Savoir calculer la valeur en douane d’une marchandise est un point clé. Quoi inclure, quoi exclure ? Conseil d’expert.
I/ Définition et principes
La valeur en douane est fondée sur la valeur transactionnelle, à savoir le prix payé ou à payer (règle Gatt et de la Communauté européenne-CE), sachant que :
– il faut incorporer certains frais de prestations accessoires, le montant des redevances faisant l’objet d’un contrat portant sur la marque, les brevets, etc. ;
– ou en déduire certaines prestations faisant l’objet d’une facture ultérieure après importation sur le territoire douanier de la CE comme l’assistance technique, le transport, les manutentions, etc.
Les coûts et frais liés aux marchandises avant le passage du premier point d’introduction sur le territoire douanier du pays d’importation doivent être pris en compte pour la détermination de la valeur en douane.
> Règles fondatrices
Les règles relatives à la détermination de la valeur en douane à l’importation sont fixées dans l’accord relatif à la mise en oeuvre de l’article VII de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (Gatt, cycle de Tokyo, 1979). La Communauté européenne applique ces règles, dans tous les États membres depuis le 1er juillet 1980.
La conclusion du cycle de l’Uruguay (avril 1994, Accords de Marrakech) instituant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a reconduit, sans modification, ces dispositions.
Cette réglementation internationale a été transposée au niveau communautaire aux articles 28 à 36 du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil du 12 octobre 1992 établissant le Code des douanes communautaire (CDC) – (JO/CE – n° L. 302 du 19/10/92) et aux articles 141 à 181 bis du règlement (CE) de la Commission du 2 juillet 1993 fixant certaines dispositions d’application du règlement du Conseil (DAC) – (JO/CE n° L. 253 du 11/10/93).
> Utilisation
La valeur en douane est la valeur à retenir, dans l’UE, pour l’application du tarif douanier commun.
Elle sert de base à la perception des droits antidumping et elle est retenue comme base d’imposition à la TVA, à l’octroi de mer et à certaines taxes fiscales et parafiscales perçues à l’importation, sous réserve de certaines règles spécifiques.
Il convient de noter que la valeur à déclarer à l’exportation ne relève pas de la réglementation communautaire et reste définie à l’article 36 du Code des douanes national.
Bon à savoir
L’élaboration de la réglementation sur la valeur en douane et des textes interprétatifs est effectuée dans le cadre des organismes internationaux : comité de l’évaluation en douane de l’OMC et comité technique de l’évaluation en douane de l’OMD (Organisation mondiale des douanes) pour ce qui concerne la gestion de « l’accord » proprement dit, comité du CDC (section valeur) pour ce qui concerne la gestion au niveau communautaire. Quant à son application, elle relève des administrations nationales.
II/ La valeur en douane fondée sur la valeur transactionnelle
La valeur en douane est fondée, en priorité, sur la valeur transactionnelle des marchandises importées. Ce principe est énoncé à l’article 29 du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil établissant le CDC.
La valeur transactionnelle est le prix effectivement payé ou à payer par l’acheteur au vendeur, auquel sont ajoutés ou retranchés différents éléments.
> Les éléments à ajouter au prix payé ou à payer sont énumérés à l’article 32 du CDC :
– les éléments supportés par l’acheteur qui n’ont pas été inclus dans le prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises importées : commissions et frais de courtage (à l’exception des commissions à l’achat), et coûts des contenants et emballages ;
– les éléments fournis gratuitement ou à coût réduit par l’acheteur au vendeur : matières, composants, parties et éléments similaires incorporés dans les marchandises importées ; outils, matrices, moules et objets similaires utilisés lors de la production des marchandises importées ; travaux d’ingénierie, d’étude d’art et design, plans et croquis, exécutés ailleurs que dans la communauté et nécessaires pour la production des marchandises importées ;
– les redevances et droits de licence relatifs aux marchandises à évaluer acquittés comme condition de la vente des marchandises ;
– tout produit de la revente, de la cession ou de l’utilisation ultérieure des marchandises importées qui revient directement ou indirectement au vendeur ;
– les frais de transport et d’assurance ainsi que les frais de chargement et de manutention connexe au transport des marchandises importées, engagés jusqu’au lieu d’introduction dans le territoire douanier de la communauté.
Il est précisé que cette liste d’éléments, à ajouter au prix payé ou à payer pour la détermination de la valeur en douane, est limitative et que les montants à ajouter au titre de ces éléments doivent être établis sur des données objectives et quantifiables.
> Les éléments pouvant être déduits du prix payé ou à payer, à condition d’être distincts de ce prix, sont repris à l’article 33 du CDC :
– les frais de transport et d’assurance engagés après l’arrivée au lieu d’introduction dans le territoire douanier de la communauté ;
– les frais relatifs aux travaux de construction, d’installation et de montage, d’entretien et d’assistance technique entrepris après importation ;
– les frais relatifs au droit de reproduire dans la communauté les marchandises importées ;
– les commissions d’achat ;
– les droits à l’importation et autres taxes à payer dans la communauté en raison de l’importation ou de la vente des marchandises, etc.
Bon à savoir
> Un traitement particulier existe pour l’évaluation en douane des supports informatiques, lorsque la valeur en douane est fondée sur la valeur du seul support matériel à l’exclusion des données ou instructions, à condition qu’il soit possible de distinguer du montant total, la valeur du support et des données ou instructions.
> Tous les renseignements relatifs aux éléments à ajouter ou à retrancher sont repris sur une déclaration des éléments relatifs à la valeur en douane, formulaire DV 1, qui est annexée à la déclaration en douane d’importation. La réglementation prévoit certains cas où la production de ce formulaire DV 1 n’est pas exigée.
III/ Conditions d’utilisation de la valeur transactionnelle
La réglementation impose certaines conditions pour permettre l’évaluation en douane d’une marchandise sur la base de sa valeur transactionnelle. Ces conditions sont les suivantes :
- Il faut qu’il y ait vente. En l’absence de vente (location, troc, vente en consignation, cadeaux, échantillons gratuits, etc.), il ne peut y avoir recours à la valeur transactionnelle ;
- Lorsqu’il y a vente, elle ne doit pas être limitée par des restrictions sur la cession ou l’utilisation des marchandises par l’acheteur. Toutefois, la réglementation permet le recours à la valeur transactionnelle lorsqu’il s’agit de restrictions concernant la cession ou l’utilisation des marchandises qui sont imposées par la loi ou par les autorités publiques, ou qui limitent la zone géographique dans laquelle les marchandises peuvent être vendues, ou encore lorsque ces restrictions n’affectent pas substantiellement la valeur des marchandises ;
- En cas de ventes entre sociétés liées entre elles, définies à l’article 143 des dispositions d’application du Code des douanes (DAC), il doit être démontré que l’existence des liens n’a pas influencé la détermination des prix. Si les services ont des motifs de considérer que les liens ont influencé les prix, et que l’importateur ne peut démontrer le contraire, la valeur transactionnelle est rejetée ;
- Il faut également que les documents indispensables à l’évaluation ne soient pas faux, inexacts ou inapplicables.
IV/ Les autres méthodes d’évaluation
> Méthodes de substitution
En cas de non-acceptation de la valeur transactionnelle ou en son absence, les services douaniers doivent déterminer une valeur d’après les méthodes dites de substitution visées à l’article 30 du CDC, qui sont utilisées obligatoirement dans l’ordre prévu à ces articles :
– méthodes « comparatives » fondées sur la valeur transactionnelle de marchandises identiques ou similaires vendues pour l’exportation à destination de la communauté et exportées au même moment ou à peu près que les marchandises à évaluer ;
– méthode « déductive » fondée sur le prix unitaire correspondant aux ventes dans la communauté des marchandises importées ou de marchandises identiques ou similaires importées totalisant la quantité la plus élevée, ainsi faites à des personnes non liées aux vendeurs (les frais engagés après importation sont déduits) ;
– méthode de « la valeur calculée » fondée sur l’ensemble des coûts engagés pour la production des marchandises à évaluer en tenant compte d’un montant pour les bénéfices et frais généraux, correspondant au niveau généralement pratiqué pour la production de marchandises semblables à celles à évaluer.
L’ordre d’utilisation des deux dernières méthodes peut être inversé à la demande du déclarant.
> Méthode du « dernier recours »
Lorsque la valeur en douane des marchandises importées ne peut être déterminée par l’application des articles 29 du CDC (valeur transactionnelle) et 30 du CDC (méthodes de substitution), il convient alors d’appliquer la méthode dite du « dernier recours » visée à l’article 31 du CDC. Dans le cadre de cette dernière méthode, la valeur en douane est déterminée sur la base des données disponibles dans la Communauté, par des moyens raisonnables compatibles avec les principes et les dispositions générales de l’accord de l’OMC et du CDC.
Bon à savoir
Il n’existe pas de renseignement contraignant sur la valeur, comme cela existe pour le tarif douanier.
Bernard Parent, expert
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