La taille critique des pôles et de leurs membres est un facteur essentiel de réussite. C’est une condition pour innover et réussir à l’international. D’où l’importance des réseaux, au niveau national entre communautés d’affaires de la même filière, mais aussi à l’échelon européen.
Innover pour exporter. Les pôles de compétitivité illustrent parfaitement cette maxime. Dans les 18 comités stratégiques de filière (CSF) que Bercy a créés, « la mission d’innovation est demandée aux pôles et, de facto, l’activité internationale des PME se fait en leur sein », explique Jean-Luc Beylat, président de l’Association française des pôles de compétitivité (AFPC) et de Systematic Paris-Région, qui regroupe des compétences dans la conception, réalisation et maîtrise des systèmes complexes.
Fondé en 2012, l’AFPC est aujourd’hui l’interlocuteur de l’État et plus particulièrement de la Direction générale des entreprises (DGE). Cette reconnaissance n’empêche pas son président d’être critique vis-à-vis de l’État, « insuffisamment connecté aux Régions et dont les interactions avec l’Europe laissent encore à désirer, contrairement à ce qui existe en Allemagne ».
« Les PME aiment leurs pôles, ajoute-t-il, mais ne prennent pas en compte la nécessité qu’ils doivent avoir une portée nationale et pas seulement une dimension régionale ». D’où l’importance de créer « des interpoles ». Ces réseaux permettent, par exemple dans les logiciels embarqués et la santé, de coordonner les actions des différentes communautés d’affaires. Dans le même ordre d’idée, les pôles Mer Paca et Bretagne sont aussi engagés ensemble dans les travaux du CSF Industries de la mer.
Pour les pôles, l’innovation demeure la première des priorités. « Nous avons 10 000 entreprises innovantes. Le problème, c’est que nous n’en avons pas assez. Nos PME ne sont pas innovantes, ne vont pas à l’international, ne sont pas numérisées, alors que le cœur des PME allemandes, c’est bien l’innovation », observe Jean-Luc Beylat.
Dans la phase 4 du programme des pôles de compétitivité en 2005, lancée début 2019, deux axes forts ont été dégagés par l’État : la consolidation et la recherche de fonds européens à Bruxelles. Le premier axe résulte d’un constat : les pôles n’ont pas tous une taille critique leur permettant de remplir toutes leurs missions avec efficacité.
« Leur nombre a été considérablement réduit, il y en a moins de 50 et ce chiffre pourrait encore baisser dans l’avenir », prévoit Jean-Luc Beylat. De fait, quelques jours après cet entretien avec Le Moci, le 27 juin, les pôles de compétitivité Vegepolys et Céréales Vallée-Nutravita annonçaient leur fusion (voir encadré ci-dessous).
Cette consolidation pourrait être amplifiée par un autre phénomène : la réduction des budgets publics de moitié, tant pour les crédits de recherche que de fonctionnement. D’où la nécessité de trouver de l’argent privé et des fonds européens, quitte à constituer des alliances au niveau européen, à l’instar de Minalogic (voir l’interview de la déléguée générale Isabelle Guillaume).
Cette clusterisation apporte plusieurs avantages. La Commission européenne a confirmé son intérêt pour cette politique de clusters au niveau communautaire. Parallèlement, elle a décidé de mettre l’accent sur l’innovation dans le futur programme de recherche Digital Europe, ainsi que sur des mécanismes de développement des PME leur permettant d’atteindre la taille critique.
Or, selon le président de l’AFPC, « les clusters gold selon la Commission européenne sont presque tous français, en raison de leurs bonnes pratiques en matière de gouvernance, de représentativité de l’écosystème, de rigueur, de confidentialité des informations ou de compétence en matière de gestion des dossiers ». Un atout dans la manche des pôles français qui pourrait servir leurs membres, notamment les PME. À elles d’en profiter.
François pargny
Vegepolys Valley, un pôle végétal qui pousse dans le monde
En fusionnant, Vegepolys et Céréales Vallée-Nutravita donnent naissance à Vegepolys Valley, un pôle de compétitivité de taille mondiale dans le végétal, comptant 500 adhérents dans quatre régions : Auvergne-Rhône-Alpes, Bretagne, Centre-Val de Loire et Pays de la Loire. L’objectif est clairement de fédérer l’ensemble de la chaîne de valeur, de permettre à ses acteurs l’accès à la totalité de l’offre et d’améliorer leur compétitivité. Si l’innovation est mise en avant, un axe prioritaire est aussi l’international, à travers le pilotage de travaux de recherche et l’export. Pour y parvenir, Vegepolys Valley devra s’appuyer sur divers réseaux de partenaires (Plant InterCluster…) et des bureaux en Chine et en Amérique du Sud.