principaux (pour fabriquer l’ecstasy et la méthamphétamine/amphétamine) équivalent à la production de plus de 2,5 milliards d’euros de drogues selon les prix actuels du marché (basés sur les chiffres de l’ONU).
Bon à savoir
En savoir plus sur la coopération douanière avec la Chine, la lutte contre la contrefaçon et le trafic illicite de précurseurs de drogues :
• http://ec.europa.eu/taxation_customs/customs/policy_issues/international_customs_agreements/index_fr.htm
• http://ec.europa.eu/taxation_customs/customs/customs_controls/counterfeit_piracy/index_fr?htm
• http://ec.europa.eu/taxation_customs/customs/customs_controls/drugs_precursors/index_fr.htm
Bernard Parent, expert