C’est plutôt une bonne nouvelle pour le commerce extérieur français : le nombre d’exportateurs a augmenté pour s’établir à 136 400 au quatrième trimestre 2021, soit une hausse de 5,1 % en un an, selon les statistiques récemment publiées par la Direction générale des douanes & droits indirects (DGDDI). Même s’il faut se garder de toute interprétation hâtive.
La DGDDI met d’entrée en garde le lecteur : « les nombres particulièrement importants d’exportateurs constatés depuis le début de l’année 2021 sont à considérer avec précaution, souligne-t-elle en couverture de sa note statistique. En effet, leur hausse sur un an serait en partie due à des évolutions techniques, sans lien avec la conjoncture économique ».
Contacté par le Moci, Boris Guannel, adjoint au chef du département des statistiques et des études du commerce extérieur à la DGDDI, n’en dit pas plus sur les « évolutions techniques » en question : des études complémentaires sont en cours, notamment pour croiser des données d’autres administrations, afin de trouver la ou les explication(s) à « l’ampleur de cette hausse ».
6 800 exportateurs supplémentaires
Avec 6 800 exportateurs supplémentaires comptabilisés au quatrième trimestre 2021, l’augmentation en nombre est en effet inédite. Dans le détail, sur l’année 2021, les douanes ont comptabilisé 37 900 nouveaux exportateurs (soit + 7500 « entrants ») pour 31 200 qui ont cessé d’exporter (soit + 1300 « sortants »).
Les trois principaux secteurs concernés par cette hausse des « entrants » en nombre sont l’agroalimentaire (+2 710), les produits manufacturés (+1 040) et les plastiques et caoutchouc (+ 960). Et ceux les plus touchés en termes de « sortants » sont les produits pharmaceutiques (-300), le textile-habillement-cuir (- 280) et les appareils de mesure/horlogerie (- 260).
Répartition des exportateurs par secteurs
Commerce : 65 000
Industrie : 31 300
Services : 22 800
Agriculture : 14 900
Construction : 9 00
Activité principale inconnue : 7 00.
L’an dernier, le Brexit et la volonté d’un certain nombre d’opérateurs de faire leur déclaration en France pour continuer à exporter dans l’Union européenne sans entrave avait été évoqué comme explication, mais ce serait un facteur parmi d’autres. « Les causes sont multi facteurs » confie encore l’analyste des douanes.
Reste que les caractéristiques structurelles de cet appareil exportateur demeurent.
Les 1000 premiers concentrent 70 % des montants exportés
Première caractéristique, sa concentration aux mains d’un petit nombre de très grandes entreprises : les 100 premiers opérateurs concentrent 38 % du total des exportations, les 1000 premiers 70 %, des proportions stables par rapport à 2020. Pour ces poids lourds de l’export, la moyenne exportée est de 350 millions d’euros (M EUR).
A l’opposé, 93 % du nombre d’exportateurs réalisent 5 % des exportations pour un montant moyen annuel de 207 000 EUR.
Deuxième caractéristique, les PME de moins de 20 salariés dominent en nombre : elles constituent 95 % des entreprises exportatrices (109 300 exactement). Les PME de 20 à 250 salariés sont 23 600 et les plus de 250 salariés 3 300. Les ETI (de 250 à 5000 salariés) représentent 4 % de l’effectif et les grandes entreprises 0,5 %. Mais le phénomène de concentration en valeur se vérifie encore : les PME/TPE génèrent 13 % des exportations, contre 35 % pour les ETI et 52 % pour les grandes entreprises.
Davantage d’exportateurs sur l’Union européenne
En 2021, dans le contexte de la reprise économique mondiale, la progression des exportations en valeur des grandes entreprises a atteint + 17,9 %, celle des ETI +16,4 % et celle des PME/TPE + 14,3 %.
Troisième caractéristique : le poids des filiales étrangères, qui est stable par rapport à 2020. Les entreprises sous contrôle étranger ont représenté 45 % des grandes entreprises (et 36 % des exportations dans cette catégorie) et 37 % des ETI (52 % de leurs exportations). Elles sont en proportion moins nombreuses pour les PME/TPE, représentant 13 % en nombre et 25 % des montants exportés.
A noter également que dans cette période post-Covid, où les restrictions sanitaires ont continué à toucher certaines zones géographiques, il semble que nombre d’exportateurs se soient tournés vers les marchés européens : 5 300 supplémentaires ont ainsi exporté vers l’Union européenne. A l’inverse, près de 7 000 ont manqué à l’appel vers les pays tiers en 2021 : la perte va de – 1 100 vers l’Afrique à – 2 100 vers l’Asie.
L’évolution sur 2022 sera intéressante à suivre, compte tenu du contexte géopolitique nouveau créé par la guerre en Ukraine.
Christine Gilguy
La note d’analyse de la DGDDI est téléchargeable ci-après