La chimie domine le commerce extérieur régional. Les principaux débouchés se trouvent en Europe. C’est encore ce secteur qui comptabilise le plus d’investissements internationaux. Les échanges hors du continent demeurent faibles.
Malgré des exportations progressant au même rythme que la moyenne nationale (+3,75 %), la balance commerciale des Hauts-de-France s’est dégradée en 2018, tombant à – 12,5 milliards d’euros, après – 11,5 milliards en 2017 et – 10,8 milliards en 2016. Les importations ont gagné 4,6 % à 63,4 milliards d’euros, alors que les ventes à l’étranger ont atteint 50,9 milliards.
S’agissant de l’attractivité du territoire, 2018 a été une bonne année, puisque le nombre de projets décidé a augmenté en un an de 18,5 % pour atteindre le chiffre de 115, positionnant la région à la troisième place dans l’Hexagone. Les créations (24 %) ont été moins importantes que les extensions (ArcelorMittal, Procter & Gamble, Refresco, Amazon, Adecco, Toyota, Bombardier…).
Région industrielle avec une présence importante de fonctions logistiques, les anciennes régions Nord-Pas de Calais et Picardie ont recueilli l’an passé 15 % des projets d’investissements étrangers en France dans la chimie, une part dans le total national que l’on ne retrouve que dans le Grand Est, autre région industrielle avec de nombreuses fonctions logistiques. Ces deux régions sont non seulement voisines, mais aussi frontalières et disposent d’une tradition industrielle ancienne. Les Hauts-de-France, explique Business France dans son rapport 2018 sur les investissements internationaux en France, possèdent une forte spécialisation dans la production textile, l’habillement, le cuir et les chaussures. Cette région a aussi bénéficié de 15 % des activités logistiques soutenues par des capitaux étrangers.
La chimie domine aussi le commerce extérieur régional, et ce dans les deux sens, ce qui s’explique par la forte intégration de l’économie locale avec celles de ses voisins européens. Chimie, parfums, cosmétiques, pharmacie, caoutchouc, plastique, produits minéraux comptent pour 12,9 milliards d’euros à eux seuls dans les importations. La quasi-totalité des échanges sont déficitaires, sauf dans le cas de la chimie, des parfums et cosmétiques, avec +2,95 milliards d’euros, et, dans une moindre mesure, la pharmacie, avec +600 millions, précise-t-on à la Direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte).
La contribution des entreprises étrangères à l’industrie manufacturière est notable, tant en Nord-Pas de Calais, avec une part de 39 % du chiffre d’affaires, qu’en Picardie, avec une part de 34 %. S’agissant de l’économie dans son ensemble, les proportions sont inférieures : 19 % en Nord-Pas de Calais et 26 % en Picardie. Les investissements américains demeurent importants. La filiale de General Mills, Häagen-Dazs, a, par exemple, injecté en 2018 17 millions d’euros dans une ligne de fabrication de mini-bâtonnets glacés à Tilloy-les-Moffaines, près d’Arras. L’entreprise exporte déjà 78 millions de litres de glaces par an dans 90 pays depuis son usine du Pas-de-Calais.
En 2018, 9 % des projets automobiles de sociétés étrangères en France se sont également portés dans les Hauts-de-France. Ainsi, l’équipementier indien Samwardhana Motherson Group, via l’acquisition de Reydel Automotive entend-il renforcer sa présence en France et l’international, tout en montant en compétence technologique.
En matière de commerce extérieur, les échanges hors Europe sont relativement faibles. Déficitaire avec l’Union européenne (UE) de 693 millions, elle l’est encore plus avec l’Asie, soit – 8,7 milliards. Le solde négatif s’est encore aggravé avec la Chine (- 5 milliards, avec 5,8 milliards d’importations et 800 millions d’exportations).
L’UE a ainsi généré près de 78 % des exportations et 65 % des importations régionales en 2018. Les principaux débouchés ont été la Belgique (10,5 milliards), l’Allemagne (8 milliards) et le Royaume-Uni (4,5 milliards). On conçoit ainsi assez facilement l’enjeu que représente le Brexit, d’autant que la région française détenait l’an dernier avec le Royaume-Uni son principal excédent commercial (2,23 milliards d’euros). À Lille, on s’inquiète.
Chiffres clés du commerce extérieur (2018)
Export : 50,9 milliards d’euros
Import : 63,4 milliards
Solde : – 12,5 milliards
Source : Direccte
Nouvelles filières et innovation
Les Hauts-de-France sont une « région Phoenix », estime André-Paul Leclercq, conseiller régional chargé des Relations avec les entreprises. Ce membre de la famille Mulliez, ancien de chez Decathlon et Auchan ayant bataillé à Hong Kong, en Pologne, en Roumanie ou encore en Ukraine, connaît bien les mues industrielles de sa région ces 70 dernières années.
Si la prospérité n’est plus dans les houilles et le textile comme par le passé, l’agroalimentaire, l’automobile, le ferroviaire, l’industrie en général, demeurent des points forts attirant les investisseurs du monde entier. À côté, d’autres secteurs émergent, comme la cybersécurité, l’e-commerce et les industries créatives, avec, notamment, le pôle cinématographique, soutenu par les fonds de la plateforme Pictanovo.
La fusion entre Nord Pas-de Calais et Picardie apporte aussi une nouvelle dimension à la région. Pour en profiter, le regroupement des pôles de compétitivité locaux a été encouragé. En juillet, le pôle de compétitivité NSL (Nutrition Santé Longévité) et le Clubster Santé, réseau des entreprises de bio-santé régionales, ont donné naissance à Clubster NSL (plus de 1 000 entreprises et 30 000 salariés).
Cinq mois auparavant, le pôle nord-européen référent des nouvelles industries de transformation des matériaux, EuraMaterials, est né du rapprochement des structures d’innovation Up-tex, Innotex et Matikem (250 membres, 200 entreprises).
Enfin, la constitution de la Team France Export, mêlant experts sectoriels de Business France et territoriaux des CCI, est sur les rails, avec la validation récemment d’un programme de formation au commerce. « Nous sommes une région de commerçants », rappelle André-Paul Leclercq, faisant allusion à la vente par correspondance, une tradition dans le Nord Pas-de-Calais.
Attractivité : priorité aux pays voisins
Agence de promotion économique internationale des Hauts-de-France, Nord France Invest creuse son sillon dans les pays proches. Dans les faits, d’abord la Belgique et le Royaume-Uni, ce qui n’exclut pas le grand export à l’occasion.
Preuve en est, c’est que si le Brexit est une occasion formidable de draguer outre-manche, les Hauts de France pourraient attirer, espère t-on, entreprises de Sa Majesté et non britanniques.
En tous les cas, le « leave » au Royaume-Uni est suffisamment pris au sérieux par Xavier Bertrand pour que le président du Conseil régional réunisse régulièrement autour de lui une quarantaine de responsables, industriels et institutionnels. L’union paiera, c’est sûr, dit-on en voyant flottant l’Union Jack.
François Pargny