Directeur général du groupe hospitalier Paris Saint-Joseph, Jean-Patrick Lajonchère est le fédérateur de la famille de produits prioritaires à l’export « Mieux se soigner » et le correspondant Export du Comité stratégique de filière (CSF) « Industrie et technologies de la santé ».
Le Moci. Le ministère de l’Europe et des affaires étrangères vous a nommé en 2016 fédérateur de la famille de produits prioritaires à l’export « Mieux se soigner ». Quel est votre rôle ?
Jean-Patrick Lajonchère. La mission du fédérateur est de faire en sorte que toute la famille marche dans le même sens, selon les capacités et la rapidité de chacun, pour que cela constitue un peloton cohérent. Le fédérateur ne va pas faire lui-même, mais il va œuvrer pour qu’un collectif ait envie de construire ensemble. Ce collectif, cet écosystème concerne un secteur large et riche, allant de la compresse à la formation des médecins étrangers, en passant par les médicaments, le dispositif médical, la construction et l’exploitation des hôpitaux ou encore les mutuelles et les assurances. Pour opérer, les outils mis à la disposition du fédérateur par l’État sont multiples. D’abord, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères qui promeut cette démarche et met des moyens humains et techniques au service de cette cause. Puis, dans le cadre du CNI International auquel participe systématiquement le vice-président du Conseil national de l’industrie (CNI), Philippe Varin. Mais aussi le Comité stratégique de filière (CSF) « Industrie et technologies de la santé », présidé par Jean-Luc Belingard, un des 18 CSF. Il y a, ensuite, au ministère des Solidarités et de la santé le Comité stratégique des industries de la santé (CSIS), dont les mesures doivent être mises en œuvre par le CSF, selon les vœux du Premier ministre. Il y a tous les organismes touchant à l’investissement, comme l’Agence française de développement (AFD), Expertise France et pour l’accompagnement Business France qui est très dynamique en matière de santé. Aux côtés de ce dispositif riche, il y a les sociétés privées dans toute leur diversité qui consacrent des moyens à cette démarche. En 2017, l’association French Healthcare a été créée, la marque étant la propriété du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. L’association a été créée pour permettre une visibilité accrue à tous les acteurs industriels ou autres du secteur de la santé. Pour la filière, c’est un outil de reconnaissance. C’est, de façon générale, un outil de promotion de la santé à la française. D’une « petite association de boulistes » au début, l’association French Healthcare est devenue un instrument performant, qui sait fédérer et faire travailler ses membres.
Le Moci. De façon concrète, quels projets menez-vous ?
J-P. L. Le 29 juin, pour la première fois, nous avons organisé un congrès sur le diabète à Pékin. Ce type de démarche collective inédite a vocation à être démultiplié, à terme, dans de nombreux pays. En Chine, il s’agit de mettre en valeur notre savoir-faire auprès des autorités sanitaires en matière de prévention, diagnostic, traitement et chirurgie. Ce qui compte, c’est l’offre intégrée que nous sommes capables de présenter. Nous pourrions faire de même dans le futur dans l’oncologie et l’antibiorésistance, dans ces domaines les projets sont moins avancés. Nous travaillons aussi sur différents guides : les bonnes procédures pour la construction et l’exploitation hospitalière, la prise en charge des patients étrangers, où nous préparons une labellisation pour les hôpitaux. Tous les établissements hospitaliers intéressés, bien que concurrents, ont compris qu’il valait mieux travailler ensemble pour faire valoir notre savoir-faire, car la véritable compétition est à l’extérieur. Nous travaillons également en réseau avec les conseillers des Affaires sociales et les Services économiques des ambassades de France à l’étranger.
Le Moci. Récemment, vous avez été nommé correspondant Export du Comité stratégique de filière (CSF) « Industrie et technologies de la santé ». Quel est votre rôle ?
J-P. L. Les CSF sont là pour relever les grands enjeux de demain, en inscrivant des projets du futur dans les chaînes de valeur internationale. Mon travail est de fédérer les actions favorisant les exportations françaises. Cela peut passer par l’appui aux clubs Santé initiés le ministère de l’Économie et des Finances et présents dans 13 pays, comme la Chine où il est très actif. Par exemple, je me suis rendu le 23 mai au salon Hospitalar à Sao Paulo au Brésil. Pour le club Santé, a émergé l’idée que les membres se rapprochent d’un lobbyiste pour leur permettre de faire passer leurs idées quant à l’accès brésilien pour nos entreprises. Les clubs Santé sont des relais sur place de l’écosystème santé. Ils permettent à des membres de l’Équipe de France de se rencontrer, d’échanger des informations. Nos entrepreneurs peuvent, en groupe, élaborer et proposer des projets à des responsables des États où nos clubs sont implantés. Il faudrait peut-être aussi que les clubs Santé aient plus de rapports avec les grandes régions de France, comme les Pays de la Loire, Auvergne Rhône Alpes, Nouvelle Aquitaine, Hauts de France… C’est à construire.
Le Moci. Êtes-vous amené à beaucoup vous déplacer ?
J-P. L. J’ai visité une douzaine de pays, le sillon doit être creusé. Je me suis rendu trois fois au Brésil, je dois retourner au Maroc et en Tunisie, peut-être aussi au Vietnam. À titre personnel, j’estime qu’il faut privilégier des pays avec une proximité culturelle et de langue, comme en Afrique du Nord et de l’Ouest, et le Vietnam où beaucoup de médecins ont été formés par nos soins. Il y a aussi des pôles géographiques à développer avec des partenaires étrangers dans le Golfe et en Russie. Comme directeur d’hôpital, je me rends régulièrement en janvier au salon Arab Health à Dubaï. Quant à la Chine, nous suivrons attentivement, d’autant que la ministre des Solidarités et de la santé, Agnès Buzyn, doit s’y rendre prochainement.
Mais n’oublions pas que toute mon action n’a qu’un seul objectif : être au service des entreprises et des intérêts de notre pays et donc s’inscrire dans les priorités institutionnelles débattues avec les industriels.
Propos recueillis par François Pargny