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Au tour des conseillers CCEF

Je suis un(e) entrepreneur (e), en première ligne dans la mondialisation, j’ai été nommé(e) conseiller(e) du commerce extérieur de la France (CCEF) pour trois ans par le Premier ministre sur proposition du ministre du Commerce extérieur, pour ma compétence et mon expérience internationales.

Je paye une cotisation annuelle de 880 euros pour apporter mon soutien bénévole aux pouvoirs publics. Nécessairement issu(e) du secteur privé, je peux exercer mon mandat dans un pays étranger ou en France. À l’étranger, je fais partie d’un réseau de CCEF, organisé par pays (les « sections »). À nous tous, nous maillons presque toutes les zones et les secteurs économiques du monde. Nous disposons de beaucoup d’informations de terrain et quand elles ne sont pas strictement réservées à nos entreprises, nous les partageons avec le chef de la Mission économique et l’ambassadeur. En France, je vis en région ou à Paris. J’ai vocation à repartir à l’étranger ou bien je m’occupe des affaires internationales de mon entreprise. Je m’implique dans mon activité de CCEF, je donne de mon temps, je participe à des réflexions, j’apporte des idées, je fais remonter des suggestions… mais je n’ai pas le sentiment qu’elles arrivent jamais à infléchir quelque politique que ce soit ; parviennent-elles même aux autorités concernées ? 
En bref, je doute de notre utilité de CCEF aujourd’hui. Sommes-nous encore crédibles ?

J’ai fait un rêve…

Le gouvernement me demande de l’aider à orienter son action en matière d’échanges internationaux. De l’étranger, j’envoie des informations de terrain sur mon pays de résidence au Comité national des CCEF (CNCCEF) à Paris car je sais que ces informations seront utilisées, d’un côté, par les ministères de l’Économie et des Affaires étrangères pour contribuer aux stratégies de l’État, et d’un autre, par le Comité national qui, dans un système d’intelligence économique bien compris, en tirera régulièrement de courtes synthèses et parfois des alertes, destinées aux ministères et aux organisations professionnelles (Medef, CGPME, etc.). Avec mes collègues, nous favorisons l’accès des femmes à des postes internationaux.
 
En France, ma valeur ajoutée de CCEF repose, comme à l’étranger, sur ma capacité à faire remonter des informations utiles, par exemple sur les PME qu’il faut encourager à exporter, sur les procédures de soutien à améliorer… Je peux aussi aller former des jeunes dans des établissements d’enseignement, devenir parrain d’une entreprise et promouvoir l’utilisation des volontaires internationaux en entreprise (VIE).
 
Dans tous les cas, je ne suis pas un agent de l’État mais un homme ou femme d’entreprise à son service, capable de propositions techniques et politiques, désireux d’être consulté et associé aux décisions stratégiques pour le commerce international, dans une complémentarité public-privé bien comprise. Toujours dans mon rêve, le CNCCEF est une structure de matière grise flexible, reposant sur une gouvernance démocratique et travaillant sur des thèmes majeurs choisis avec les représentants de l’ensemble des CCEF du monde (conférence des présidents, commissions géographiques et sectorielles). Le président du CNCCEF utilise nos informations pour proposer des mesures ou des infléchissements de politiques de l’État. Il est un interlocuteur privilégié du ministre du Commerce extérieur et lui fait part des principales tendances et risques vus par des managers, zone par zone. Il veille à transmettre nos avis sur des sujets cruciaux, comme le dispositif du commerce extérieur, ce qui hélas n’a pas été fait lors de la réforme de 2005, porteuse de dérives. Également, il s’exprime dans la presse sur les sujets majeurs où nous pouvons faire entendre une voix différente et experte, comme, entre autres, la crise globale, l’euro… 
Ce rêve deviendra-t-il un jour réalité ? 

Claude Revel, avec Noël Adrian, Michel Antraigue, Jean-Marie Aoust, Bénédicte Brouard, Christine Gravisse, Louis Habib Deloncle, Marie Landel, Anne Lechaczynski, Philippe Louis Dreyfus, CCEF rénovateurs, ex-administrateurs du CNCCEF

Commentaire : il faut sauver le soldat CCEF

Il peut arriver qu’une bonne idée vieillisse mal. Celle qui consistait à mettre au service de l’export des citoyens volontaires, acteurs majeurs de l’économie nationale a du mal à entrer dans le XXIe siècle.

Les conseillers du commerce extérieur de la France devraient être et, soyons justes, le sont parfois, le bras armé de notre rayonnement commercial. Au lieu de quoi, on entend de plus en plus souvent dire, et ici par eux-mêmes, que leur parole et leur bonne volonté se perdent dans les méandres d’un dispositif où la dictature de diverses commissions et comités Théodule, prennent trop souvent le pas sur les réalités du terrain.

Notre commerce extérieur n’est pas très en forme. Il devrait pouvoir compter sur ces 3 899 volontaires qui payent chaque année 880 euros de cotisations pour faire profiter leurs concitoyens néophytes de l’export d’une expérience et d’une expertise unique.

Au lieu de quoi, nous assistons à ce spectacle désolant de jeunes conseillers reconnus pour leur engagement et leur talent obligés de démissionner parce qu’ils assistent impuissants au gaspillage indifférent de cette plus que centenaire bonne idée dont la France a pourtant sacrément besoin.

Vincent Lalu

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