« Les circuits d’importation sont très atomisés au Japon. Vous pouvez rencontrer des grossistes spécialisés, par exemple dans le bio, ou non spécialisés. Et le Japon compte plus de 400 chaînes de distribution, avec des couvertures locales, régionales ou nationales », expliquait, le 7 novembre à Paris, Charles Durand, directeur Japon de l’agence de marketing agroalimentaire Sopexa.
Le plus souvent, la société exportatrice noue un partenariat avec un importateur nippon, lui-même en contact avec plusieurs grossistes et plusieurs détaillants. Autres possibilités, la société française contracte avec un importateur-grossiste, un importateur-distributeur ou encore un importateur et une chaîne de distribution. Dans ce dernier cas, c’est un partenariat quasi-exclusif. « Le Japonais ne demandera pas l’exclusivité, mais si un distributeur communique sur vos produits, il vous sera ensuite difficile de vous retirer », prévient David Rolland, chef du pôle agroalimentaire à l’agence Ubifrance Japon.
Il est donc très important dès le départ de dresser une feuille de route, un business plan qui permettre de fixer quelques étapes essentielles dans le partenariat. Dans le vin, une solution pour réduire cette difficulté peut être de créer une gamme d’étiquettes par produit et par importateur. Enfin, la société française peut choisir d’installer ses propres filiales d’importation et de distribution pour bénéficier d’un lien direct avec les points de vente.
« Dans le vin, par exemple, nous sommes sur un marché de prescription, décrit Charles Durand. Ce qui signifie qu’il faut former les professionnels et animer le réseau. » Les entreprises françaises doivent donc accepter de « donner du temps » pour informer et permettre à leurs partenaires de découvrir les produits et d’acquérir de l’expérience.
Autre préoccupation, le consommateur. « Le client n’est pas roi, il est Dieu au Japon. Et le diable est dans les détails », ajoute, très sérieux, Charles Durand. De façon très concrète, un importateur ou un distributeur ne prendra jamais livraison d’une bouteille dont l’étiquette est de travers, « même d’un millimètre, car le consommateur n’en voudrait pas », avertit le dirigeant du bureau de Sopexa à Tokyo. La clientèle japonaise est connue pour être une des plus exigeantes du monde. En 2005, le groupe Carrefour, numéro deux mondial de la distribution, a dû jeter l’éponge, faute d’avoir pris en compte les attentes de ses clients potentiels, notamment des seniors. Confronté à la concurrence du numéro un japonais Aeon, le champion français n’a jamais su s’imposer, même en améliorant la qualité de son offre.
Son réseau de huit hypermarchés était insuffisant pour lutter à armes égales. Mais, surtout, « le consommateur voulait des produits français pas chers. Or, Carrefour a proposé des produits japonais, tout en voulant se passer des intermédiaires locaux », commente Charles Durand.
Résultat : faute de s’être doté d’une plateforme logistique japonaise, le distributeur français a subi des ruptures de stock, des refus de livraison de certains fournisseurs, et ses relations avec les collectivités locales ont été difficiles. « Il faut entrer dans le moule », conseille le directeur Japon.
F. P.