Electra va vite, très vite. Créée début 2021 par Aurélien de Meaux, Julien Belliato et Augustin Derville, la startup parisienne vient de réussir fin juin une deuxième levée de fonds de 160 millions d’euros (M EUR). Le but est simple : déployer ses bornes de recharges partout en France avec un regard déjà tourné vers l’Europe. Parcours d’une « future » success-story internationale.
Créée en avril 2021 par trois passionnées de mobilité électrique, Electra, opérateur spécialisé dans les bornes de recharge rapide compatibles avec tous les véhicules électriques et hybrides rechargeables, a levé fin juin 160 millions d’euros (M EUR). Cette levée de fonds est réalisée en equity, auprès d’Eurazeo, qui mène ce tour, RGreen, Rive private investment, Serena, Chopard, le groupe SNCF et RATP capital innovation.
Une bonne partie de cet argent frais va servir à financer les infrastructures. La jeune pousse se définit comme tiers-investisseur-déployeur-opérateur. « Notre modèle est qu’on trouve des emplacements, on pose la station avec nos fonds propre et on l’exploite », précise Julien Belliato, directeur des opérations et co-fondateur d’Electra, interrogé par le Moci.
Electra possède ainsi ses propres stations (dont le montant d’investissement oscille entre 200 000 à 600 000 euros par unité) où il intègre sa technologie. Et d’expliquer : « les bornes, ce sont les muscles, alors que le software qui permet de gérer le tout est le cerveau ».
Pour le moment, Electra se fournit en bornes de charge principalement auprès du constructeur italien Alpitronic. « Un des leaders sur ce secteur de la recharge rapide et ultrarapide. De plus, des centaines de milliers de bornes sont déjà en service, ce qui est rassurant », souligne le responsable des opérations. La PME n’a pas signé de contrat d’exclusivité avec la firme italienne et explique rester en veille sur les produits à venir sur le marché.
Des débuts rapides
La première levée de fonds, opérée en juin 2021 et d’un montant de 15 M EUR, avait permis à la startup de se mettre sur les rails la première année, avec du recrutement, de la structuration, du développement commercial et le premier déploiement du produit. Avec une devise en tête c’est d’aller vite.
L’enjeu majeur du secteur est la recherche du foncier. « Il faut aller vite car il y a de nombreux acteurs sur ce marché. C’est très compétitif », martèle Julien Belliato. Et d’ajouter : « dans quelques années, le bon foncier sera parti ». Elle emploie aujourd’hui une soixantaine de personnes et cinq recrutements, notamment des profils ingénieurs,0 sont prévus d’ici la fin de l’année.
Au départ, les trois cofondateurs sont partis d’une feuille blanche. « On s’est mis à la place des électromobilistes quand ils vont se charger. Cette expérience passe par une intégration digitale et physique réussie », explique le responsable opérationnel. Ce dernier cite en exemple des applications digitales comme Uber et Cdiscount.
Parmi les fonctions, « qu’on est les seuls à proposer » affirme Julien Belliato, la réservation du point de charge. « Sur l’autoroute, cela ne sert pas à grand-chose de réserver car l’utilisateur s’arrête et repart. En revanche, en ville, par exemple à Paris sur l’A86, l’utilisateur sera bien content de réserver son créneau et de s’assurer qu’en arrivant, son point de charge sera disponible », complète-t-il.
Les plus de l’entreprise ? Ses bornes se concentrent sur les moyennes et grandes agglomérations, contrairement aux concurrents qui ont plutôt ciblés les grands axes et autoroutes.
Autre différenciation : ce sont des bornes rapides et ultra-rapides et non pas des bornes de rechargement. Elles disposent de 50 et 300 kW de puissance intégralement alimentés en énergie verte. « Concrètement, une charge va prendre de 12 à 35 min dans la majorité des cas, et jusqu’à 1h si la borne est limitée en puissance à cause de contraintes techniques », précise ce dernier.
Les stations sont par ailleurs ouvertes à tous. « Le foncier que l’on doit trouver doit être ouvert 24h/24, 7j/7 ; on aime bien s’assurer qu’on puisse servir tout un chacun, que ce soient des résidents, des particuliers en itinérance ou les flottes professionnelles. En effet, dans les grandes villes, tout le monde n’aura pas une borne à la maison », indique le directeur des opérations. Leurs stations se trouvent ainsi des centres commerciaux, des parkings d’hôtels ou des parkings simples.
Des bornes dans toute la France…
La startup vient ainsi de remporter plusieurs appels d’offres. Mi-mars, elle signe un partenariat avec Weboost, la startup de Louvre Hotels Group, hôtelier français, pour équiper 20 stations d’ici la fin de l’année.
Pour informations, la construction globale d’une station en France prend de 4 à 9 mois. Cela comprend le développement -avec le choix de l’emplacement et la taille du projet-, la demande de raccordement au réseau et les différents permis. Mais selon les difficultés pour tirer les câbles électriques, cela peut prendre plus de temps. « C’est compliqué. Le plus long est le temps des demandes d’autorisation administratives. Le chantier dure seulement 3 semaines », détaille le responsable des opérations.
Un mois plus tard, c’est le groupe Chopard, concessionnaire automobile avec 105 points de vente en France qui fait confiance à la jeune pousse. Il souhaite dans un premier temps équiper 8 concessions de stations haute puissance, soit 56 points de recharge d’ici fin la fin de l’année. Pour ce faire, Electra a créé une co-entreprise avec le distributeur. Un investissement commun de 4 millions d’euros est annoncé.
Et c’est l’escalade. Electra annonce, fin avril, la signature d’un accord avec le groupe français Indigo, spécialisé dans les parkings automobiles, pour le déploiement de 10 stations (de 150 kW de puissance). L’objectif est de les installer à Paris, en région parisienne et dans de grandes métropoles régionales d’ici un an, soit 225 places de charges en tout. Interrogé sur le montant du contrat, Julien Belliato n’a pas souhaité nous en dire plus.
Plus récemment, à la mi-juin, la PME a conclu un contrat avec AccorInvest, propriétaire et exploitant hôtelier, pour équiper 68 sites (soit 362 points de charge) en bornes de recharge rapide (22 kW) et ultra-rapide (150 à 300 kW). Le déploiement va se faire en plusieurs vagues principalement en zones urbaines, en commençant par Paris et Lyon. Les premiers sites seront opérationnels dès le début de l’année prochaine. Ce partenariat « va permettre à des milliers d’électromobilistes de trouver plus simplement un point de recharge qui soit fiable et rapide. (.) et nous permet également de nous ancrer plus encore dans les principales métropoles de France autour des grands axes routiers, des gares et des aéroports », se félicite Aurélien de Meaux, P-dg d’Electra, cité dans le communiqué.
Dernier contrat en date avec Jardiland qui annonce, mi-juillet vouloir équiper 31 magasins de 300 points de charges ultra-rapide (150 à 300 kW). Le déploiement va se faire progressivement jusqu’à la fin 2024, dans les principales villes françaises.
… Et bientôt dans toute l’Europe
Aujourd’hui, Electra possède 50 points de charge ouverts (soit une dizaine de stations) et 300 d’ici la fin de l’année. L’entreprise s’est fixé un objectif ambitieux : avoir 1 500 stations en 2030, soit 8 000 points de charge ouverts en Europe. « On a également 300 sites sécurisés en France et quelques sites sécurisés à l’étranger », poursuit Julien Belliato. Un site sécurisé signifie qu’Electra a remporté l’appel d’offre mais ne peut pas encore communiquer dessus.
L’export déjà ? Et oui, Electra voit grand et a les yeux tournés vers l’Europe. Début juillet, elle a ouvert un bureau à Bruxelles, en Belgique, avec à sa tête Augustin Derville, l’un des cofondateurs. Il vient d’être nommé « country manager » ou patron de pays. Deux personnes locales qui parlent flamand vont venir l’épauler sous peu.
« On va cette année ouvrir des bureaux dans deux autres pays en Europe. Mais je ne peux pas vous en dire plus car on n’est pas certain à 100 % sur l’un d’entre eux », explique le responsable opérationnel. Il nous dévoile cependant que les critères à prendre en compte sont l’évolution du nombre de véhicules électriques et les schémas de subvention accordée.
Côté chiffres, pour le moment, l’export en est à ses débuts et ne représente pas encore de part de marché dans le chiffre d’affaires de l’entreprise. « Mais un appel d’offres a été remporté avec des sites à l’étranger. La France, d’ici 2030 et nos prévisions de 8 000 bornes, reste tout de même au cœur du gâteau », conclut Julien Belliato.
Claire Pham