Aujourd’hui, rares sont les produits à 100 % fabriqués à partir de composants de la même origine géographique. Pourtant, ils ont droit à un « Made in ». Quelles en sont les règles ? Avec le retour en vogue du « Made in France », un point s’imposait.
Dans le contexte actuel de la mondialisation et de la délocalisation des processus de fabrication, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et la Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) sont de plus en plus fréquemment interrogées par les entreprises qui souhaitent savoir quand elles peuvent apposer un marquage d’origine « Made in » ou « Fabriqué en » suivi du nom du pays d’origine. Et plus particulièrement, quand elles peuvent apposer « Made in France » ou « Fabriqué en France », sur leurs produits dans la fabrication desquels sont intervenus des facteurs de production provenant de plusieurs pays (composants, matières premières, produits intermédiaires et diverses étapes de la fabrication).
Repère
Définitions essentielles De façon plus précise, les règles communautaires d’origine non préférentielle sont édictées par les articles 22 à 26 du CDC, notamment les articles 23 (produits entièrement obtenus dans un pays) et 24 (produits dans la fabrication desquels plusieurs pays interviennent). L’article 24 du CDC dispose qu’une marchandise dans la production de laquelle sont intervenus deux ou plusieurs pays est originaire du pays où a eu lieu la dernière transformation ou ouvraison substantielle ayant abouti à la fabrication d’un produit nouveau ou représentant un stade de fabrication important. Les articles 35 à 46 des DAC ainsi que les annexes des DAC n° 9, 10 pour les produits textiles, et 11 pour certains autres produits industriels, apportent des précisions sur les modalités d’application de l’article 24 du CDC.
I/ Le marquage de l’origine sur le territoire de l’Union européenne et à l’importation
• Notions de base
Aucune disposition nationale ou communautaire n’impose l’apposition d’un marquage de l’origine sur les produits (emballage compris) fabriqués dans l’Union européenne (UE), en France ou importés, sauf exception comme certains produits alimentaires ou agricoles. En vertu des règles de l’OMC (Organisation mondiale du commerce), les règles d’origine non préférentielles (ONP), et uniquement celles-ci, s’appliquent en matière de marquage de l’origine. Lorsque ce marquage est indiqué volontairement, il doit être conforme aux règles d’origine non préférentielle du Code des Douanes Communautaire (CDC), dans l’UE. L’origine non préférentielle peut être considérée comme la nationalité de la marchandise au regard de règles spécifiques. Ainsi, l’achat d’un produit dans un pays ne garantit pas que la matière première soit originaire de ce pays.
• Les bases juridiques de l’origine non préférentielle
Les règles de l’UE sur l’origine non préférentielle des marchandises sont définies dans le règlement (CEE) n° 2913/ 92 du Conseil du 12 octobre 1992 établissant le Code des Douanes Communautaire (CDC) et dans les dispositions d’application (DAC), à savoir le règlement (CEE) n° 2454/93 de la Commission du 02 juillet 1993. Des discussions sont en cours à l’OMC aux fins d’harmoniser les règles d’origine non préférentielle au niveau international. Dans les annexes 10 et 11 des DAC, ne sont repris que les produits pour lesquels un règlement communautaire a été publié. Pour les produits qui ne figurent pas dans les DAC, la Commission européenne publie sur son site Europa.eu la position défendue dans les négociations à l’OMC en ce qui concerne l’interprétation de la notion de dernière transformation ou ouvraison substantielle. En conséquence, une règle d’origine non préférentielle est déterminée pour tous les produits, en fonction de leur nomenclature tarifaire, et c’est cette règle qui s’applique pour le marquage de l’origine.
Bon à savoir
Vous pouvez avoir accès direct à ces informations sur le site Internet de la Commission européenne à l’adresse suivante : http://ec.europa.eu/taxation-customs/customs/customs-duties/ rules-origin/non-preferential/article-410-fr.htm
II/ Le rôle des Douanes françaises et de la DGCCRF
• L’administration des douanes
Elle intervient à l’importation en application de l’article 39 du Code des Douanes afin de vérifier que les marchandises ne comportent pas un marquage délictueux laissant croire au consommateur qu’elles ont été fabriquées en France alors que la marchandise est d’origine tierce. Le marquage de l’origine n’est pas obligatoire à l’importation. Toutefois, si une origine est indiquée sur le produit et/ou sur son emballage, notamment une origine France, elle doit pouvoir être justifiée en application des règles d’origine non préférentielle. La DGDDI est chargée du contrôle du respect de ces dispositions.
• La DGCCRF
Elle contrôle de son côté le marquage de l’origine des marchandises sur le marché intérieur, lors de leur commercialisation sur le marché national. Le marquage de l’origine n’est pas obligatoire sur le marché intérieur : le choix d’en faire état ou pas est laissé à l’initiative du professionnel. Toutefois, à partir du moment où le professionnel choisit d’apposer sur un produit une mention de ce type ; elle doit pouvoir être justifiée. Le Code de la consommation permet de réprimer les fausses indications de l’origine, afin d’éviter le risque d’induire en erreur le consommateur sur l’origine véritable par utilisation d’une marque, signe, indication quelconque de nature à laisser croire à une origine différente de l’origine réelle, en application des articles suivants :
– l’article L. 121-1 qui prohibe, notamment, les pratiques commerciales trompeuses sur l’origine ;
– l’article L. 213-1 qui prohibe, notamment, la tromperie sur l’origine ;
– l’article L. 217-6 qui réprime le fait d’apposer un signe quelconque de nature à faire croire qu’un produit a une origine différente de sa véritable origine française ou étrangère ;
– et l’article L. 217-7 qui réprime le fait de faire croire à l’origine française de produits étrangers ou à une origine différente de leur véritable origine française ou étrangère.
La DGCCRF est chargée du contrôle du respect de ces dispositions.
III/ Marquage de l’origine à l’exportation
À l’exportation, du fait de l’absence d’harmonisation au niveau international concernant les règles d’origine non préférentielle, la détermination de cette dernière peut être effectuée conformément aux dispositions du CDC, mais elle n’est pas opposable aux pays de destination qui peuvent avoir leurs propres exigences réglementaires. Bien qu’elle constitue un élément d’information pour l’opérateur, la détermination de l’origine non préférentielle en application des règles d’origine non préférentielle communautaires de produits destinés à être exportés vers des pays tiers n’a donc qu’une valeur indicative. C’est pourquoi, afin de sécuriser au mieux vos opérations commerciales, vous êtes invité à vérifier auprès des pays de destination leur réglementation applicable à l’importation en matière d’origine non préférentielle. Pour ce faire, vous pouvez par exemple vous rapprocher des Services économiques (SE) rattachés aux ambassades de France à l’étranger afin d’obtenir des informations plus précises sur la réglementation applicable en matière de marquage d’origine dans les pays tiers vers lesquels vous souhaitez exporter.
Bon à savoir
Vous trouverez la liste et les contacts des SE en cliquant sur l’onglet : « liste de nos bureaux » qui figure sur le site Internet : http://www.tresor.economie.gouv.fr/Pays. Ces informations sont également disponibles sur le site Market Access Database de la Commission européenne.
IV/ Marques, labels et autres indications qui ne confèrent pas l’origine d’une marchandise
• La marque « Origine France Garantie »
Elle s’appuie sur un référentiel rigoureux établi en 2011 par le numéro 1 mondial de la certification, Bureau Veritas Certification. Le choix du nom et du logotype répond à des préoccupations de valorisation de produits français. En aucun cas cette marque ne s’appuie sur les règles d’origine douanière.
• L’indication géographique protégée (IGP)
C’est un signe officiel de la Communauté européenne d’origine et de qualité qui permet de préserver les dénominations géographiques et offre une possibilité de déterminer l’origine d’un produit agricole alimentaire quand il tire une partie de sa spécificité de cette origine. La définition figure dans le règlement (CE) n° 510/2006. L’IGP constitue le nom d’une région, d’un lieu déterminé ou, dans des cas exceptionnels, d’un pays, qui sert à désigner un produit agricole ou une denrée alimentaire.
Pour mémoire, l’IGP est un signe d’identification de la Communauté européenne, créé en 1992. Attribuée initialement aux produits alimentaires spécifiques portant un nom géographique et liés à leur origine géographique, elle a été étendue aux vins depuis 2009 (les spiritueux en sont exclus). Les noms d’IGP sont protégés dans toute l’Union européenne.
Important : en France, une dénomination d’indication géographique protégée a pour cible les groupements de producteurs, de transformateurs ou autres qui sont intéressés par la protection d’un produit spécifique portant un nom géographique. Leur gestion est assurée par l’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO). Depuis le 1er janvier 2007, ce signe de qualité n’est plus nécessairement couplé à un Label rouge ni à une certification de conformité produit (CCP).
• Les labels homonymes des pays étrangers à l’UE
En 1999, la Suisse a créé des labels homonymes dotés de définitions spécifiques et parmi ceux-ci, l’IGP (Suisse). La même année, dans le cadre d’un accord agricole UE/Suisse, une reconnaissance mutuelle de l’IGP des 2 zones et des labels de qualité en général a été signée. Cet accord est entré en vigueur le 1er décembre 2011.
Important : ne pas confondre le marquage de l’origine avec les marquages rendus obligatoires par des réglementations spécifiques sur les normes techniques et les produits sensibles (marquage de type « CE »). Ce type de marquage, obligatoire pour tout produit entrant dans le champ d’une directive européenne de type « nouvelle approche », relève du domaine de la normalisation communautaire. Son objectif est de préserver la santé et la sécurité du consommateur. Ce marquage signifie que le produit est conforme aux exigences communautaires incombant au fabricant. Vous trouverez plus d’informations sur le marquage « CE » sur le site Internet de la DGCCRF : http ://www.economie.gouv. fr/dgccrf/Le-marquage-CE. Pour mémoire, les infractions au marquage de l’origine ne peuvent pas être assimilées à une atteinte au droit de propriété intellectuelle (DPI).
(Source : Douane française et la DGCCRF)
Bernard Parent – Expert
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