Aujourd’hui, pôles de compétitivité et d’excellence collaborent par-delà les frontières et certains seront présents à Futurallia. Comment ces actions aident-elles les entreprises ? Réponses avec Up-Tex, Eurasanté et le CD2E.
Up-Tex innove dans le textile
Un jour dans un colloque à Vienne, l’autre sur un salon aux États-Unis… Stéphan Vérin passe sa vie entre un train et un avion. Et pour cause, le directeur du pôle de compétitivité nordiste Up-Tex a toujours misé sur les relations entre clusters.
Il faut dire que le pôle cultive l’ambition de devenir « le » centre européen de référence pour les matériaux textiles innovants. « Seule la collaboration nous permettra d’atteindre la taille critique qui fera de nous un acteur européen incontournable », résume Stéphan Vérin. Après Centexbel à Gand en Belgique, Up-Tex s’est progressivement rapproché d’autres clusters partenaires en Suède, au Royaume-Uni, en Tchéquie, en Allemagne, en Italie, en Espagne… Et le pôle de compétitivité ne s’arrête pas en si bon chemin. « En septembre prochain démarrera un “World Class Cluster”, né de la mise en réseau de huit clusters européens », annonce Stéphan Vérin. L’objectif reste d’accompagner les PME à l’international sur des marchés d’envergure comme le Canada, le Brésil, l’Asie ou le Maghreb. « Nous y mènerons une réflexion sur le rôle des clusters dans l’accompagnement des industries émergentes. Nous rejoindrons également l’European Cluster Observatory. »
En amont, Up-Tex avait déjà initié d’autres projets d’inter-clustering, comme Crosstexnet. Il s’agit d’un réseau de 17 partenaires en Europe et un moyen de financer les travaux collaboratifs sur les textiles innovants pour les entreprises de moins de 2 000 salariés. « Sur 56 dossiers déposés, nous avons obtenu 26 subventions, impliquant 79 PME réparties dans 11 États membres », se réjouit Stéphan Vérin.
Deux de ces projets ont remporté un franc succès. Lancé en 2008, Dimetex (Dispositifs médicaux textiles) a favorisé les rapprochements entre près de 250 entreprises françaises et belges pour œuvrer sur 18 projets de textiles santé à forte valeur ajoutée. Tex4Sco (Advanced Textile Solutions for Sustainable Construction), de son côté, a fait travailler main dans la main six PME françaises et six PME flamandes autour des matériaux textiles de construction durable…
Gaëtane Deljurie
Un label européen pour PME Eurêka
Autre exemple de résultats de l’inter-clustering : le label européen pour PME Eurêka. « Concrètement, Eurasanté s’est impliqué dans la création d’un label permettant de répondre plus facilement aux appels à projets », souligne le directeur général d’Eurasanté. Pour certains chefs d’entreprise, cela s’est traduit par un précieux gain de temps.
« Le montage d’un dossier Eurêka est relativement simple parce qu’il n’y a pas d’appels d’offres et parce qu’il est possible de faire des remodelages du projet en cours de route », expliquait Alexandre Templier, directeur général de la société Surgiview (Paris), lors d’un colloque bilan organisé à Lille. Sans oublier qu’il n’aura fallu que sept mois entre le dépôt du dossier et l’obtention des financements. « Le label Eurêka apporte également un crédit face à des investisseurs potentiels et un rayonnement assez intéressant du projet dans la presse spécialisée. » Fort de ce succès, cette année, le programme Eurêka a donné naissance à Eurostars, pour soutenir les PME innovantes, déjà impliquées dans des projets collaboratifs et désireuses de réaliser d’importants investissements en recherche et développement.
T. B.
Eurasanté soutient les biotechnologies
« Dès 2000, Eurasanté, agence pour le développement économique du secteur santé de Lille Nord – Pas-de-Calais, a parié sur l’inter-clustering pour soutenir l’export », se souvient Étienne Vervaecke, son directeur général.
Cinq ans plus tard, la labellisation du pôle de compétitivité Nutrition-Santé-Longévité a permis d’augmenter considérablement les moyens et donc de chouchouter l’inter-clustering. Pour preuve, Biosmile, un pôle transnational spécialisé dans l’industrie des biotechnologies, soutenu par l’Europe à travers le programme Interreg. Le projet englobe l’Angleterre du Sud-Est (Kent et Sussex), la Flandre belge, le Nord de la France et la région transfrontalière allemande-Rhénanie du Nord. Non seulement l’initiative a mis en réseau les start-up et entreprises ayant pignon sur rue avec universités et centres de recherches spécialisées, mais Biosmile a aussi permis d’augmenter l’intérêt des investisseurs, en menant une campagne de promotion commune. « Cette zone géographique en forme de croissant a donné naissance à six ou sept projets d’innovation collaborative », poursuit Étienne Vervaecke.
Toujours dans la mutualisation des moyens et des ressources, Biomat-IN est né du rapprochement de cinq clusters européens (Up-Tex et Eurasanté à Lille, Atlanpole Biotherapies à Nantes, Bioregio Stern en Allemagne, Medilinkem au Royaume-Uni, LIOF aux Pays-Bas). Son objectif ? Favoriser l’innovation en matière de biomatériaux dans le secteur des implants médicaux. « Nous avons même mis en place un système de vouchers, sorte de chèques recherche, pour que les PME puissent se faire financer leurs recherches sous contrats », conclut Étienne Vervaecke.
L’inter-clustering permet aussi des débouchés. « Nous gardons à l’esprit les relations inter-groupements d’entreprises jusque dans la co-organisation de grands événements », sourit le directeur général d’Eurasanté. À l’image de Biofit, l’importante manifestation de la biotech organisé tous les deux ans à Lille, auxquels sont invités les clusters wallons et néerlandais. Ou encore de NutrEvent, rendez-vous du monde de la science co-organisé avec un important cluster bruxellois. « Certes, nous restons très orientés Europe du Nord, mais, dans notre domaine, il est plus facile de collaborer si nous sommes plus proches géographiquement. Même si cela ne nous empêche pas de rester connectés au monde », conclut Étienne Vervaecke.
G. D.
CD2E : un modèle pour les éco-entreprises
À Loos-en-Gohelle, dans le Pas-de-Calais, le centre de développement des éco-entreprises CD2E fait aujourd’hui figure d’exemple à travers la France.
« Nous devons clairement notre réussite à notre volonté de travailler de cluster à cluster, résume Christian Traisnel, son directeur. Le CD2E a d’ailleurs rejoint le Global Cleantech Cluster Association (GCCA), le cluster mondial des entreprises dites « cleantech », concernant les technologies à valeur ajoutée pour l’environnement. « Plutôt que de multiplier les missions, nous essayons de trouver des structures partenaires, ce qui peut faire naître des complémentarités. » Résultat : plusieurs accords de partenariat ont été signés entre le CD2E et un cluster en émergence de la région du Minas Gerais au Brésil, mais aussi avec le Centre de transfert technologique en écologie industrielle (CTTEI) du Québec (Canada). « Terra Nova, entreprise nordiste spécialisée dans le recyclage de cartes électroniques d’ordinateurs, d’appareils ménagers ou de téléviseurs, envisage depuis une implantation au Québec », souligne Christian Traisnel.
Quant au Brésil, « le pays est plus demandeur de transfert de technologies que d’implantation d’entreprises, fait remarquer Christian Traisnel. Reste donc à voir comment nous pouvons accompagner une entreprise sur ces marchés, en nous assurant que les accords de partenariat sont correctement verrouillés. »
D’autres projets, avec le Maghreb, semblent d’ailleurs en bonne voie. « L’ONU nous demande de travailler avec la Tunisie et le Maroc, pays qui ont besoin d’éco-entreprises maîtrisant le recyclage des déchets, le traitement de l’eau et les éco-matériaux. S’installer dans un pays étranger est forcément plus facile dans le cadre d’un partenariat que pour une création pure. Non seulement les processus s’accélèrent, mais la connaissance fine des marchés est un indéniable atout. »
G. D.