Le Moci. Pour 2017, Coface prévoit une croissance de l’économie mondiale de 2,7 % et une progression du commerce mondial de 2,4 % (après 1,7 % en 2016). Quels secteurs en profiteront le mieux ?
Paul Chollet. Mondialement, trois secteurs se porteront bien ou mieux : la pharmacie, les équipements de haute technologie et, ce qui peut surprendre a priori, l’agriculture.
Pour le premier, la tendance n’est pas nouvelle. Se cumulent la montée de la demande de la classe moyenne dans les pays émergents et la profitabilité au beau fixe des grandes entreprises dans les pays avancés, où, si des mesures contraignantes devraient être décidées comme on en parle aujourd’hui, ce ne serait certainement pas cette année, car les lobbies y sont puissants et, au mieux, on peut prévoir qu’il faudra du temps pour changer.
Dans la technologie, alors que la rentabilité baisse dans les produits de consommation, type smartphone, depuis 2015, pour les appareils de production, le dynamisme des ventes est notoire depuis un an. Quant à l’agriculture, il s’agit d’un rebond technique, après les pertes en Afrique, en Amérique latine et en Inde consécutives au passage du phénomène El Nino. En 2016, les stocks, sauf dans les céréales, ont été réduits. Après la crise, il faut les reconstituer, d’autant que le prix des matières premières est plutôt bas.
Le Moci. Vous n’avez pas cité l’automobile, qui était plutôt un secteur en forme en 2016. Qu’en est-il exactement ?
P. C. Nous sommes plus inquiets qu’avant. En Europe, Coface est plutôt positif, avec une hausse des immatriculations à prévoir en Europe du Sud, notamment en France, et une stabilisation en Allemagne et au Royaume-Uni, dont les marchés, selon nous, ont atteint leur pic.
En revanche, aux États-Unis, nous prévoyons une diminution de 1,6 % des immatriculations, car l’économie américaine subit un retournement de cycle depuis un an. Après avoir crû de 6 % en 2015, les ventes automobiles ne connaîtront qu’un modeste + 0,7 % cette année. La performance en Chine sera aussi moindre, avec + 5 % au lieu de + 13,6 % en 2016, grevée par un moindre soutien de l’État à l’achat de petites cylindrées.
Le Moci. Les cours du pétrole sont un peu remontés. Quelles sont vos prévisions pour le secteur de l’énergie ?
P. C. Pour l’énergie, nous restons vigilants. Pour autant, après l’appel d’air du quatrième trimestre 2016, Coface pense que les cours du pétrole demeureront sous la barre des 60 dollars, avec une moyenne de 55 dollars. Les États-Unis se remettent à produire du pétrole de schiste. En mai, il n’y avait que 316 puits en activité, ce chiffre est passé à 522 au 1er janvier, soit un bond de 65 %. Et comme il s’agit d’un produit pour lequel le rendement est rapide, il peut encore augmenter sensiblement. En octobre 2014, rappelez-vous, le nombre de puits actifs était de 1 600.
Le Moci. Parmi les secteurs qui se portaient mal, figuraient la métallurgie et surtout
l’habillement et le papier. Est-ce toujours le cas ?
P. C. C’est un peu mieux pour la métallurgie, qui est en convalescence. Les stocks diminuent, quelques mines et usines ont été fermées en Chine, ce qui pousse à la hausse les prix. En 2017, la production chinoise va reprendre et les prix vont stagner dans le monde.
Quant au papier et à l’habillement, la situation est toujours mauvaise. Dans le papier, en raison de la montée en puissance du numérique. Dans l’habillement, du fait de la concurrence d’Internet et de l’appauvrissement des classes moyennes aux États-Unis et en Europe. Le consommateur y achète effectivement plus à travers Internet et recherche plus qu’autrefois des articles bas de gamme. D’après le FMI, aux États-Unis, une année de consommation a été perdue depuis 1998, ce qui représente 3,5 % de produit intérieur brut. En 2011, sur 100 ventes au détail, 49 se faisaient en magasin. Ce chiffre est tombé à 20 l’an dernier !
Propos recueillis par François Pargny