On connaissait la K Pop (pop coréenne), voici la K-Beauty (la cosmétique coréenne). Le marché sud-coréen de la cosmétique est en plein essor, mais aussi son industrie, devenant une cible export de choix pour les sociétés françaises. A la faveur de la réouverture des frontières après la période Covid, Cosmetic Valley, le pôle français du secteur, vient d’ organiser une mission d’entreprises dans ce qui est désormais considéré comme une porte d’entrée pour les marchés asiatiques. Retour d’expérience.
La Corée du sud est devenu en seulement dix ans un des poids lourds de la cosmétique mondiale. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : en 2021, le marché national pèse 5,7 milliards d’euros (Md EUR) et les exportations coréennes s’élèvent à plus de 6 Md EUR, soit le cinquième exportateur mondial (selon les données publiées par le ministry of Food and drug safety).
La France, premier exportateur mondial de parfums et cosmétiques en 2021 avec un chiffre d’affaires de 16,2 Md EUR, pour 14 % de part de marché (+2,5% par rapport à 2019, année de référence), souhaiterait de son côté bénéficier de la croissance annuelle de 5 % des pays asiatiques.
Dans ce cadre, le pôle Cosmetic Valley a organisé une mission d’entreprises à Séoul du 22 au 27 mai pour rencontrer les acteurs de la K-Beauty (photo ci-dessous). « Nous voulons aider les entreprises à s’exporter sur ce marché porteur. Il est important que les PME françaises soient référencées dans ce pays, porte d’entrée pour l’Asie », explique au Moci Christophe Masson, directeur général du pôle.
Un marché « à la pointe des tendances beauté »
Huit entreprises françaises ont ainsi pu visiter des entreprises locales et des flagships tout en faisant la promotion de leurs produits et expertises sur le salon Cosmobeauty, qui s’est déroulé du 26 au 28 mai dans la capitale sud-coréenne. Cette mission était en partie soutenue par la Commission européenne dans le cadre du Global cosmetics cluster europe (GCC.EU).
Agnès Ducrocq, fondatrice et directrice générale des laboratoires Téane, entreprise spécialisée dans les produits de soins bio pour femmes enceintes et pour bébés, s’est réjouit de son séjour. « C’était mon premier séjour à l’étranger, post-Covid. Pour faire du commerce, il n’y a rien de mieux que d’aller à la rencontre des gens », observe-t-elle. « J’ai trouvé particulièrement intéressant d’échanger sur les problématiques qu’ont rencontré les autres acteurs du marché, aussi bien des Européens que des Coréens, afin de résister à la crise de ces deux dernières années. La digitalisation et l’innovation ont été les deux principaux leviers de croissance », précise la DG.
Même son de cloche chez Maryvonne Lantéri, responsable des ventes export chez Ouate, spécialisé dans les produits de soins pour enfants. « Le marché coréen est particulièrement complexe; il est notamment reconnu pour être à la pointe des tendances beauté. La mission était riche sur le plan des échanges et contacts mais aussi pour mieux comprendre les attentes du marché coréen et plus spécifiquement dans le retail, afin d’affiner la stratégie à déployer sur le pays », développe la responsable export.
Téane est, de son côté, déjà implantée en Corée depuis 2017, à travers un distributeur en ligne. Avec 10 % de chiffre d’affaires à l’international, la Corée du Sud commence à peser. « Nous souhaitons doubler nos volumes d’ici deux ans. La Chine est toutefois notre client principal avec 80 % de part de marché. Nous misons également cette année sur l’Inde », détaille Agnès Ducrocq.
Alors que le taux de fécondité en 2021 est particulièrement bas dans le pays du matin calme (autour de 0,81 enfant par femme, le plus bas du monde), les Coréens consomment énormément de produits « premium » pendant cette grossesse unique. Le bio n’est pas très présent encore, selon la DG de Téane. « L’argument clean beauty est principalement axé sur le fait que le produit n’a pas été testé sur des animaux. Nos produits naturels n’ont pas beaucoup de concurrence, que ce soit étrangère ou locale. Il est important d’être reconnu comme le premier sur ce marché de niche », argumente cette dernière.
Chez Ouate, l’export a représenté 30 % du chiffre d’affaires en 2021. « Nous souhaitons muscler l’export et gonfler ce chiffre à 50 %, en ouvrant de nouveaux marchés, tout en développant le volant d’affaires de nos clients export actuels », précise Maryvonne Lantéri.
Des accords de partenariats
Au cours de la mission, Christophe Masson a par ailleurs signé plusieurs partenariats avec la Osong Biovalley, l’association cosmétique Ibita et la FKCCI (French Korean Chamber of Commerce and Industry). « L’idée est de créer des liens, principalement en misant sur les jeunes en renforçant les collaborations de recherche et de formation entre universités », ajoute le DG du pôle de compétitivité.
Séoul a annoncé le 5 avril dernier un investissement de 168 millions (M) EUR pour le rayonnement et l’attractivité de la K-beauty. « Le marché coréen est très innovant, notamment en termes de gestuels beauté. On véhicule toujours l’image de l’excellence à la française, mais il ne faut pas se ramollir », conclut Agnès Ducrocq de Téane.
Claire Pham