La PME franco-chilienne spécialiste du traitement de l’eau et du biogaz vient de remporter l’appel à projets internationaux de la DG Trésor pour des solutions d’autonomie énergétique, financé par le Fasep (Fond d’étude et d’aide au secteur privé). Pour ce faire, elle s’est alliée à une autre PME tricolore, H2SYS, qui conçoit des générateurs à hydrogène vert. Un exemple d’export collaboratif entre une entreprise bien implantée au Chili et une jeune société innovante encore peu expérimentée à l’international.
Pascal Guasp en est encore tout étonné. « Peu de temps après avoir appris que nous étions lauréat, j’ai reçu un appel d’EDF concernant des projets dans l’hydrogène vert ». L’appel à projets internationaux de la DG Trésor, qui vise à propulser à l’international les technologies françaises de décarbonation et de sobriété énergétique, a donné un coup de projecteur à cinq PME et un tandem, composé de Micr’eau et de H2SYS.
La première s’est construit une solide réputation dans le traitement des eaux polluées à l’arsenic, au fer et au manganèse ainsi que dans le stockage et le torchage du biogaz, et a pour client en France de grands groupes comme Véolia, Suez ou GRTgaz. La seconde, créée en 2017 à Belfort, est issue du FCLAB (Fuel Cell Lab), une fédération de recherche du CNRS, et conçoit des systèmes de pile à combustible et des groupes électrogènes à hydrogène vert.
Un tandem complémentaire
« Nous les avons rencontrés par le biais de Bpifrance et nous nous sommes associés pour répondre à l’appel à projets de la DG Trésor sur l’autonomie énergétique, explique le dirigeant. Nous sommes intégrateur sur ce projet de plateforme de production d’électricité et de stockage d’hydrogène vert au Chili dont le bénéficiaire est le ministères des Mines chilien. H2SYS apporte une solution innovante et nous notre connaissance du pays et de acteurs de son secteur énergétique, mais aussi la capacité de notre filiale Aguas y Energía de concevoir une filière autour de ce projet, de la gestion du chantier aux RH en passant par l’installation de panneaux solaires pour alimenter les générateurs ».
Cette initiative d’export collaboratif entre deux sociétés d’ingénierie ultra pointues pour apporter une solution décarbonée et adaptée aux contraintes du réseau électrique chilien, a retenu l’attention de la DG Trésor qui lui a octroyé une enveloppe de 500 000 euros financée par le Fasep Innovation Verte. Destiné en priorité aux PME, ce Fonds d’études et d’aide au secteur privé, finance des études de faisabilité ou des démonstrateurs de technologies décarbonées et innovantes pour des autorités étrangères.
Concrètement cette somme servira à équiper une exploitation minière de l’Antofagasta, dans le Nord du pays, d’une petite unité mobile Boxhy (5 KW) et d’un générateur fixe Thytan de 100 KW, tous deux conçus par H2SYS. L’objectif de ce dispositif de production d’hydrogène vert est de pallier les problèmes d’approvisionnement en électricité des petites sociétés minières dans cette région où les grandes compagnies qui dominent le secteur ont développé un système énergétique isolé du réseau principal.
Un marché en plein essor
Pour ce faire, Micr’eau fera profiter à H2SYS de son partenariat avec la société de services aux exploitations minières Cobres y Metales.
« A terme, nous souhaiterions créer une joint-venture avec eux pour commercialiser cette solution de générateurs à hydrogène vert et la proposer à d’autres secteurs ainsi qu’aux collectivités locales », anticipe Pascal Guasp qui a pris pied sur le marché chilien il y a presque 20 ans et dont il apprécie le sérieux dans les affaires. « Le Chili a énormément investi dans les énergies renouvelables ces dix dernières années et les projets sont colossaux. Total a prévu d’y investir 14 milliards de dollars notamment dans l’hydrogène vert ».
Solidement implanté au Chili, Micr’eau compte y développer une activité dans l’hydrogène vert grâce à son partenariat avec H2SYS, et étendre ses activités dans le nord de l’Amérique du Sud, à commencer par l’Argentine.
La PME franco-chilienne lorgne également du côté de l’extraction du lithium, grande consommatrice d’eau. « Le nouvel accord que viennent de signer l’Union européenne et le Chili n’aura pas d’effet direct sur notre activité, constate le dirigeant. En revanche il va faciliter l’accès des Européens au lithium et contribuer à développer son extraction ».
Anticipant une accélération de son activité d’audit et de conseil au Chili, Micr’eau a créé une deuxième filiale, Andes Bio Medio (ABM), dédiée aux services. Le groupe a réalisé en 2022 un chiffre d’affaires de 3,5 millions d’euros, dont un million au Chili, un résultat qu’il espère doubler l’an prochain. 2023 devrait aussi être l’année d’une nouvelle phase d’expansion en Europe dans le traitement des eaux et le biogaz. « Nous avons un projet de rachat d’une entreprise au Bénélux qui sera annoncé début 2023 », confie le dirigeant.
Sophie Creusillet