Autonome depuis 2006, le Grand port maritime (GPM) de La Rochelle mise sur l’optimisation de son espace foncier et le développement de ses infrastructures pour servir les besoins de ses clients et diversifier les trafics.
Le port de La Rochelle est essentiellement un port de vracs, avec pour principaux trafics, celui des céréales oléagineux, qui représentent entre 40 et 45 % du trafic portuaire selon les années. Puis viennent les produits pétroliers (de l’ordre de 30 %), les vracs agricoles, les produits forestiers… Bien qu’en progression, le trafic de conteneurs est encore modeste (9 071 EVP en 2016). Enfin, le trafic des croisières est en fort développement : 31 paquebots (+ 35 %) et 42 000 passagers (+ 61 %) en 2016.
Pour le fret, avec un trafic portuaire total qui s’établit à 9, 2 Mt, l’année 2016 a été marquée par la très mauvaise campagne céréalière de l’été 2016, qui a généré une chute (très conjoncturelle) de 15 % du trafic des céréales (à 3,7 Mt). Mais les autres filières ont poursuivi leur dynamique de croissance avec une augmentation moyenne de 1,6 %. À noter, comme à Nantes Saint-Nazaire, un développement du trafic de colis lourds, notamment d’éléments d’éoliennes.
Parmi les atouts : c’est un port en eau profonde, permettant d’accueillir des navires ayant un fort tirant d’eau. L’accès maritime est facilité, pas de chenal d’accès à remonter. Autre point fort : la présence d’une place portuaire bénéficiant d’une communauté dynamique. Une forte synergie existe en effet entre le privé et le public, entre l’Union maritime qui fédère quasiment toutes les entreprises et le port. « Nous fonctionnons donc très bien, que ce soit en matière d’investissement, que ce soit en matière de promotion. Il y a ici une communauté portuaire très dynamique », admet Michel Puyrazat, président du directoire du GPM de La Rochelle.
En revanche, l’une des faiblesses, c’est le milieu naturel qui est sensible, avec en particulier le parc naturel marin et un certain nombre d’autres activités liées à la mer, proximité avec l’île de Ré, avec la ville de La Rochelle…
Autre point faible : La Rochelle est un port compact, avec peu de foncier disponible, comparé aux autres ports. Du coup, les charges sont moindres, mais l’espace manque… Voilà ce qui explique l’existence de tout un espace en cours d’expansion : la Repentie, avec son terre-plein de 35 ha appelé à accueillir de nouvelles activités du port.
L’optimisation de l’espace passe par des regroupements d’activités
De fait, dans le projet stratégique établi sur 5 ans (mi 2014 à mi 2019), vu que l’espace est contraint, une des priorités est d’optimiser l’utilisation de l’espace foncier. D’où des regroupements d’activités qui facilitent la manutention portuaire. Un autre enjeu consiste à poursuivre le développement de l’activité : un nouveau quai de 200 m a été réalisé l’an dernier et une consultation a été lancée pour réaliser un nouveau quai au cours des prochaines années.
« On est donc en train d’optimiser cet espace foncier en réalisant des infrastructures foncières encore plus importantes afin de pouvoir y développer de nouvelles activités, se diversifier, en particulier vers l’activité conteneurs. À cet égard, il faudra travailler sur la desserte maritime, se connecter à des liaisons internationales importantes » commente Michel Puyrazat.
Autant de priorités qui sont intégrées au projet stratégique. Ce dernier regroupe 5 axes, donc 5 ambitions, dont un axe interne concernant l’établissement lui-même.
Premier axe : doter le grand ouest d’une plate-forme industrielle portuaire à haute valeur ajoutée, avec de nouvelles infrastructures maritimes. Le nouveau quai inauguré l’an passé en fait partie. De nouvelles filières sont développées, notamment celle des éoliennes : pour les sites éoliens off-shore qui ont fait l’objet de l’attribution par l’État à des consortiums, le port de La Rochelle veut offrir des solutions logistiques (stockage des pales ou des rotors, assemblage des éléments dans un hub logistique…). Il profitera ainsi de nouveaux espaces en cours de réalisations – comme les 35 ha de la Repentie – pour faciliter demain le développement de ces sites éoliens offshore.
Il ne s’agit pas ici d’être en compétition avec les autres ports (Nantes Saint-Nazaire…), mais en complémentarité de façon à mettre à disposition, des surfaces, notamment pour les fondations des sites déjà attribués, ou ceux résultant des prochains appels d’offres (au large du site d’Oléron). Il s’agit aussi de créer des filières nouvelles comme la réparation navale ou le refit de méga-yachts (ceux de plus de 80 m) qui représente autant d’activités (jusqu’alors souvent installées en Méditerranée) à haute valeur ajoutée.
Nouveau schéma directeur, hinterland et RSE
Deuxième axe : la préparation de l’avenir, en dotant le port d’un nouveau schéma directeur sur le long terme. Telle est la démarche « Objectif 2040 » : « Nous engageons une réflexion prospective pour imaginer collectivement, avec l’ensemble des parties prenantes, ce que pourrait être le port de demain, explique Michel Puyrazat. Aujourd’hui, on s’inscrit dans un schéma directeur du développement portuaire qui a été imaginé par nos prédécesseurs dans les années 1970-1980. On est toujours en train de le mettre en œuvre. Il faut que nous remettions dans la posture de réflexion prospective afin de préparer l’avenir en imaginant collectivement ce que sera le port dans 25 ans ».
S’y ajoute par ailleurs tout ce qui concerne l’entretien du patrimoine.
Troisième axe : la logistique terrestre et maritime. L’enjeu est de poursuivre le développement de la chaîne logistique de bout en bout, donc de l’hinterland, la partie terrestre des marchandises qui transitent par le port, venant par la mer, ou repartant par la mer.
Ainsi, l’hinterland, pour les céréales, se trouve en Poitou Charente. Le port de La Rochelle est aussi le premier port français pour la pâte à papier (695 000 t) qui provient d’Amérique du Sud et du Canada (et le second européen), avec une desserte jusque dans la région Rhône Alpes.
L’enjeu est de faire en sorte que l’on puisse favoriser cette logistique et que le port ne soit pas un simple lieu de passage. Il faut que toute la chaîne logistique, depuis le client jusqu’au destinataire du trafic soit satisfaite. Pour ce faire, le port travaille avec SNCF Réseau pour faire en sorte que l’acheminement ferroviaire se passe bien. Il a même été amené à créer un opérateur ferroviaire portuaire pour développer l’offre de services. L’objectif est aussi de faire en sorte que le port soit bien connecté par la voie maritime, à un grand port tel que Le Havre.
Quatrième axe : Le développement durable et la compétitivité du port. La place portuaire qui se positionne dans un site touristique, proche de la ville, positionné dans un milieu sensible, se veut dynamique et compétitive… « Tous ensemble ! Celui qui décharge, le pilote qui va chercher le navire, le remorqueur qui tire le navire ou le pousse, le lamaneur chargé des opérations d’amarrage ou d’appareillage des navires… Nous sommes tous dépendant les uns des autres » insiste Michel Puyrazat.
Dans ce contexte, les engagements de type responsabilité sociale et environnementale (RSE) sont stratégiques. « Nous sommes le seul port à être RSE (ISO 26000) » souligne encore le dirigeant. Mais l’ensemble de la place portuaire est engagé dans cette démarche. « Nous avons notamment signé une charte de développement durable avec l’Union Maritime qui fédère environ 90 % des entreprises de la place portuaire : l’objectif est de faire en sorte que celles-ci se dirigent toutes vers des actions de type RSE, à l’instar du port qui l’a fait voici plusieurs années ».
Pour les opérations de développement prévues dans ce projet stratégique, on prévoit environ 120 millions d’euros sur la période 2014-2019… Ce qui va se traduire par d’importants investissements : un nouveau terminal à réaliser, la préparation de la desserte (infrastructures routières) sur les 35 ha de La Repentie, des opérations sur la partie pôle de réparation et constructions navales pour le refit de méga yachts… Et bien sûr aussi des opérations d’entretien du patrimoine.
Jean-Claude Festinger
Une dynamique d’investissement public-privés
Au cours des sept dernières années les principaux investissements du port et de ses partenaires ont atteint environ 120 millions d’euros. Dans le même temps, le privé a mis à peu près 100 millions d’euros pour des opérations conjointes. Exemple : dès qu’un quai était terminé, le privé investissait dans des plateformes ou des bâtiments pour développer l’activité portuaire. Il y a donc eu une vraie dynamique d’investissements qui a permis au port de passer de 7 à 10 Mt de trafic sur la même période. Une illustration de la dynamique de la communauté portuaire à La Rochelle, et ce, grâce aux investissements effectués par le port, par l’État, les collectivités territoriales et l’Europe.