Jean-René Buisson, le président de Sopexa, s’en réjouit. La nomination surprise de Muriel Pénicaud, annoncée par la Lettre confidentielle dès la semaine dernière* pour piloter l’agence publique Ubifrance est du pain béni pour la Société pour l’expansion des ventes des produits agricoles et alimentaires qu’il préside, alors que son rapprochement avec Agrotech, le département agroalimentaire d’Ubifrance, exigé par l’ex ministre du Commerce extérieur, Nicole Bricq, n’est pas bouclé.
En effet, Muriel Pénicaud et Jean-René Buisson se connaissent bien. Le second, de 1996 à 2004 membre du comité exécutif de Danone – directeur général des ressources humaines puis secrétaire général – a été à l’origine du recrutement de la première dans ce groupe, puis de son retour chez Danone après qu’elle ait passée six ans comme directrice générale adjointe de Dassault Systèmes (2002-2008).
« Muriel, je ne m’y attendais pas, même si je savais que les ministres voulaient une femme », a confié Jean-René Buisson à la Lettre confidentielle qui lui a annoncé la nouvelle, le matin du 15 mai dans un grand café parisien.
Comme lui, Muriel Pénicaud a terminé sa carrière chez Danone à la tête des Ressources humaines. « Elle est très diplomate, juge le patron de Sopexa, possède, sans aucun doute, un bon carnet d’adresses et connaît à la fois le réseau public et privé, ce qui sera un atout indéniable à son nouveau poste ». Elle a été notamment conseiller de la ministre du Travail, de l’emploi et de la formation professionnelle Martine Aubry entre 1991 et 1993.
Une fusion avec Agrotech sous l’égide de Sopexa
Arrivé aux commandes de Sopexa en 2013, après dix ans passés à la tête de l’Association nationale des industries alimentaires (Ania), Jean-René Buisson est donc confiant quant au rapprochement avec Ubifrance. « Les politiques sont fatigués d’une concurrence stérile et Nicole Bricq, que je connaissais quand la ministre était auparavant à la commission des Finances du Sénat, était en faveur d’une structure commune », affirme l’ancien dirigeant de l’Ania.
Il laisse penser que des contacts fréquents au ministère de l’Agriculture et des rencontres également au ministère des Affaires étrangères et du développement international (MAEDI) lui permettent d’espérer un rapprochement « sous l’égide de Sopexa ». « Ce serait normal, assure Jean-René Buisson, puisque nous pesons 67,9 millions d’euros et Agrotech 6 millions seulement ». Et puis, assène l’ancien dirigeant du secteur privé agroalimentaire, « Ubifrance utilise des fonds publics et donc exerce une concurrence déloyale».
Évidemment, reconnaît-il, le remaniement ministériel a créé une nouvelle donne. La fusion déjà annoncée entre
l’Agence française pour les investissements internationaux (Afii) et Ubifrance est forcément freinée, d’autant plus que l’agence s’est retrouvée sans directrice générale du jour au lendemain. Toutefois,le 21 mai, Muriel Pénicaud a été nommée ambassadrice déléguée aux investissements internationaux et donc, à ce titre, occupe la présidence de l’Afii. Sa nomination à la tête d’Ubifrance doit être approuvé par un conseil d’administration de l’agence le 23 mai avant qu’elle ne soit officialisée en conseil des ministres. Le temps que la nouvelle responsable s’installe, les projets suspendus devraient être relancés d’ici l’été.
Par ailleurs, il faudra s’assurer que le MAEDI conserve l’idée « d’une organisation étatique unique sous l’égide de Sopexa ». De nombreuses interrogations subsistent. Qu’en pense la nouvelle secrétaire d’Etat au Commerce extérieur Fleur Pellerin ? Sans compter les réponses à donner à certaines pratiques. Par exemple, quelles seront les conditions techniques et financières à un accord ? Quelle est la valeur réelle des deux entités ? Ou quel niveau d’aide l’État est-il prêt à apporter à la nouvelle structure ?
François Pargny
*Lire : Direction Ubifrance-Afii : une personnalité surprise sur le point d’être nommée