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Guide business Tunisie 2019 : maintenir le cap des réformes pour attirer les investisseurs

Malgré un contexte politique et économique difficile, le pays du jasmin continue à attirer les sociétés internationales, notamment françaises.

 

L’année 2019 pourrait constituer un nouveau tournant pour la Tunisie. Près de neuf ans après la Révolution du jasmin, ayant mis fin au régime Ben Ali, le paysage politique reste incertain.

Pour les opérateurs économiques, qui n’aiment pas l’instabilité, les élections de fin d’année – législatives (6 octobre) et présidentielles (10 novembre) – seront donc importantes. Sur fond de tensions entre le président Béji Caïd Essebsi et son chef de gouvernement Youssef Chahed, elles décideront du rapport de force entre les partis du chef de l’État, Nidaa Tounes, et du Premier ministre, Tahya Tounes, et le mouvement islamiste conservateur Ennahdha.

La situation économique et sociale « préoccupante », selon de nombreux observateurs, sera au cœur des débats. Le pays a besoin d’investissement pour retrouver un cycle vertueux : rééquilibrer la balance des paiements, endiguer la dépréciation du dinar, relancer la croissance.

À cet égard, d’ici les élections, un événement majeur pour le secteur privé s’est tenu à Tunis du 18 au 20 juin : le traditionnel Forum de l’investissement tunisien (TIF), organisé par l’Agence de promotion de l’investissement extérieur (Fipa) tunisienne.

Le TIF, sur le thème cette année de « La Tunisie à l’avant-garde de l’intelligence artificielle », sera l’occasion de rappeler que 3 500 sociétés étrangères sont implantées localement. Mais surtout ce sera l’occasion de mettre en valeur le nouveau texte sur le climat des affaires, plus connu sous le nom de « loi horizontale », devant inciter les investisseurs internationaux à cibler la Tunisie dans l’avenir.

D’après la Fipa, les IDE ont sensiblement progressé en 2018, de 28,6 % exactement pour atteindre 0,9 milliard de dollars. Certes, pour les deux tiers, ce sont des projets d’extension, mais le fait qu’un tiers est lié à des créations montre que la Tunisie est toujours perçue comme une destination d’avenir, en raison de la qualité de sa main-d’œuvre, sa position géographique au sud de l’Europe et sa volonté d’avancer ses pions sur l’échiquier subsaharien.

Au premier rang des pays investisseurs, la France aurait fait autant, avec 207 millions de dollars, que ses deux suivants, le Qatar, avec 158 millions, et l’Italie, avec 57 millions. La hausse globale des IDE est largement due au Qatar, dont, hors énergie, la part est passée de 6 % en 2017 à 26 %, alors que celle de la France a chuté de plus de 10 points à 34,2 %.

Bénéficiant d’un régime offshore, avec de nombres avantages (exemptions d’impôts…), les entreprises étrangères ont développé sur place des activités à haute valeur ajoutée, comme l’automobile, l’aéronautique ou l’électronique. Ce régime spécial a, sans conteste, contribué à faciliter l’intégration de la Tunisie aux chaînes de valeur mondiales. En revanche, il n’est pas parvenu à tirer la production locale.

Sa réforme, sous la pression de l’Union européenne avec laquelle la Tunisie négocie un Accord de libre-échange complet et approfondi (Aleca), ne va pas changer fondamentalement la donne. Les avantages qui y sont attachés vont rester, seul le taux de l’imposition va changer pour rapprocher systèmes offshore et onshore. Ainsi, la loi de finances de 2019 a fixé un taux unique de 13,5 % applicable à partir de 2021.

Reste que le système offshore essuie aujourd’hui un certain nombre de critiques. Par exemple, que la main-d’œuvre locale employée par les entreprises françaises notamment – des ingénieurs de haut niveau dans la mécanique, l’électronique ou l’informatique – quitte leur pays pour l’Hexagone et ne revienne pas. Mais aussi que le modèle arriverait à saturation et qu’il serait urgent d’ouvrir certaines activités encore réglementées, comme les services.

Parmi les autres réformes attendues, figurent la libéralisation des changes, la mise en œuvre de partenariats public-privé (PPP) et le lancement de concessions et privatisations. Les décisions à cet égard seraient difficiles à prendre, en raison de l’opposition de la principale centrale syndicale UGTT : l’Union générale des travailleurs tunisiens compte essentiellement des salariés des entreprises publiques. Le temps presse.

François Pargny

 

Chiffres clés
Population : 11,55 millions d’habitants (fin 2018)
Croissance économique : 2,7 % attendus par le FMI en 2019
Exportations : 13,6 milliards de dollars en 2018
Importations : 20 milliards de dollars en 2018

 

Une loi pour améliorer le climat des affaires

L’Assemblée des représentants du peuple (ARP) a adopté, le 23 avril 2019, le projet de loi n° 22/2019 relatif à l’amélioration du climat d’investissement. Avant le vote, Zied Ladhari, le ministre du Développement, de l’investissement et de la coopération internationale, expliquait que ce projet de loi prévoyait « de faciliter la création d’entreprises et de projets, de promouvoir l’investissement local et extérieur et de surmonter les obstacles entravant l’investissement ».
De façon concrète, la loi adoptée par l’ARP, dite « horizontale » ou « transversale », comprend des mesures de suppression des blocages administratifs, telle la création d’une commission des autorisations, interlocuteur unique des investisseurs au sein de la Tunisian Investment Authority (TIA) ; des assouplissements dans la création d’entreprises ou la gestion des sociétés (SA, SARL, etc.) ; des avantages offerts aux PME en matière de taux d’intérêt pour faciliter leurs crédits ; la liberté totale accordée aux investisseurs étrangers d’établir des universités privées ; l’assouplissement du système des partenariats privé-public (PPP).

 

Le pays bénéficie du soutien des bailleurs de fonds

Le Fonds monétaire international (FMI), dont une délégation se trouvait du 10 au 16 avril 2019 à Tunis, a approuvé la cinquième revue du programme de réformes économiques soutenu par le Mécanisme élargi de crédit (MEdC). Son conseil d’administration devrait ainsi autoriser fin juin une sixième tranche de 247 millions dollars, portant ainsi le total des déboursements dans le cadre du MEdC à environ 1,6 milliard.
L’appui du FMI et des autres bailleurs de fonds, qui vont ainsi pouvoir débloquer des financements, est indispensable. La situation économique est préoccupante. Car, si la croissance s’est redressée à 2,5 % en 2018, il faudrait le double, selon Stéphane Colliac, Senior Economist Africa chez Euler Hermes, pour résorber un chômage de masse de l’ordre de 15,3 % au premier trimestre 2019, touchant notamment les jeunes et les régions de l’intérieur, tenues à l’écart du développement sous l’ère Ben Ali.
En outre, le taux d’inflation est très élevé à 7,3 %. Ajoutons à ces facteurs socio-économiques, d’autres motifs d’inquiétude, comme le creusement en 2018 des déficits des balances commerciales (17,94 % du PIB) et courante (11,2 %) et la baisse des réserves de change à 85 jours d’importation au 19 mars, soit sous le seuil conseillé (90 jours) par le FMI.

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