En onze ans d’existence la PME girondine a installé ses lampadaires à énergie solaire dans une soixantaine de pays, racheté le leader du secteur aux États-Unis et entend doubler son chiffre d’affaires tous les ans. Son secret ? Une stratégie de développement à l’international menée tambour battant grâce à un large choix de produits adaptés aux besoins en éclairage public autonome et à une bonne capacité d’adaptation aux spécificités locales.
En août 2021, Sunna Design (9 millions de chiffre d’affaires dont 90 % à l’international) annonçait son premier contrat pour des installations couvrant l’ensemble d’un territoire.
Signé avec l’Agence togolaise d’électrification rurale et des énergies renouvelables (AT2ER) et financé par la DG Trésor sous forme d’un prêt direct de 40 millions d’euros à l’État togolais, il prévoit la fourniture et l’installation en 24 mois de 50 000 lampadaires solaires intelligents dans des zones qui ne sont pas raccordées à l’électricité. Une commande record qui a obligé le spécialiste de l’éclairage solaire autonome et connecté à agrandir sa ligne de production et son espace de stockage à Blanquefort.
« Grâce à une connexion Bluetooth en pied de mât, un technicien pourra envoyer un diagnostic en cas de panne à Blanquefort à l’aide de son smartphone », explique Ignace de Prest, directeur général de l’entreprise. Car cette dernière ne se contente de pas de fournir une technologie. Le contrat passé avec l’AT2ER prévoit la formation de techniciens locaux, employés par l’entité de Sunna Design sur place, ainsi que 12 années de maintenance.
En 2020, la PME rachète le leader américain Sol
« Cette logique de service qui inclut l’apport d’un financement, la maintenance ou la formation de techniciens représente 10 % du chiffre d’affaires annuel sur le marché américain », se félicite le dirigeant qui a lancé en 2019, pour une copropriété résidentielle en Floride, un système d’abonnement sur 15 ans incluant une étude des besoins et la maintenance de l’installation.
C’est en effet aux États-Unis, que l’entreprise a racheté en 2020 un des leaders de l’éclairage solaire en Amérique du Nord, la société Sol. Cette acquisition lui a permis d’étoffer sa gamme en proposant les produits Evergen développés par Sol, plus puissants et permettant un éclairage en zone urbaine ou autoroutière. « Le rachat de cette entreprise qui a trente ans d’expérience dans le solaire correspond à notre volonté de nous développer aux États-Unis ainsi que dans des zones plus électrifiées et moins émergentes ».
De fait, les lampadaires autonomes de la PME intéressent tout particulièrement les collectivités de pays en voix de développement où l’accès à l’électricité ne va pas de soi. Ils sont présents en Afrique (Sénégal, Cameroun, République démocratique du Congo, Nigeria, Afrique du Sud, Algérie, Maroc…), au Moyen-Orient (Égypte, Jordanie) et en Amérique latine (Colombie, Chili…). Des pays qui ont en commun un fort ensoleillement et des conditions climatiques parfois extrêmes. D’où la nécessité de proposer des produits d’une grande robustesse. Les éclairages de Sunna Design ont donc été conçus pour durer dix ans et résister à des vents de 250 km/h et températures de – 20°C à + 70 ° C.
Miser sur le local
Très orientée vers la R&D à ses débuts, l’entreprise a enregistré pas moins de 14 brevets et dépensé 20 millions d’euros depuis sa création en 2011. Elle prend un nouveau virage en 2018, avec l’arrivée à ses commandes d’Ignace de Prest. Cet ancien de Schneider Electric en Europe et en Afrique du Nord, qui avait auparavant travaillé dix ans dans le capital-risque, est chargé de « faire passer la société à l’échelle ». Pour ce faire, le dirigeant recrute des commerciaux chargés de dénicher de nouveaux marchés avec un leitmotiv : être le plus local possible, y compris pour la production.
Ainsi, même si elle n’a pas encore franchi le pas, Sunna Design a mis au point une ligne de production mobile qui peut voyager partout dans le monde dans des conteneurs, servir le temps d’un projet avant d’être démontée et « remballée ».
En outre, les produits qui sortent de l’usine de Blanquefort, labellisée « usine du futur », sont français à 85 %. Seuls les panneaux solaires viennent de Chine. « Depuis la disparition des grands champions allemands du photovoltaïque au début des années 2010, il n’y a plus de filière en Europe, regrette Ignace de Prest. C’est dommage parce qu’il y a un coup à jouer ».
D’autant que, à en croire le dirigeant, la concurrence chinoise est loin de faire l’unanimité : « des clients en Thaïlande et en Malaisie sont venus vers nous car ils ne trouvaient pas de solution adaptée auprès de fournisseurs chinois. » Des demandes affluent de partout dans le monde, signe que Sunna Design a su se faire un nom au niveau mondial. « Notre meilleure publicité, ce sont les 115 000 mâts que nous avons installés et qui fonctionnent ! »
Sophie Creusillet