Transfert des garanties publiques de Coface à Bpifrance, assouplissement des règles de part française, clarification des missions de Business France et Sopexa dans l’agroalimentaire, premiers parcours uniques de l’export à l’étranger, nouvelles donnes régionales… Les changements marquants pour les politiques publiques d’aides à l’export auront encore été nombreux en 2015 et 2016, notamment pour les PME et ETI. Voici les repères indispensables.
1/ Crédit export : la page Coface se tourne
Une page de l’histoire du crédit export français se tourne, parler de contrats « cofacés » ne sera bientôt plus d’actualité : l’accord pour le transfert effectif de la gestion des garanties publiques export de Coface à Bpifrance a été annoncé dans un communiqué commun des ministères financiers de Bercy et de Coface le 29 juillet 2015 avec un objectif de réalisation effective au premier semestre 2016. Le projet de transfert a été intégré dans le projet de loi de finance rectificative pour 2015 (II Garanties, article 103 « Réforme du dispositif de financement des exportations ») adopté le 29 décembre 2015. Ses modalités pratiques ont été actées dans un accord formel signé le 18 avril 2016 par Coface et Bpifrance avec un objectif de réalisation avant la fin de l’année 2016. Autrement dit, au moment où nous bouclons ce guide, le transfert est en cours.
Comment cela va-t-il se passer ?
Concrètement, l’ensemble des activités, systèmes informatiques et personnels relevant de la Direction des garanties publiques (DGP) de Coface (Coface Garanties publiques) sont repris par le groupe de la Banque publique dans une filiale spécialement créée pour l’occasion : Bpifrance Assurance export. Quelque 240 agents au total sont concernés par ce transfert et doivent rejoindre leurs nouveaux bureaux proches du centre de Paris. Durant la période de transition, Coface apporte son concours pour assurer la continuité des opérations avec les exportateurs sur l’ensemble des produits de la gamme.
À noter qu’un changement important a été introduit dans le cadre de cette réforme : c’est désormais l’État en direct qui apportera sa garantie, alors qu’auparavant, il garantissait l’opérateur. Une garantie d’État directe succède donc à une garantie indirecte. Une clarification qui doit, pour Bercy, améliorer la compétitivité des offres commerciales et financières des exportateurs français.
Repère
PME, ETI : définitions
PME et ETI sont les cibles des dispositifs publics d’aides à l’export. Sont considérées comme des ETI (entreprises de taille intermédiaire) les entreprises qui ont entre 250 et 4 999 salariés et dont le chiffre d’affaires est compris entre 50 millions d’euros et 1,5 milliard d’euros.
Les PME sont dans la catégorie en dessous : moins de 250 salariés et chiffre d’affaires inférieur à 50 millions d’euros.
2/ La réforme de la part française
Un fort assouplissement des règles de part française appliquées par les pouvoirs publics dans les projets sollicitant leur soutien a été annoncé en février 2016 par le ministre de l’Économie, de l’industrie et du numérique, Emmanuel Macron.
Elle s’est traduite par une réduction drastique du « seuil d’éligibilité » de plusieurs instruments : de 50 à 20 % pour les garanties publiques, de 60 à 50 % pour les prêts non concessionnels du Trésor et de 70 à 60 % pour les prêts concessionnels du Trésor.
Autrement dit, et pour ne fournir qu’un seul exemple, pour être éligible à une assurance-crédit export publique française, un projet de contrat d’exportation n’aura plus besoin de justifier d’au moins 50 % de contenu français (biens ou services) mais de seulement 20 %. Cette réforme doit permettre, pour les ministères de Bercy, de soutenir « davantage de projets » dans un contexte marqué par l’internationalisation des chaînes de production de bon nombre d’entreprises françaises, en particulier à l’échelle européenne.
Cette annonce a donc été bien accueillie par les milieux d’affaires français qui réclamaient une telle réforme depuis longtemps. D’autant plus qu’elle s’est accompagnée de la promesse par la DG Trésor d’une approche plus flexible, au cas par cas, lors de l’instruction des dossiers de demande. Sont notamment pris en compte « l’intérêt industriel » du projet, en incluant des paramètres tels que la R&D et la marge brute dégagées en France, de même que l’effort de sous-traitance en France.
3/ Dans l’agroalimentaire, le BtoB à Business France, le BtoC à Sopexa
La rivalité historique de l’établissement public Business France et de la société privée Sopexa sur le marché de l’accompagnement des entreprises de l’agroalimentaire subventionné par les pouvoirs publics, c’est fini. Le 3 mars 2016, à l’occasion du Salon international de l’Agriculture (SIA), le ministre de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt (Maaf) Stéphane Le Foll a signé une convention avec chacun des opérateurs clarifiant la répartition des tâches : à Business France le premier rôle en tant qu’opérateur pour les actions de type BtoB (inter-entreprises) que subventionne le Maaf pour promouvoir les filières françaises à l’export, en lieu et place de Sopexa, qui demeurera l’opérateur de l’État pour les actions de type marketing BtoC à l’international.
Cette signature est la traduction formelle d’orientations officialisées à l’automne puis confirmées en décembre 2015 pour simplifier le dispositif de soutien à l’export du secteur agroalimentaire.
Concrètement, une convention prévoit qu’à compter du 1er janvier 2016, Business France sera « l’opérateur de référence des actions de mise en relation d’affaires (mini-expositions pour les vins et rencontres d’acheteurs) ». La deuxième convention prévoit qu’à partir du 1er janvier 2017, les « pavillons France » sur les salons internationaux agroalimentaires seront réalisés par Business France. Sopexa, pour sa part, sera plus précisément chargée de « la promotion de l’image des produits agroalimentaires français » auprès des consommateurs.
4/ Le « parcours unique de l’export » concrétisé pour 40 marchés étrangers
Le « parcours unique de l’export » pour les PME, c’est le rêve de ne pas avoir à jongler entre différents organismes et interlocuteurs pour obtenir un accompagnement dans la durée, du diagnostic export à la mission de prospection voire d’implantation à l’étranger. Bref, un parcours simplifié et sans rupture, un « continuum » de services sans à-coups.
Un an après l’accord-cadre de partenariat – privilégié mais non-exclusif – signé entre l’agence nationale Business France, CCI international – le réseau mutualisé d’accompagnement à l’export des CCI en France –, et CCI France international – qui regroupe les CCI françaises à l’étranger (CCIFI) – 40 conventions par pays avaient été signées, la quarantième ayant été conclue en Suisse entre la CCIFI et le bureau de Business France.
Dans l’Hexagone, les accords de coopération entre Business France et les CCI respectent les priorités de chaque région, dotée d’un plan régional d’internationalisation des entreprises (PRIE) et demain d’un SRDII (Schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation). C’est ainsi que 638 entreprises étaient déjà accompagnées fin mars 2016 grâce à ce parcours simplifiés.
Que contiennent les conventions ? Sous réserve des spécificités locales, le réseau consulaire en France prend en charge la détection des PME, les diagnostics export, la validation et la structuration de leur projet, et l’identification des pays cibles. Business France se concentre sur la projection à l’international (missions découvertes, salons, mise en relation), et les CCIFI interviennent pour l’accompagnement sur place et la pérennisation de l’implantation à l’étranger (hébergement, domiciliation, coaching, conseil, etc.).
L’objectif fixé aux signataires par les pouvoirs publics d’ici 2017 : faire bénéficier 3 000 entreprises de ce parcours, en priorité issues des filières prioritaires à l’export, en vue de développer au moins 1 000 courants d’affaires.
Repère
Les 40 destinations du « parcours unique »
Début avril 2016, des conventions de partenariats avaient été signées par Business France et les CCI françaises à l’étranger (CCIFI) pour la mise en place d’un catalogue commun de prestations dans 40 pays. Voici la liste par grande zone :
• Afrique : Algérie, Afrique du Sud, Côte d’Ivoire, Égypte, Tunisie
• Amérique du nord :
• Amérique du sud : Argentine, Brésil, Chili, Colombie, Mexique
• Asie-Océanie : Australie, Birmanie (Myanmar), Chine, Corée du Sud, Indonésie, Philippines, Thaïlande, Vietnam
• Europe : Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Danemark, Finlande, Hongrie, Irlande, Italie, Luxembourg, Norvège, Pays-Bas, Portugal, République Tchèque, Roumanie, Royaume-Uni, Suède, Turquie, Ukraine
• Moyen-Orient : Israël
5/ Nouvelles grandes régions, nouvelles stratégies ?
Les élections régionales de décembre 2015 ont été marquées à la fois par la fusion de certaines régions – dont le nombre est passé de 22 à 13 – dans le cadre de la réforme territoriale et par des changements de majorité dans une partie des conseils régionaux. Dans ce contexte, l’année 2016 devait être une année de transition avant d’y voir plus clair dans les orientations des nouveaux exécutifs en matière de soutien au développement international des entreprises. Dans les régions et grandes régions ayant conservé la même majorité (6 sur 13) on peut parier sur une certaine continuité des orientations. Dans celles ayant changé de majorité (les 7 autres), des chantiers d’études ont été engagés pour évaluer l’existant en vue de préparer les futurs Schémas régionaux de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (SDEII) prévus par la réforme territoriale, et dans lesquels seront intégrés les actuels plans régionaux d’internationalisation des entreprises (PRIE).
Rappelons que la Loi portant Nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) a renforcé le rôle des Régions en matière de stratégie de développement économique, de soutien aux investissements étrangers, au commerce extérieur et à l’internationalisation des entreprises. Elles seront aussi les entités clés pour gérer les fonds européens (voir deuxième partie de ce guide). Les écosystèmes régionaux du soutien à l’export vont devoir s’adapter.
Christine Gilguy
Et aussi…
Moins connues que leurs aînées (Business France et Bpifrance, pour les plus populaires), de nouvelles agences ont fait leur apparition dans l’écosystème du soutien au commerce extérieur français et, plus généralement, de la diplomatie économique. Elles doivent donc être connues des entreprises.
Expertise France (www.expertisefrance.fr), l’opérateur pivot de l’assistance technique publique française sur les marchés internationaux. Expertise France a vocation à être le porte-parole de l’expertise française pour répondre à des appels d’offres internationaux de plus en plus gros, et faisant appel à des savoir-faire de plus en plus transversaux.
L’Agence française de développement (AFD) (www.afd.fr), opérateur pivot de la politique d’aide au développement française, s’est, elle, rapprochée des deux principaux opérateurs du dispositif public de soutien des entreprises à l’export Bpifrance et Business France. L’AFD coopère avec la banque publique d’investissement Bpifrance, avec qui elle a signé le 19 décembre 2014 un accord-cadre de partenariat d’une durée initiale de deux ans, qui doit permettre aux entreprises françaises de prendre davantage part aux projets de développement dans les pays où intervient l’AFD.
Et avec Business France, l’AFD a signé, le 24 avril 2015, un accord-cadre de partenariat pour améliorer la promotion du savoir-faire français dans les réponses aux besoins en matière de développement des pays du Sud. Cet accord vise à sensibiliser et mobiliser le plus en amont possible les entreprises françaises susceptibles de se positionner sur les projets faisant l’objet d’une intervention du groupe AFD.
Douane : du sur mesure pour les « grands comptes »
La Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) s’est dotée début mars 2016 d’un « Service grands comptes (SGC) » dont la mission sera de fournir un accompagnement personnalisé aux grands opérateurs. Objectif : favoriser le développement du dédouanement centralisé en France, dans le cadre de la mise en œuvre du nouveau code des douanes de l’Union (CDU). Le CDU autorisera en effet les multinationales détentrices d’un certificat Opérateur économique agréé (OEA) à centraliser leur dédouanement dans un lieu unique de l’Union européenne (UE) : il s’agit donc pour l’administration française de proposer un service attractif par rapport à ses homologues de l’UE. L’article 2 de l’arrêté du 4 mars créant le SGC précise que ce dernier assure deux missions : « conseil des entreprises pour leur stratégie douanière ainsi que la recherche des simplifications et procédures adaptées à leur profil » et « délivrance, gestion et suivi de toutes les autorisations et procédures afférentes au dédouanement ».
Les plus petits opérateurs n’ont toutefois pas été oubliés : en parallèle, la douane a annoncé un recentrage des Cellules de conseil aux entreprises placées dans ses différentes directions régionales sur les PME et ETI.
La French Tech essème ses hubs dans le monde
Le réseau international de la communauté French Tech, qui regroupe entrepreneurs et acteurs publics et privés du numérique, a accéléré son développement à partir de la mi-2015. Il compte aujourd’hui une douzaine de « hubs » dans de grandes agglomérations labellisés par la Mission French Tech (MFT) du ministère de l’Économie, de l’industrie et du numérique :
– Abidjan et Cape Town en Afrique subsaharienne,
– Montréal, New York et San Francisco en Amérique du nord,
– Hong Kong, Séoul et Tokyo en Asie,
– Barcelone, Londres, et Moscou en Europe.
– Israël au Moyen-Orient
Qu’est-ce qu’un French Tech Hub et à quoi sert-il ?
Il doit être porté localement part une communauté associant acteurs privés (entrepreneurs, consultants, institutions type chambres de commerce, etc.) et publics (consulat, Business France, Bpifrance, etc.) avec pour objectif de structurer la communauté French Tech locale et de fournir un point d’accueil et d’accompagnement aux startups françaises en quête d’internationalisation. La labellisation, qui suppose de remplir un cahier des charges précis, apporte reconnaissance et appui des pouvoirs publics. Les demandes sont faites en ligne, sur le site de la MFT (www.lafrenchtech.com), et c’est cette dernière qui coordonne l’instruction des dossiers.
À noter que le réseau des French tech Hub dispose depuis fin janvier 2016 d’un site portail : hubs.lafrenchtech.com, qui recense et cartographie le réseau.