L’international était au centre des échanges de la conférence plénière qui a inauguré l’édition 2014 du salon du e-commerce, qui se tient à Paris Porte de Versailles du 23 au 26 septembre. S’y sont succédé des e-commerçants venus témoigner des clés du succès de leur développement international. « Le e-commerce aujourd’hui n’existe plus si l’on reste à l’intérieur des frontières hexagonales », a ainsi estimé Olivier Mathot, P-dg du site Internet d’achat et de vente en ligne PriceMinister-Rakuten.
Cibler un pays et trouver un partenaire local
Avant d’être racheté en 2010, par Rakuten, le géant du commerce électronique japonais, le groupe français PriceMinister a débuté son aventure à l’international avec le lancement en 2006 d’une filiale en Espagne et une autre au Royaume-Uni l’année suivante, mais sans grand succès. C’est seulement depuis deux ans que l’ambition du groupe est axée sur l’international avec un rythme d’ouvertures de filiales qui s’est accéléré ces dernières années (Brésil, Asie du Sud-Est…).
Toutefois, Olivier Mathot recommande de réussir, dans un premier temps, dans un pays, en s’appuyant sur un réseau de partenaires locaux, avant de se lancer sur plusieurs marchés à la fois.
Un avis partagé par Ilan Benhaim, cofondateur et executive partner de l’entreprise tricolore de vente en ligne de grandes marques à prix réduits vente-privee.com. celui-ci a estimé que les e-commerçants qui se lancent à l’export doivent cibler un pays et ne pas se laisser distraire. Car selon lui, si « Amazon est présent dans 120 pays, c’est UPS qui se charge des livraisons ! ». Pour réussir à s’implanter aux États-Unis où il a ouvert une structure en 2011, le spécialiste du déstockage a noué un partenariat avec American Express.
Le site français Millésima, spécialisé dans la vente en ligne de vins millésimés et de grands crus classés, a, lui, ouvert un bureau à Hong Kong en 2010. « Hong Kong est devenu un endroit très important pour vendre du vin car depuis 2008, les droits de douane (sur le vin et l’alcool) ont été supprimés », a signalé Gérard Spatafora, directeur e-commerce et m-commerce de Millésima.
Quant à la société photobox.com, spécialisée dans le tirage de photos, la création de livres photo et d’objets personnalisés (mug, calendrier), elle connaît un fort succès en Australie où elle a ouvert une usine deux ans après s’y être installé. Le e-commerçant qui est très présent au Royaume-Uni, où il dispose d’un site de production à Londres, a su conquérir la communauté britannique en Australie et par la suite les Néozélandais.
Mais une fois qu’ils ont ciblé un marché, les e-commerçants doivent s’assurer que celui-ci est doté d’une bonne couverture Internet et que les infrastructures de logistique et les systèmes de livraison y sont matures.
Une logistique et un moyen de paiement adaptés
Exemple de pays compliqué de ce point de vue : la Russie.
Millésima a connu des difficultés pour expédier des caisses de vins en Russie. En effet, passer la frontière, « l’assureur n’assure plus le transport des bouteilles de vin, dont le montant peut atteindre 13 000 euros, jusqu’au client », a expliqué Gérard Spatafora qui regrette que faute de trouver un transporteur fiable, il n’est pas sûr que les caisses arrivent à bon port. Photobox.com a pour sa part rencontré des problèmes avec la poste russe suite aux événements politiques.
Côté paiement, tous les pays n’ont pas les mêmes habitudes. Certains pays européens comme la France et l’Allemagne, avant même l’émergence de la vente en ligne, commandaient déjà à distance par catalogue. Leurs consommateurs ont donc confiance dans la livraison. « Les Chinois, eux, sont habitués à payer lorsqu’ils reçoivent le colis, mais sans paiement, les bouteilles de Château Lafite-Rothschild ne partent pas de chez nous », a averti Gérard Spatafora
Adapter son offre
Bien étudier la logistique n’est pas tout. Il faut aussi suivre au plus près les attentes et les habitudes des clients.
Vente-privée a ouvert des filiales dans sept pays européens (Allemagne, Espagne, Italie, Royaume-Uni, Autriche, Pays-Bas et Belgique). L’Europe, a confié Ilan Benhaim, est un marché extraordinaire car c’est un marché commun, mais culturellement les pays sont très différents, souligne-t-il. Un Espagnol, ce n’est pas un Italien ! »
Le cyber-marchand travaille donc avec des collaborateurs sur place ce qui lui permet de créer une relation plus étroite avec les marques locales. Vente-privée traduit ses sites Internet dans la langue du pays, fait du marketing local et parfois même adapte son offre. Ainsi, outre-Rhin, ses équipes locales basées à Düsseldorf sourcent des produits allemands.
Millésima adapte également son offre au marché local. Outre-Atlantique, par exemple, le e-négociant ne vend pas les mêmes vins selon que le client vive à Boston, ville avec des hivers très froids, ou en Floride. En outre, aux États-Unis, le e-commerçant expédie des vins du monde tandis que sur le Vieux continent, sa clientèle commande des grands vins. « En Italie, a précisé Gérard Spatafora, il y a une importante demande pour les vins de Champagne et les sauternes ».
C’est donc en passant outre les frontières juridiques, fiscales et culturelles que les e-commerçants français peuvent réussir à se développer à l’international.
Venice Affre